La Banque centrale européenne (BCE) s'est montrée jeudi plus optimiste sur les perspectives économiques dans la zone euro cette année et s'estime parée pour un potentiel "Brexit", mais elle a déçu les espoirs de la Grèce d'un geste envers ses banques. Il faudra encore attendre la mise en œuvre par Athènes de plusieurs mesures, par exemple des dispositions sur la privatisation du distributeur d'électricité Adime, pour que l'institution rouvre le robinet du financement des banques grecques aux mêmes conditions que leurs consœurs des autres Etats ayant adopté l'euro, a expliqué le président de la BCE Mario Draghi, qui donnait cette fois-ci sa conférence de presse à Vienne. Du côté des bonnes nouvelles, pour cette année, la BCE attend maintenant une croissance du PIB de 1,6% et une inflation de 0,2% dans cette zone. Des prévisions plus optimistes que celles de mars (1,4% et 0,1% respectivement), à la faveur d'une demande intérieure solide et d'une petite remontée des prix du pétrole. Mais les risques sont toujours nombreux. Le référendum britannique sur le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne, le 23 juin, est également source d'incertitude. Mais la BCE elle-même "est prête à toutes les éventualités" à ce sujet, assure son président.
Réformes nécessaires L'institution maintient une politique monétaire très généreuse et pourrait même encore renforcer son action en cas de nouvelle dégradation des perspectives, a martelé M. Draghi. Sur le front des prix, les gardiens de l'euro sont tenus en échec depuis de longs mois : lestés par la chute des cours du pétrole, les prix à la consommation ont encore reculé en mai dans la zone euro, de 0,1% sur un an. Pour la BCE, l'inflation idéale est "proche mais inférieure à 2%". Pour corriger le tir, elle a récemment accru son soutien à l'économie en gonflant son vaste programme d'achats de dettes - de 60 à 80 milliards d'euros par mois - , et en abaissant encore ses taux d'intérêt. Le taux central directeur est à zéro depuis mars. Les mesures déjà mises en oeuvre "ont fait une grande différence, elles ont été très efficaces", s'est félicité M. Draghi. Des achats de dettes d'entreprises, qui débuteront le 8 juin, et des nouveaux prêts géants aux banques, dont le premier aura lieu le 22 juin, devraient aussi contribuer à ramener l'inflation vers sa cible, a assuré l'Italien, invitant à la patience. En parallèle, "des réformes structurelles sont nécessaires dans tous les pays de la zone euro", a répété M. Draghi. Pour le moment, il fait porter l'attention sur "des actions permettant d'accroître la productivité et d'améliorer l'environnement des affaires", par exemple par "la mise à disposition d'infrastructures publiques adéquates", a-t-il dit.
Grèce : pas encore de décision Les réformes grecques en tout cas ne satisfont pas encore la BCE au point de la voir rétablir un régime de faveur pour les banques grecques, suspendu en février 2015. Il permettrait aux établissements hellènes de se refinancer gratuitement auprès de la banque centrale en échange de titres de dette publique grecque. Considérées comme des créances "douteuses", les obligations émises par l'Etat grec sont à l'heure actuelle irrecevables en tant que garanties de ces financements. Les accepter à nouveau soulagerait le système bancaire grec, qui se finance actuellement au moyen de prêts d'urgence plus onéreux. "Quand les actions préalables auront été mises en oeuvre, le conseil des gouverneurs prendra une décision qui conduira au rétablissement" de ce régime d'exception, a fait savoir M. Draghi. Les "actions préalables" ou "pré-requis" désignent des objectifs fixés par les bailleurs de fonds internationaux de la Grèce, sous perfusion des Européens et du Fonds monétaire international (FMI) depuis 2010, pour permettre le déblocage de tranches successives de crédits. "Athènes entend régler la question des dernières mesures préalables en suspens (...) cette nuit" avec un vote au Parlement, selon une source gouvernementale grecque. Le conseil des gouverneurs de la BCE tient lui sa prochaine réunion de politique monétaire le 21 juillet, mais plusieurs réunions non-monétaires sont prévues d'ici là au cours desquelles une décision concernant les banques grecques pourrait déjà être prise.