Avec son premier SUV le Stelvio, Alfa Romeo a réussi ce qu'on attendait de lui. Ce modèle surélevé se révèle presque aussi agréable à conduire que la berline Giulia dont il dérive. Que ce trajet entre l'aéroport de Zurich et Saint-Moritz me paraît interminable ! L'organisation d'Alfa Romeo ayant eu l'idée saugrenue de nous faire rouler en convoi, il nous faut suivre les lents minibus qui ouvrent la route. Pourtant, je suis assis à l'arrière d'une Giulia Veloce qui pourrait virevolter sur les petites routes de montagne. Et Franco, mon chauffeur italien pour ce transfert, semble lui aussi bouillir d'impatience. Il laisse un peu de champ libre à chaque sortie d'épingle pour pouvoir profiter de l'accélération et du caractère de propulsion assez marqué de la berline. De mon côté, j'apprécie l'habitabilité des plus convenables, l'insonorisation plutôt soignée et le confort de suspension remarquable. Sans conteste, Alfa Romeo est parvenu à offrir à sa Giulia un niveau de raffinement équivalent à celui des berlines haut-de-gamme de la concurrence. A une différence près : au volant d'une Audi A4, d'une BMW Série 3 ou d'une Volvo S60, Franco n'aurait pas autant trépigné. Il aurait sombré dans une douce léthargie consécutive au train de sénateur qu'on lui impose, sans regretter de ne pouvoir exploiter "la meccanica delle emozioni". Lors des derniers kilomètres avant Saint-Moritz, la neige tombe à gros flocons. Les chasse-neige n'ayant pas eu le temps de passer, la progression se fait encore plus lente. Malgré les pneus hiver et la transmission intégrale, je sens l'arrière de la Giulia Veloce se déhancher à chaque sortie de virage. Etonnant. La transmission Alfa Romeo Q4 ne serait-elle pas optimale sur terrain difficile ? J'ai hâte de le vérifier en prenant les commandes du Stelvio qui dispose de la même mécanique : le SUV italien va-t-il se ranger à l'opinion de la majorité et miser sur une stabilité à toute épreuve sur terrain glissant, doublée d'une neutralité rassurante ?
Au volant de l'Alfa Romeo Stelvio Vient enfin le moment tant attendu. Le Stelvio au volant duquel je me suis installé s'apparente fort à une version surélevée de la Giulia Veloce dans laquelle j'ai été conduit la veille. Même châssis, trains roulants très proches (seules les jambes de force à l'avant ont été rallongées), même transmission intégrale et même quatre-cylindres Diesel de 210 ch. Beaucoup d'éléments sont communs entre la berline et le SUV, y compris l'empattement (distance entre les roues avant et arrière). La route nous emmène vers le Col de Bernina, le plus haut des Alpes à rester ouvert toute l'année. En cette saison, le bitume y est recouvert de neige. L'occasion rêvée de comprendre la logique de la gestion de la transmission intégrale. Comme chez BMW, elle donne priorité au train arrière, le couple étant renvoyé vers les roues avant par le biais d'un embrayage, uniquement lorsque le besoin s'en fait sentir. Voilà donc qui explique les dérives de notre Giulia de la veille. Heureusement, elles se révèlent aussi prévisibles que faciles à contrôler. Le transfert de couple sur les quatre roues n'est pas aussi imperceptible que les ingénieurs de la marque veulent bien nous le faire croire, mais l'ensemble se révèle plutôt efficace, même s'il apparaît illusoire de suivre une Subaru ou une Audi Quattro sur ce terrain. En tout cas, l'ensemble apparaît suffisamment sécurisant. Le quatre-cylindres Diesel offre quant à lui une belle santé. Les 210 ch sont réellement présents et son allonge permet de doubler sans crainte. La consommation apparaît correcte, sans plus, avec une moyenne aux environs de 8,0 l/100 km. On connaît plus feutré sur le segment mais, globalement, le niveau sonore se révèle acceptable aux régimes usuels. Ce, d'autant plus que la boîte automatique à huit rapports d'origine ZF se révèle parfaitement gérée. Il s'agit d'ailleurs de la seule transmission disponible sur l'Alfa Romeo Stelvio, quelle que soit la motorisation.
