La "jungle" de Calais, vaste campement précaire de migrants dans le nord de la France, a commencé d'être évacuée hier matin. Un premier car a quitté Calais en direction de la Bourgogne. Il transportait 50 Soudanais et est parti 45 minutes après le début de l'opération d'évacuation fixé à 08h00. La grille bloquant l'accès à un vaste hangar a été ouverte, permettant à une colonne de plusieurs centaines de migrants de se présenter à l'entrée. Les forces de l'ordre avaient pris place un peu plus tôt pour encadrer l'accès des migrants, répartis en quatre groupes (mineurs isolés, personnes vulnérables, familles et adultes) qui prendront place à bord de bus à destination des 450 centres d'accueil et d'orientation (CAO) dans lesquels 7500 places ont été réservées. "Si on arrive à orienter 2000 à 2500 personnes lundi, c'est très bien", a estimé lundi Didier Leschi, directeur général de l'OFII (Office français de l'immigration et de l'intégration). Nuit quelque peu agitée Quelques heurts sporadiques ont opposé la veille, migrants et policiers, aux abords de la "Jungle" de Calais (nord de la France), à la veille de son démantèlement. Par ailleurs, les dernières mesures d'encadrement de l'évacuation ont été prises. Les policiers ont lancé des grenades lacrymogènes près de la rocade portuaire et à l'intérieur du campement, où plusieurs dizaines de migrants leur faisaient face, leur jetant quelques pierres. L'une de ces grenades est tombée dans un conteneur à ordures, qui a pris feu. Ce type de heurts est régulier depuis des mois. A l'issue d'une réunion avec les représentants de différentes communautés présentes dans la "Jungle" dimanche, la responsable locale de l'Etat français, Fabienne Buccio, a expliqué que ces derniers étaient "inquiets". La raison est qu'ils "ont vu arriver des personnes qu'ils ne connaissent pas, qui essaient de manipuler certains d'entre eux un peu plus fragiles". Une dernière mesure de sécurité a été prise en vue de l'évacuation lundi matin: l'accès au camp et à deux rues qui le longe, et qui seront empruntées pour rejoindre le hangar d'où partiront les bus pour les centres d'accueil et d'orientation (CAO), sera limité du 24 octobre au 6 novembre. Raison évoquée: le "risque élevé" que des militants No Border (ultra gauche) tentent d'empêcher cette opération d'évacuation. Réticence de Londres décriée La ministre française du logement Emmanuelle Cosse a critiqué lundi la réticence de Londres à accueillir des enfants isolés de la "jungle" de Calais au titre du regroupement familial. Elle a estimé que plusieurs centaines d'entre eux devraient être admis "rapidement" outre-Manche. Elle l'a fait savoir sur la radio RTL. Elle a déploré le cas d'enfants "dont les parents sont en Angleterre et qui ont les plus grandes difficultés pour être admis" outre-Manche, tout en reconnaissant "des progrès significatifs la semaine dernière". Accueil de 200 mineurs La Grande-Bretagne a accueilli cette semaine près de 200 mineurs isolés en provenance du camp de migrants de la Jungle à Calais, dans le nord de la France, dont plus d'un quart au titre de la vulnérabilité, a déclaré Pierre Henry, le directeur général de l'association France Terre d'Asile. Sur les 194 mineurs au total admis en Grande-Bretagne, 141 ont pu bénéficier de la réunification familiale, a-t-il précisé. Les 53 autres, des jeunes filles exclusivement, ont été transférés, samedi, au titre de la vulnérabilité, a-t-il ajouté. Selon les médias britanniques, c'est la première fois que la Grande-Bretagne met en application ce dispositif prévu par l'amendement Dubs adopté en mai qui permet un accueil dans ce pays des réfugiés mineurs isolés vulnérables, même s'il n'y ont pas d'attaches familiales. Les jeunes filles en ayant bénéficié viennent en majorité d'Erythrée, dans la Corne de l'Afrique, ont-ils souligné. Dimanche, 39 enfants et adolescents ont quitté la Jungle, dont 22 filles, tous dans le cadre de la réunification familiale, a ajouté Pierre Henry. Environ 500 d'entre eux ont affirmé avoir de la famille en Grande-Bretagne. Appel au respect Le gouvernement français, qui assure disposer de 7500 places d'hébergement, espère pouvoir vider la "Jungle" en "une semaine". De lundi à mercredi, 145 autocars se relaieront pour transporter les migrants vers près de 300 centres d'accueil temporaires dans toute la France. Reste à savoir comment ils seront reçus, alors que certaines villes ont protesté contre le plan de répartition du gouvernement tandis que des membres de l'opposition de droite évoquaient le spectre de la multiplication de "mini-Calais". Le ministre de la Ville Patrick Kanner a réclamé dimanche du "respect" et de l'"humanité" pour les migrants. "Accueillir dans des villes 30, 40 personnes (...) ça me paraît être la moindre des choses", a-t-il lancé.