Des centaines de manifestants mais aussi les radios et les télévisions burkinabè ont observé 13 minutes de silence mardi, en hommage au journaliste d'investigation Norbert Zongo assassiné il y a 18 ans jour pour jour, sous le régime du président déchu Blaise Compaoré. Les radios et télévisions ont observé 13 minutes de silence média à la demande des associations de journalistes et de presse pour protester contre l'impunité et le déni de justice dans le cadre de cette affaire. Au même moment, plusieurs dizaines de personnes rassemblées pour un sit-in devant le palais de justice de Ouagadougou ont observé également treize minutes de silence en ce jour anniversaire, la bouche recouverte de papier adhésif pour symboliser le silence de la justice dans l'instruction du dossier Zongo, a expliqué Smockey, chanteur de rap et porte-parole du Balai citoyen, mouvement qui a été à la pointe des manifestations anti-Compaoré en 2014. Dans un mémorandum d'indignation et de protestation remis à la procureure du Tribunal de grande instance de Ouagadougou, les organisateurs de la manifestation se sont dits indignés par (la) lenteur, voire la léthargie de la justice sur ce dossier. Combien de temps faut-il attendre pour que la justice soit faite pour ces cas emblématiques de crimes économiques et de sang du régime déchu du président Blaise Compaoré? Pourquoi n'y a-t-il toujours pas le moindre début de procès dans ce dossier?, interroge le mémorandum. Dans la matinée, plusieurs centaines de manifestants avaient défilé dans Ouagadougou avec des banderoles ou des pancartes où l'on pouvait notamment lire vérité et justice pour Norbert Zongo! ou A bas les assassins et les commanditaires. Journaliste d'investigation et directeur de publication de l'hebdomadaire L'indépendant, Norbert Zongo et trois de ses compagnons ont été retrouvés morts carbonisés dans leur véhicule le 13 décembre 1998 à 100 km près de Sapouy, dans le sud du Burkina. Une commission d'enquête indépendante (CEI) instaurée sous la pression populaire a conclu quelques mois plus tard que le journaliste avait été tué dans le cadre de l'exercice de ses fonctions. Auteur de plusieurs enquêtes retentissantes mettant à nu la mauvaise gouvernance sous le régime du président Compaoré, M. Zongo enquêtait au moment de son assassinat sur la mort de David Ouédraogo, chauffeur de François Compaoré, frère cadet et conseiller économique du président Compaoré surnommé le petit président. Le Collectif des organisations de masse et des partis politiques contre l'impunité a dénoncé le silence radio des autorités gouvernementales. Dans un communiqué publié mardi, l'organisation de défense des journalistes Reporters sans Frontières (RSF) demande dix-huit ans après l'assassinat du journaliste Norbert Zongo (...) aux autorités burkinabès d'accélérer la procédure judiciaire afin que l'assassinat du journaliste soit élucidé et que justice soit enfin rendue. Sous Compaoré, le dossier Zongo s'était enlisé, la justice ayant déclaré en 2003 un non-lieu en faveur du seul inculpé. La justice a rouvert le dossier à la chute de M. Compaoré fin octobre 2014, chassé par la rue après 27 ans au pouvoir. Le 15 décembre 2015, trois ex-soldats du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), l'ancienne garde prétorienne de M. Compaoré - dissoute après sa tentative de coup d'Etat mi-septembre 2015 - ont été inculpés par la justice.