L'Alfa Romeo Stelvio essence manque d'un "cuore sportivo" Après cette ronde enneigée, vient le temps pour nous de changer de monture et de route. Nous décidons de nous pencher sur l'autre motorisation disponible au lancement, le quatre-cylindres essence de 280 ch. Livré sur la version de lancement dénommée Stelvio First Edition, il s'agit d'un version plus poussée du bloc de 200 ch inauguré par la Giulia l'an passé. Techniquement, seule la gestion électronique diffère entre les deux versions de ce moteur d'une cylindrée de 2,0 litres. Sans surprise, il affiche donc un caractère semblable. Assez vigoureux, il offre des relances en ligne avec la puissance indiquée. Mais son caractère par trop linéaire déçoit un peu ; le temps du "cuore sportivo" et des 4-cylindres Twin Spark rageurs est malheureusement révolu. Heureusement, là encore, l'excellence de la boîte permet de retrouver le sourire. En mode manuel, chaque pichenette d'un côté ou de l'autre du volant se traduit par un changement de rapport instantané, ponctué d'une légère secousse en conduite dynamique. Un petit artifice qui est vraiment là pour l'ambiance, cette transmission se révélant parfaitement policée en conduite coulée. Sur ce versant sud de la montagne, le soleil a frappé et nous pouvons enfin profiter de lacets revêtus de bitume vif. C'est l'occasion ou jamais de vérifier si le Stelvio tient les promesses de sa sœur Giulia. Les virages s'enchaînent avec bonheur, la direction très directe aidant à s'inscrire sans délai. L'inertie semble absente, et c'est en grande partie grâce à une masse relativement bien contenue, de 1.660 kg. C'est 75 kg de moins qu'un Mercedes-Benz GLC équivalent et 100 kg de moins qu'un Jaguar F-Pace. Pourtant, ce dernier fait appel une structure entièrement en aluminium, alors que le Stelvio réserve ce matériau aux seuls ouvrants. L'agilité est donc de mise, et on retrouve le comportement enjoué de la Giulia. Le Stelvio obéit au doigt et à l'œil, se place à volonté en jouant de l'accélérateur et ne souffre guère des revêtements inégaux. Seul regret : comme sur la Giulia, il est impossible de déconnecter l'ESP. On aurait pourtant envie d'aller plus loin ! A première vue donc, Alfa Romeo semble avoir réussi là où Jaguar a échoué avec le F-Pace, décevant comparé à une XE, la berline dont il dérive qui, elle, s'avère très agréable sur petite route. Il faudra bien sûr un essai plus prolongé pour valider ces premières impressions. Mais il semble possible d'aller chercher les Porsche Macan et Mercedes-Benz GLC sur le terrain du dynamisme. Pas de compromis donc sur ce Stelvio ? C'est à voir. Car si l'agilité nous a semblé très proche de celle de la Giulia, c'est au niveau du confort que le SUV Alfa Romeo perd quelques plumes. Lors de traversées de village en effet, les trépidations nous ont semblé plus nombreuses. Est-ce dû aux tarages du suspensions plus fermes, qui doivent composer avec un centre de gravité plus élevé ? Ou aux jantes de 20 pouces qui équipaient notre modèle d'essai ? Difficile à dire mais cela confirme une fois de plus qu'un SUV doit nécessairement faire quelques sacrifices sur la plan dynamique par rapport à une berline. Comme nous l'espérions donc, le Stelvio sait jouer de ses charmes pour séduire. Ce premier SUV est parvenu à se révéler comme une vraie Alfa Romeo. En toute logique, la finition est un peu moins léchée que sur un Audi Q5 ou un Mercedes-Benz GLCmais elle se révèle assez proche d'un Jaguar F-Pace. Correct donc, même si perfectible dans le détail. On lui pardonne bien volontiers, puisque les tarifs sont assez nettement inférieurs à ceux de la concurrence de ces trois références, auxquelles on peut ajouter le Porsche Macan et le BMW X3. L'avantage est entre 2.500 € et 5.000 € pour l'italien. Le ticket d'entrée paraît pour l'instant assez élevé, puisqu'il est de 49.200 € en Diesel 210 ch, finition Super. L'arrivée attendue des motorisations d'entrée de gamme (essence 200 ch et Diesel 180 ch) permettra de rendre le Stelvio plus accessible.