Les cours du pétrole rebondissaient nettement mercredi en Asie à la faveur d'estimations sur une baisse surprise des stocks de brut américain et de clarifications sur la production saoudienne. Vers 04h15 GMT, le baril de light sweet crude (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en avril, prenait 84 cent, à 48,56 dollars, dans les échanges électroniques en Asie. Le baril de Brent, référence européenne, pour le mois de mai, gagnait 77 cents, à 51,69 dollars. Les cours ont repris des couleurs avec la publication des estimations de la fédération privée American Petroleum Institute (API). Celle-ci a fait état d'un déclin des stocks hebdomadaires de 531.000 barils, contre une augmentation attendue de 3,5 millions. L'état des stocks américains est un indicateur de la demande chez le plus gros consommateur mondial de brut. Le marché qui avait beaucoup baissé ces derniers jours s'est retrouvé encore plus plombé mardi par un rapport montrant que l'Arabie saoudite, poids lourd de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), avait fait remonter sa production au-dessus des 10 millions de barils par jour en février. Cela a été perçu comme de mauvais augure pour le respect des accords de réduction de l'offre au sein du cartel et avec des pays tiers, entrés en vigueur le 1er janvier. "La baisse surprise des stocks est venue à point nommé, alors que le Brent et le WTI étaient menacés de plonger à nouveau, avec l'augmentation de la production saoudienne, et des chiffres de l'Opep montrant que l'Iran est apparemment en train d'ignorer complètement son quota de réduction", a déclaré Jeffrey Halley, analyste chez OANDA. Chris Weston, analyste chez IG Markets, a lui déclaré qu'il y avait eu de la confusion sur les chiffres de la production saoudienne. Mais la situation a été clarifiée par des explications sur le fait que le surplus de production était destiné au marché intérieur et non international. Malgré ce rebond, les analystes jugent généralement que les cours devraient rester volatils. Les marchés attendent désormais la publication des chiffres officiels sur l'état des stocks du Département américain de l'Energie. Crainte alimentée par l'Arabie saoudite La veille, les cours du pétrole ont terminé en nette baisse, des inquiétudes sur la participation de l'Arabie saoudite à l'effort de réduction de l'offre alimentant la dégringolade entamée il y a près d'une semaine. Le baril de "light sweet crude" (WTI), référence américaine du brut, a reculé de 68 cents à 47,72 dollars sur le contrat pour livraison en avril au New York Mercantile Exchange (Nymex). A Londres, le cours du baril de Brent de la mer du Nord a perdu 43 cents à 50,92 dollars sur le contrat pour livraison en mai à l'Intercontinental Exchange (ICE). "Le marché est passé à la vente dès que les investisseurs ont vu le rapport indiquant que les Saoudiens avaient fait remonter leur production au-dessus des 10 millions de barils par jour en février", a expliqué Andy Lipow, de Lipow Oil Associates. Cela a été perçu comme de mauvais augure pour le respect des accords de réduction de l'offre au sein de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et avec des pays tiers, entrés en vigueur le 1er janvier et dont l'Arabie saoudite a été le principal artisan. Au vu de l'importance de ce pays au sein de l'Opep, les chiffres déclarés par l'Arabie saoudite ont éclipsé ceux issus de sources secondaires généralement privilégiés par les analystes. Ils faisaient état, dans le même rapport du cartel publié mardi, d'un léger recul de la production saoudienne. Attente des stocks américains Plus généralement, l'Opep a de nouveau réduit sa production en février mais à un rythme moins rapide qu'au mois précédent, toujours selon des sources secondaires. "Il y a des inquiétudes sur le fait que l'accord de limitation de la production de l'Opep ne s'effiloche", a commenté Matt Smith, de Clipperdata. Dans ce contexte, le marché du pétrole est retombé au plus bas depuis la conclusion de l'accord de réduction des extractions fin novembre, qui avait pour but de rééquilibrer un marché souffrant d'un excès de brut. Toujours sur le front de l'offre, le département américain de l'Energie (DoE) prévoit une nouvelle augmentation de la production