Présent en Russie depuis l'époque des Tsars, le français avait bien résisté à la crise russe. Mais ses ventes ont plongé de 40% sur sept mois. Heureusement, Avtovaz (Lada), le groupe russe qu'il contrôle, s'en sort mieux. Après avoir longtemps résisté, Renault est pris au piège de la Russie. Première firme automobile étrangère à démarrer une production en Russie en 2005 avec la Logan, Renault y a vu ses ventes plonger de 40% sur les sept premiers mois de l'année à 67.000 unités, selon les chiffres de l'Association européenne des affaires (AEB) qui font autorité. Ses volumes ont reculé de 35% sur le seul mois de juillet. C'est l'un des plus gros plongeons avec Volkswagen (-44% sur sept mois), Ford (-52%). La palme de la plus forte chute revient toutefois à… Peugeot (-75% à 13.500) et Citroën (-74% à 12.460). Le marché russe lui-même a reculé de 35,3%% sur sept mois à 913.180 véhicules particuliers et utilitaires légers, de 27,5% en juillet. L'AEB prévoit un marché 2015 autour de 1,55 million de véhicules, ce qui représenterait un fléchissement de 36%par rapport à 2014. L'économie russe est frappée de plein fouet par les sanctions occidentales pour sa politique en Ukraine. La valeur du rouble est en chute libre. Les prix des matières premières, dont la Russie est une grande exportatrice plongent aussi, diminuant d'autant les revenus du pays. La Russie demeure en effet dépendante des exportations énergétiques qui représentent les deux-tiers de ses ventes à l'étranger. Le PNB de la Russie devrait reculer de 3,8% cette année, selon le cabinet IHS Automotive, et de 0,6% en 2016
Marché très peu rentable Renault ne détient plus que 7,3% du marché local, loin derrière les coréens Hyundai et Kia (autour de 10% chacun), alors que le français les devançait encore il y a un an. Clairement, Renault a décidé de réduire la voilure, comme la plupart des constructeurs occidentaux et japonais, à cause des conditions extrêmement difficiles et peu rentables du marché. Pourtant, la Russie était il y a peu encore l'un de ses marchés les plus profitables. La perte de valeur du rouble a notamment renchéri le prix des pièces importées pour les véhicules produits sur place. Même si Renault est moins touché car il dispose d'une forte intégration locale (70% pour un Duster). La Logan - vendue sous le label Renault et non Dacia - reste quand même le cinquième véhicule le plus vendu sur place. Le 4x4 Duster arrive septième. Peugeot et Citroën ne pèsent plus ensemble que 0,7% sur le marché russe. Stratégiquement, toutefois, Renault reste bien placé. La firme au losange a pris effectivement le contrôle (partiel) en 2008 du premier constructeur russe Avtovaz, le fabricant des Lada. Avant d'en devenir l'actionnaire majoritaire avec son allié Nissan il y a un an, avec 50% plus une action. Résultat : malgré la chute du marché automobile russe et la désaffection des clients pour les Lada vieillissantes, l'Alliance Renault-Nissan s'octroie 33,8% du marché russe. Pas mal. Avec ses voitures pas chères, Avtovaz, qui vient de fêter le 45ème anniversaire de sa première voiture, n'a reculé que de 27% sur sept mois à 161.630 unités, soit moins que le marché dans son ensemble. Avtovaz s'octroie 17,7% du gâteau, Nissan 6,1%. La Lada Granta reste la voiture la plus vendue sur place, juste devant une Hyundai.
Un site industriel géant Alors que plusieurs constructeurs ont annoncé leur intention de se retirer du marché, Carlos Ghosn, PDG de Renault et Nissan mais aussi président du conseil d'administration d'Avtovaz, a indiqué au contraire que l'Alliance n'avait nullement l'intention du quitter la Russie et qu'elle soutiendrait le producteur des Lada. Avtovaz espère vendre 325.000 voitures en Russie cette année, contre un demi-million en 2009. Le site géant d'Avtovaz à Togliatti, à 1.000 kilomètres au sud de Moscou, fabrique ses propres voitures, mais aussi des véhicules pour… Nissan et Renault. Il produit désormais des Logan II et Sandero II. Renault dispose ainsi d'un potentiel de 150.000 unités annuelles à Togliatti, qui s'ajoutent aux capacités de 180.000 à Moscou, une usine que Renault possède en propre (Avtoframos). Togliatti tourne à 70% de ses capacités actuellement, comme l'a affirmé récemment son directeur général Bo Andersson au site Automotive News Europe.
Renault apporte l'assistance technique Bâtie dans les années soixante avec l'aide des ingénieurs de Fiat pour produire la Fiat 124 de 1966, l'usine-ville de Togliatti est la plus grande… du monde par sa superficie. En 2008, elle employait encore 110.000 personnes. Un record mondial. Si elle se distinguait par ses dimensions hors normes, elle était aussi réputée négativement pour la qualité catastrophique de ses véhicules à la technologie obsolète. Heureusement, depuis, les ingénieurs de Renault ont apporté une assistance technique et installé notamment la chaîne de production ultra-moderne, celle de la plate-forme « B Zéro » des… Logan. La restructuration d'Avtovaz, qui perd de l'argent, est toutefois loin d'être terminée. Mais la qualité des produits s'améliore comme la compétitivité. En dépit de la chute des ventes, Avtovaz, qui exporte très peu, a réalisé un bénéfice net de 800 millions de roubles (14,9 millions d'euros) au premier trimestre de 2015, contre une perte de 2,9 milliards de roubles (54,1 millions d'euros) un an plus tôt.