Les contentieux dans le domaine de l'urbanisme entre gestion, évolution de la législation, les attributions des pouvoirs aux collectivités locales en la matière, mais aussi les prérogatives des maires, notamment en matière de démolition, sont autant de questions à l'ordre du jour de la rencontre internationale, qui a été organisée, hier, par le Conseil d'Etat. En effet, selon la chambre de l'urbanisme au Conseil d'Etat, le nombre de litiges enregistrés entre les juges et les pouvoirs publics a dépassé les 500. La présidente du Conseil d'Etat, Mme Fella Henni, a reconnu, de son côté, l'existence d'un "grand dysfonctionnement" en matière de jurisprudence concernant les contentieux sur l'urbanisme. Mme Henni a expliqué ce dysfonctionnement par "les différentes interprétations que donnent les magistrats aux textes de loi". Cette situation donne lieu à des divergence, dans les décisions judiciaires prononcées par les différentes chambres administratives, en dépit de la similitude des affaires, a-t-elle ajouté. Citant l'exemple de la délivrance du permis de construire, la présidente du Conseil d'Etat précise que la loi confère cette prérogative au président de l'Assemblée populaire communale (APC), soulignant qu'au cas où ce dernier s'y refuse pour une raison ou une autre, certains magistrats peuvent enjoindre le président d'APC de délivrer ce permis, alors que d'autres s'y préservent car voyant en cela une ingérence du pouvoir judiciaire dans les affaires du pouvoir exécutif. L'autre sujet, objet de divergence entre magistrats, concerne la démolition de constructions réalisées sans permis de construire, un droit conféré à l'APC en vertu de la loi, souligne Mme Fella qui fait remarquer que l'APC use rarement de ce droit et recourt au juge administratif pour l'obtention d'un ordre de démolition des constructions illicites. Aussi, plus de 1.400 affaires de contentieux de l'urbanisme ont été jugées par le Conseil d'Etat entre 1998 et 2007, dont 442 affaires jugées uniquement durant l'année 2007, selon M. Slaim Abdellah, président de chambre au Conseil. Interrogé sur le bilan d'activité du Conseil d'Etat en matière de contentieux de l'urbanisme au cours de la dernière décennie, M. Slaim a précisé que même si 1.446 affaires ont été jugées, "2.983 autres affaires restent pendantes". Il a souligné, dans ce contexte, que ces statistiques ne concernent pas la seule activité de la troisième chambre, mais englobent l'activité des autres chambres dans la mesure où toutes les chambres du Conseil d'Etat, à l'exception de la chambre des référés, traitaient les affaires, toutes catégories de contentieux confondues, après l'installation du Conseil en 1998. Cependant, une nouvelle loi sur ces contentieux est en cours de finalisation, selon le ministre de la Justice garde des Sceaux, Tayeb Belaiz, qui a déclaré que ce nouveau code des procédures civiles et administratives, adopté par le Parlement lors de la session d'automne, sur les contentieux dans le domaine de l'urbanisme, et très attendu par les juges, sera bientôt, présenté au gouvernement. M. Belaiz a indiqué que le règlement rapide des contentieux donnera un nouveau souffle au marché de l'immobilier, permettra la concrétisation des projets, assurera la protection du patrimoine et permettra la préservation des édifices. Les réformes menées dans le secteur, a-t-il poursuivi, ont permis de surmonter les obstacles qui empêchaient le bon fonctionnement des juridictions, citant notamment la réduction du délai de règlement des affaires, fixé aujourd'hui à 6 mois pour les affaires civiles et à 3 mois pour les affaires pénales. Le ministre s'est, en outre, longuement attardé sur les différentes législations élaborées, au nombre de 94 textes de loi, relatifs particulièrement au code civil, au code du commerce et au code de procédures civiles et administratives adopté, dernièrement, par le Parlement et qui ne sera mis en vigueur qu'après une année de sa publication dans le journal officiel. Par ailleurs, cette réunion, où sont conviés, notamment les magistrats, les professionnels de l'urbanisme et les représentants des collectivités locales, sera l'occasion de voir ce qui se fait dans le monde, en matière de loi régissant l'urbanisme. Des juges venant de France, de Belgique et du Portugal, vont parler de l'évolution de la législation en matière d'urbanisme, afin de la faire adapter aux contextes actuels. Les règles de procédure applicables à chaque type de contentieux (administratif, civil ou pénal), la mise à jour des textes et de la jurisprudence les plus récents, l'analyse de toutes les actions en justice liées au domaine de l'urbanisme... autant de thèmes qui seront passés en revue par des experts algériens et étrangers. L'expérience de ces pays sera exposée, et prise en compte par les pouvoirs publics. Sont présents, également, à ce séminaire, des représentants des ministères de l'Intérieur et des Collectivités locales, de l'Habitat et de l'Urbanisme, de l'Aménagement du territoire de l'environnement et du Tourisme, ainsi que les directeurs de l'urbanisme et des présidents d'Assemblée populaire communale (APC). Des universitaires représentant l'Ecole supérieure de magistrature, l'Ecole polytechnique d'architecture et d'urbanisme et des délégués d'associations de protection du patrimoine figurent parmi les participants à cette rencontre.