Les états-Unis ont lâché leur principal allié au Moyen-Orient en s'abstenant lors du vote de la résolution 2334 au conseil de sécurité de l'Onu. Pour la première fois depuis 1979, les états-Unis n'ont pas opposé leur veto à une résolution du Conseil de sécurité concernant la colonisation israélienne. " Le problème de la colonisation est devenu si grave qu'il met en péril la viabilité même de la solution à deux ?tats ", s'est expliquée Samantha Power, représentante de Washington aux Nations unies. La résolution 2334, adoptée vendredi 23 décembre, rappelle le caractère illégal des colonies: " L'établissement par Israël de colonies dans le territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, n'a aucune valeur juridique et constitue une violation flagrante du droit international et un obstacle majeur à la réalisation de la solution à deux ?tats ". Si le texte n'est pas coercitif, il peut néanmoins avoir des conséquences sur le plan intérieur, selon Alain Rozenkier, sociologue et président du mouvement " La Paix Maintenant ": Il peut pousser la droite extrême à être beaucoup plus revendicative. Elle l'a déjà été pas mal par le passé. En disant, "vous voyez, de toute façon, la communauté internationale est contre nous, donc ce n'est pas la peine de prendre des gants, d'essayer de nous faire admettre, on admettra jamais. Donc annexons la zone C, annexons une partie des territoires palestiniens". Il peut y avoir un risque d'escalade. Une partie de la droite est quand même plus rationnelle. Je ne pense pas qu'on en arrive à ces extrémités, mais ce n'est pas totalement exclu. Le texte exhorte l'état hébreu à " cesser immédiatement et complètement toute activité de colonisation en territoire palestinien occupé, dont Jérusalem-Est ". Lequel a rétorqué par la voix de son Premier ministre Benyamin Netanyahu qu'il " rejetait cette résolution anti-israélienne honteuse des Nations unies et ne s'y conformerait pas ". Furieux de s'être fait lâcher par les états-Unis, le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou soupçonne Washington d'être à l'origine même de cette résolution: " Nous n'avons aucun doute que l'administration Obama a initié cette résolution, en a coordonné la rédaction et exigé de l'adopter ". Les autorités israéliennes espéraient en vain une inflexion de la politique américaine avec la nomination de Donald Trump. Le gouvernement israélien, " dirigé par une droite extrême ", refuse de voir les " éléments positifs ", estime Alain Rozenkier: Cette déclaration a le mérite de rappeler la position de la communauté internationale. Et quelque part, elle confirme le droit à l'existence et la reconnaissance d'Israël à l'intérieur de la ligne verte, à l'intérieur des frontières de 1967, ce qui est positif et ce dont aurait pu s'emparer les autorités israéliennes pour avoir une position beaucoup plus modérée à l'égard de cette résolution. Les autres pays membres du Conseil n'ont pas été épargnés par la colère des autorités israéliennes. Plusieurs ambassadeurs, notamment au Sénégal ou en Nouvelle Zélande, ont été rappelés, et la visite du Premier ministre ukrainien, prévue cette semaine, a été annulée. Le Premier ministre Benyamin Netanyaou entend aussi revoir ses rapports avec l'Onu: " tous les engagements d'Israël avec l'Onu, y compris le financement par Israël d'organismes des Nations unies et la présence en Israël de représentants de l'Onu" seront réévalués. A l'égard d'états plus importants comme la Russie ou l'Espagne, Israël est beaucoup plus prudente. Il y aura peut-être quelques mesures de rétorsion à l'encontre de l'Onu ou des agences de l'Onu. De toute façon Israël a plus à perdre de ces mesures de rétorsion que ces agences. C'est une défaite pour Netanyahou par rapport aux positions qu'il essayait de faire passer. Lundi, le ministre israélien de la Défense, Avigdor Liberman, a averti que la conférence sur la paix au Moyen-Orient prévue à Paris le 15 janvier serait " un procès Dreyfus moderne ". L'administration d'Obama derrière ça ? Alors que le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé l'administration du président sortant américain Barack Obama d'être derrière la résolution du Conseil de sécurité de l'Onu contre la colonisation, Washington semble avoir eu la possibilité de manifester sa position. Sputnik a interviewé le vétéran du service diplomatique israélien et consultant pour le Centre de la politique proche-orientale de l'Institut Brookings Dan Arbell au sujet de la résolution du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (Onu) contre la colonisation israélienne des territoires palestiniens. " L'adoption de cette résolution est un évènement historique qui touchera toutes les futures négociations sur la paix entre Israël et la Palestine. Pour l'instant, le document a plutôt un caractère symbolique, parce qu'il ne comprend pas de points appelant à des mesures concrètes ou supposant telles ou telles conséquences ", explique l'expert. Selon M. Arbell, l'idée était depuis longtemps dans l'air et il était évident qu'avant de quitter la Maison Blanche, Barack Obama entreprendrait une démarche supplémentaire. Le politologue précise que l'administration de Barack Obama s'est toujours prononcée contre la colonisation israélienne des territoires palestiniens. Pour Washington, la perspective de la coexistence de deux états est cruciale. " De plus, la décision de Washington a subi l'influence d'un autre facteur : les relations américano-israéliennes, plus précisément, les relations entre le président Barack Obama et le premier ministre Benjamin Netanyahu marquées par des tensions. Ce n'était un secret pour personne", déclare l'expert. Vendredi dernier, le Conseil de sécurité de l'Onu a adopté la résolution condamnant la colonisation israélienne des territoires palestiniens. Le document a été soutenu par 14 pays membres du Conseil de sécurité. Les états-Unis se sont abstenus lors du vote. Israël refuse de respecter la résolution et s'apprête à revoir ses rapports avec l'Onu. Annulation d'un vote sur des permis de construction dans des colonies La municipalité de Jérusalem a annulé mercredi un vote prévu sur l'octroi de permis de construire pour des centaines de nouveaux logements à Jérusalem-Est occupée et annexée, a indiqué l'ONG anticolonisation Ir Amim. La radio militaire israélienne a, elle aussi, rapporté que les discussions au sujet de ces permis, prévues quelques jours après l'adoption d'une résolution à l'ONU condamnant la colonisation israélienne, avaient été retirées de l'ordre du jour du comité de planification et de construction de la municipalité de Jérusalem. Ce comité devait discuter de la délivrance de permis de construire dans plusieurs quartiers de colonisation de Jérusalem-Est, partie palestinienne de la ville sainte occupée et annexée par Israël. Le maire adjoint de Jérusalem, Meïr Turgeman, qui préside ce comité, avait indiqué mardi que le vote de vendredi à l'ONU d'une résolution exhortant Israël à cesser immédiatement et complètement toute activité de colonisation en territoire palestinien occupé, dont Jérusalem-Est ne remettait nullement en question cette réunion, prévue de longue date.