L'attaquant bavarois traverse une longue période sans but en Bundesliga et, pour la première fois de sa carrière pro à Munich, n'a toujours pas marqué dans la compétition à ce stade de la saison. Une anomalie, certes, mais Müller a déjà connu pire dans ce domaine. Et les meilleurs attaquants de l'histoire du football allemand aussi... La statistique est aussi limpide que vertigineuse : sur 71 matches en Bundesliga du Bayern à l'occasion desquels Thomas Müller a inscrit au moins un but, 67 se sont terminés par une victoire et aucun, absolument aucun, par une défaite. Il n'existe, dans toute l'histoire du championnat allemand créé en 1963, aucun joueur ayant marqué dans autant de matches sans en perdre un seul. Or, et c'est bien le problème du Bayern, Müller ne marque plus. Depuis 2012, il en était toujours à au moins trois buts inscrits après dix journées ; la saison passée, il avait même établi son record personnel avec dix buts à l'issue des dix premières journées. L'attaquant de 27 ans en est à 663 minutes sans marquer en championnat version 2016-2017, et son dernier but en Bundesliga remonte au 30 avril à l'occasion du 1-1 contre Mönchengladbach. Ce n'est cependant pas la plus longue période sans but de la carrière professionnelle du Bavarois puisqu'il avait traversé 1157 minutes de jeu sans marquer en 2011/2012. Mais cette fois-ci, comme il l'a lâché à l'issue du nul contre Hoffenheim (1-1) début novembre, la poisse colle aux bottes. Ce jour-là, Müller avait frappé sur le poteau dans les arrêts de jeu... Une petite cure sur le banc Par le passé, il chassait ces nuages noirs en transformant, tôt ou tard, un penalty. Mais depuis qu'il a manqué quatre de ses six dernières tentatives dans cet exercice, il ne fait plus partie de la liste des tireurs du Rekordmeister. Frappe-t-il pour autant moins au but ? Non : 3,3 tirs toutes les 90 minutes sous Guardiola, 3,5 sous Ancelotti. Il existe pourtant une différence : le temps de jeu. Alors qu'il n'avait jamais manqué plus de trois matches de championnat par saison sous le mandat du technicien catalan, Müller a déjà été absent trois fois du onze de départ depuis août. Une petite cure sur le banc pour refaire du jus est du reste ce que suggérait la semaine dernière Olaf Thon, champion du monde 1990. Non pas comme punition, mais pour reprendre des forces physiques et psychologiques. D'autres, et les plus prestigieux, ont connu ce genre de périodes de disette : Gerd Müller a passé 965 minutes sans marquer, Klaus Fischer 1225, Jupp Heynckes 1035, Robert Lewandowski 562, Pierre-Emerick 786, Mario Gomez 680. Mais ce sont tous des attaquants axiaux, ce que Müller n'est pas, du moins pas seulement. Qu'importe : il est au centre du problème. L'hebdomadaire Sport Bild, référence de la presse sportive allemande, n'y est pas allé par quatre chemins dans son édition du 23 novembre : Müller, selon nos confrères, est "le visage de la crise au Bayern". Au sens où le natif de Weilheim, en Haute-Bavière, incarne son club, pas de doute. Le charismatique Edmund Stoiber, président du Land de Bavière de 1993 à 2007 et actuel président du conseil d'administration du Bayern, a confirmé ce dimanche que le club avait refusé cette saison une offre de 100 M€ en provenance d'Angleterre en justifiant ce choix de la manière suivante, et avec véhémence : "Thomas Müller incarne le Bayern". Ce que personne n'aurait le culot de contester, mais qui signifie donc qu'il incarne aussi la mini-crise que traverse en ce moment le club quadruple champion d'Allemagne en titre. 20 sur 20 dans la surface Contrairement à son habitude bonhomme et complice vis-à-vis des médias et du public, le numéro 25 du Bayern, à l'issue de la défaite à Dortmund (0-1, le 19 novembre), a traversé la zone séparant le vestiaire du bus en hâtant le pas. Sans s'arrêter. En lâchant simplement, visiblement frustré : "J'ai assez parlé ces derniers temps". Carlo Ancelotti, son entraîneur, a identifié trois sources à la méforme du Bayern : le manque de précision dans la dernière passe, le manque de dureté et d'intensité dans le jeu, le manque de finesse dans les filières de jeu. La première de ces raisons pénalise évidemment le buteur, et Lewandowski en pâtit clairement aussi. La troisième a également de lourdes conséquences : le 4-3-3 du technicien italien apparaît trop statique, défense, milieu et attaque agissant isolément. Müller évolue au même poste en équipe nationale, mais il est habitué et autorisé par son sélectionneur à permuter avec Mesut özil : ces derniers temps, en club, il est cantonné à sa position de départ, ce qui l'empêche de rôder dans cette surface de réparation où il est si dangereux : la totalité de ses 20 buts en 2015-2016 en Bundesliga ont été inscrits depuis l'intérieur de la surface ! à cela s'ajoute la malchance et, déjà, trois tirs sur les montants cette saison en championnat. à tel point que Müller a accepté de bonne grâce, à la demande de son formateur, l'éternel entraîneur adjoint Hermann Gerland, de s'infliger du rab d'entraînement en sa compagnie. Des ateliers finition. Histoire de retrouver un peu de sûreté dans les gestes. Il se murmure, plus largement, que plusieurs joueurs déplorent le manque d'instructions pour la conduite du jeu. Les séances vidéo, elles, sont notoirement plus courtes que celles administrées par le staff de Josep Guardiola, l'entraîneur italien préférant la discussion moins formelle avec ses cadres. Considéré comme "l'anti-Pep", une comparaison qu'il n'aime guère, Ancelotti correspond davantage à des profils d'entraîneurs du Bayern qui ont remporté la Ligue des champions, comme Jupp Heynckes ou Ottmar Hitzfeld. Ce qui l'importe, c'est de gagner au printemps. à Thomas Müller de faire preuve de la même patience pour retrouver le chemin des filets.