de pétrole de schiste aux Etats-Unis de plus de 100 000 barils par jour au mois d'avril, selon un rapport publié lundi. La tendance à la hausse de la production américaine depuis fin septembre a réduit à néant une partie des efforts de l'Opep et de ses partenaires et s'est traduite ces dernières semaines par des réserves américaines de brut à des niveaux record. Les investisseurs attendent donc avec impatience les données du DoE sur le niveau des stocks de pétrole publiées comme chaque semaine mercredi. Les analystes anticipent une nouvelle hausse hebdomadaire des réserves de brut de 3 millions de barils pour la semaine achevée le 10 mars, selon un consensus compilé par l'agence Bloomberg. Avant cela, ils prendront connaissance dès mardi soir des estimations de la fédération privée American Petroleum Institut (API). Enfin, le marché du pétrole a pu être affecté mardi par une moindre participation des opérateurs américains avec la tempête qui sévit dans le nord-est des Etats-Unis, a relevé Carl Larry, de Oil Outlooks, ce qui a pu accentuer la volatilité. La baisse de l'offre ralentit L'offre pétrolière mondiale a continué à baisser en février, quoique bien plus modestement que le mois précédent, dans le sillage de la mise en oeuvre des accords de limitation de la production, a indiqué mardi l'Opep. Le mois dernier, la production de pétrole mondiale a atteint 95,88 millions de barils par jour (mbj), soit une baisse de 210.000 barils par jour (bj) par rapport à janvier, mais elle est restée stable sur un an, détaille l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, dans son rapport mensuel. L'Opep à elle seule n'a vu sa production baisser que de 140.000 bj en février, à 31,96 mbj, contre un déclin bien plus significatif de 890.000 bj enregistré en janvier, précise-t-elle en citant des sources secondaires. "C'est au Nigeria que la production de pétrole a le plus augmenté (+58.000 bj) alors qu'elle a le plus baissé en Arabie saoudite (-68.100 bj), en Irak (-62.000 bj), aux Emirats arabes unis (-36.900 bj) et en Angola (-18.200 bj)", explique l'Opep. Les membres du cartel s'étaient accordés en novembre pour réduire leur production de 1,2 mbj à partir du 1er janvier pour une période de six mois renouvelable. En décembre, des pays non membres du cartel, emmenés par le plus grand producteur mondial de brut, la Russie, avaient décidé de faire de même à un niveau de 558.000 barils par jour. Ces réductions visent à permettre à un marché inondé d'or noir depuis mi-2014 de se rééquilibrer, et à des cours déprimés de se redresser. Mais la remontée de la production de pétrole aux Etats-Unis a porté un coup à la remontée des prix observée depuis fin 2016: la semaine dernière, le Brent est ainsi repassé sous la barre des 52 dollars le baril, tandis que le WTI a franchi en baisse le seuil des 50 dollars le baril. De fait, selon les prévisions du cartel, l'offre pétrolière des pays hors Opep devrait croître davantage qu'anticipé en 2017, en raison de perspectives de production revues à la hausse au Canada et aux Etats-Unis. L'Opep table désormais sur une croissance de 400.000 barils par jour cette année pour les pays extérieurs au cartel - soit 16.000 barils par jour de plus que précédemment anticipé - pour s'établir à quelque 57,74 mbj, contre 57,34 mbj en 2016 (ce qui représentait une baisse de 660.000 barils par rapport à 2015). "Cette prévision (pour 2017) est principalement attribuable à des attentes plus élevées pour la production canadienne de sables bitumineux et une croissance plus élevée aux Etats-Unis", explique l'Opep, qui ajoute que la progression de l'offre pétrolière américaine pour cette année a été révisée à la hausse de 100.000 barils par jour en raison d'un nombre de puits en activité et de flux de trésorerie plus importants. Quant à la consommation mondiale de pétrole, elle devrait avoir augmenté de 1,38 mbj (+50.000 barils par rapport à la précédente estimation), à 95,05 mbj en 2016, et progresser de 1,26 mbj cette année, pour s'établir à quelque 96,31 mbj, soit une hausse de 70.000 barils par jour de plus que la précédente anticipation du cartel. Selon l'Opep, la majeure partie de cette croissance devrait provenir de l'Inde et de la Chine, suivies par les Etats-Unis.