La présidente de la Banque centrale américaine (Fed) Janet Yellen a répété mercredi qu'elle s'attendait à une hausse graduelle des taux d'intérêt aux Etats-Unis mais s'est montrée inquiète de l'impact du ralentissement de l'économie mondiale. Les développements économiques à l'étranger "comportent des risques pour la croissance américaine", a estimé Mme Yellen dans un discours devant la Commission financière de la Chambre des représentants. Mme Yellen a notamment signalé "les incertitudes sur la politique de change" en Chine qui accroissent "la volatilité sur les marchés financiers". La patronne de la banque centrale juge aussi que si elles continuaient, les conditions financières moins favorables aux Etats-Unis -- que ce soient le déclin des actions en bourse ou une nouvelle appréciation du dollar -- , peuvent "peser sur l'activité et le marché du travail". "Le Comité monétaire surveille de près les développements économiques et financiers dans le monde", a-t-elle dit, répétant le leitmotiv du dernier communiqué du Comité monétaire de la Fed (FOMC) fin janvier qui avait laissé les taux d'intérêt inchangés. La Fed les avait modestement augmentés en décembre après sept ans de politique à taux zéro pour soutenir la reprise. Ils se situent actuellement entre 0,25% et 0,50%. Mme Yellen se garde de fermer explicitement la porte à une nouvelle hausse à la réunion monétaire des 15 et 16 mars: "le Comité prévoit que les conditions économiques vont évoluer de telle façon que seulement une hausse graduelle des taux sera requise", redit-elle. Interrogée sur la possibilité de taux négatifs, Mme Yellen a déclaré: "Même s'il y existe toujours un risque de récession (...) je ne pense pas qu'il sera nécessaire de baisser les taux", soit à nouveau proche de zéro, soit en territoire négatif. Elle a par ailleurs reconnu que la divergence de la politique monétaire avec la zone euro notamment mettait une pression à la hausse sur le dollar. Mme Yellen a assuré que l'inflation, maintenue basse plus longtemps à cause des prix de l'énergie, allait remonter autour de 2% sur un an à moyen terme et noté les progrès "notables" du marché de l'emploi. Le taux de chômage est tombé à 4,9% en janvier. Point positif, la baisse des prix pétroliers équivaut à 1 000 dollars d'économies par an pour les Américains, a-t-elle indiqué. Elle a suggéré lors de la séance des questions que la faible hausse des salaires était un des facteurs expliquant le médiocre taux de participation au marché du travail aux Etats-Unis. Prise à partie sur le manque de diversité à la banque centrale et sur la disparité du taux de chômage touchant la communauté noire, Mme Yellen a reconnu qu'il était "hautement désirable" d'avoir pour la première fois à la tête d'une banque régionale de la Fed, un président noir. L'expansion économique américaine devrait "poursuivre une croissance modérée", a-t-elle par ailleurs assuré tandis que "la croissance économique mondiale devrait remonter avec le temps", soutenue par les politiques monétaires ultra-accommodantes.
Nombreuses sources d'inquiétude Mais les sources d'inquiétudes sont nombreuses qui font penser que la Réserve fédérale pourrait être plus lente à remonter les taux d'intérêt. Au début de l'année, les membres de la Fed pensaient pouvoir resserrer le crédit par quatre fois cette année pour porter les taux directeurs progressivement à 1,4%. Ce scénario paraît moins probable à la vue du ralentissement international et des turbulences sur les marchés financiers. Sur la Chine, Mme Yellen a jugé que "même si les récents indicateurs économiques ne suggèrent pas un vif ralentissement de la croissance chinoise, le repli de la valeur du renminbi (autre nom du yuan) a intensifié les incertitudes sur la politique de change en Chine et les perspectives de son économie". Elle déplore que ces incertitudes aient "accru la volatilité sur les marchés internationaux et (...) exacerbé les inquiétudes sur la perspective de la croissance mondiale". "Si ces risques à la baisse devaient se matérialiser, l'activité à l'étranger et la demande pour les exportations américaines pourraient s'affaiblir tandis que les conditions sur les marchés financiers pourraient se durcir encore plus", affirme Mme Yellen. Evoquant le volumineux bilan de la Fed après les achats massifs de bons du Trésor pour soutenir l'économie, la dirigeante a laissé entendre qu'il n'était pas encore temps de céder ces actifs. "Ce serait déstabilisant pour l'économie", a-t-elle affirmé, plaidant pour attendre que les taux d'intérêt "soient plus hauts". Elle a souligné en revanche que, notamment grâce au rendement de ces actifs, la Fed avait reversé au gouvernement et donc "aux contribuables" environ 615 milliards de dollars depuis 2008.
La Fed surprise de l'ampleur des taux négatifs en Europe et ailleurs La présidente de la Réserve fédérale (Fed) Janet Yellen a affirmé jeudi qu'elle avait été "surprise" de voir jusqu'où les taux d'intérêt sont allés en territoire négatif en Europe et ailleurs. Pour lutter contre la faible inflation et la morosité de l'économie, la Zone euro, le Japon et la Suède notamment ont adopté des taux d'intérêt négatifs. "Je dois dire que j'ai été surprise qu'il soit possible de placer les taux de façon aussi négative que ce qu'ont fait certains pays", a déclaré, devant une commission du Sénat, la patronne de la banque centrale américaine, soulignant que "les marges des banques en étaient réduites". Elle a reconnu que la Fed avait envisagé d'y recourir en 2010 juste après la récession mais estimé "que cela ne marcherait pas bien". "A la lumière de l'expérience des pays européens qui ont adopté des taux négatifs, nous regardons à nouveau la question car nous voulons être préparés au cas où nous aurions besoin de davantage de mesures accommodantes", a-t-elle affirmé lors de son témoignage semi-annuel au Sénat sur l'état de l'économie. "Nous n'avons pas fini cette évaluation. Nous devons considérer l'environnement institutionnel américain et voir si cela serait faisable", a-t-elle ajouté. Elle a aussi réaffirmé qu'elle ne pense pas qu'il va être nécessaire de baisser les taux aux Etats-Unis. "Ce n'est pas le scénario que je pense le plus probable", a-t-elle dit. Contrairement aux autres grandes banques centrales, la réserve fédérale américaine est pour l'instant sur une trajectoire de remontée "graduelle" des taux à court terme, commencée en décembre avec une hausse d'un quart de point, la première en neuf ans. Interrogée sur le fait de savoir, si le relèvement des taux par la Fed avait causé les turbulences sur les marchés financiers, Mme Yellen a assuré que la réaction à la décision de la Fed à la mi-décembre, avait été "tout à fait tranquille", car elle était "attendue et bien préparée". Le sévère accès de volatilité des marchés financiers depuis le début de l'année est plutôt en rapport, selon elle, "avec les mouvements sur la monnaie chinoise et le recul des prix du pétrole" associé "à des craintes plus larges sur un possible affaiblissement de la croissance mondiale". Selon elle, la chute des prix pétroliers reste "un bien" pour l'économie des Etats-Unis, même si le secteur des industries énergétiques en pâtit. Elle a répété que pour les ménages américains, cela représentait un gain d'un millier de dollars par an. "Qu'ils les dépensent ou pas, ce sont des gains substantiels", a-t-elle affirmé.