Le principal parti d'opposition en Turquie, le CHP, allait présenter mardi au Haut-Conseil électoral (YSK) une demande d'annulation du référendum sur le renforcement des pouvoirs du président Recep Tayyip Erdogan, remporté de peu par ce dernier dimanche. La demande devrait être déposée à 14H30 (11H30 GMT) a précisé le CHP (social-démocrate) dans un communiqué, tandis qu'un cadre du parti doit rencontrer le président du YSK deux heures plus tôt. Dès l'annonce des résultats, les deux principaux partis d'opposition, le CHP et le HDP (prokurde), avaient dénoncé des "manipulations" lors du scrutin. Par contre, l'Union européenne a appelée à diligenter une "enquête transparente". Contrairement à Donald Trump, qui a félicité M. Erdogan pour sa "victoire" lors d'un entretien téléphonique lundi soir, Bruxelles a appelé Ankara à une "enquête transparente sur les irrégularités présumées" commises lors de ce référendum constitutionnel qui élargit considérablement ses prérogatives. Le camp du oui l'a emporté de peu dimanche avec quelque 51,4% des voix, selon un décompte non-officiel des médias, mais deux partis d'opposition majeurs ont dénoncé des fraudes massives et des observateurs étrangers ont émis des réserves. Le principal parti d'opposition de Turquie, le CHP (social-démocrate), a annoncé qu'il déposerait un recours mardi auprès du Haut-Conseil électoral (YSK) pour demander officiellement l'annulation du scrutin. Peu après cette annonce, le Premier ministre turc, Binali Yildirim, a rejeté les critiques "vaines" et déclaré que "tout le monde, à commencer par le principal parti d'opposition, doit respecter (...) la parole de la nation". La révision constitutionnelle acceptée par référendum représente le plus important bouleversement du système de gouvernance en Turquie depuis la fondation de la République par Mustafa Kemal en 1923. Mais l'opposition au président Erdogan met en cause la légitimité de sa victoire à cause de la décision prise à la dernière minute par le YSK de considérer comme valides les bulletins non marqués du sceau officiel des autorités électorales. L'opposition y a vu une manœuvre rendant possible des fraudes.
Appel à la 'retenue Le YSK "a changé les règles en cours de jeu (...) Cela n'est pas quelque chose qui peut être pardonnée", a condamné le chef du CHP, Kemal Kiliçdaroglu, dans un entretien publié mardi par le quotidien Hürriyet. Une mission commune d'observateurs de l'OSCE et du Conseil de l'Europe a estimé lundi que le scrutin n'avait pas été "à la hauteur des critères" européens, et souligné que la campagne s'était déroulée dans des conditions inéquitables favorisant le camp du oui. "Nous appelons (...) les autorités à lancer une enquête transparente sur les irrégularités présumées qui ont été constatées par les observateurs" internationaux, a déclaré mardi le porte-parole de la Commission européenne, Margaritis Schinas, appelant à la "retenue". Les remarques des observateurs étrangers avaient provoqué la colère du président turc qui les a sommés de "rester à (leur) place". "Nous ne voyons et nous ne tenons pas compte de tout rapport que vous pourriez préparer", a lancé M. Erdogan. "La volonté de la nation s'est (exprimée) librement dans les urnes, cette affaire est terminée", a déclaré mardi M. Yildirim. M. Erdogan a en outre répété lundi qu'il promulguerait le rétablissement de la peine de mort si le Parlement votait en ce sens, se disant prêt à convoquer une autre consultation populaire sur la question. Une telle mesure sonnerait le glas du processus d'adhésion de la Turquie à l'UE, dans les limbes depuis plusieurs années. Avec sa victoire, M. Erdogan, qui a échappé à une tentative de putsch le 15 juillet, pourrait en théorie rester à la tête de l'Etat jusqu'en 2029. Il a occupé le poste de chef du gouvernement entre 2003 et 2014, avant d'être élu président. M. Yildiirm a indiqué mardi que M. Erdogan serait invité, après l'annonce des résultats définitifs fin avril, à réintégrer le parti au pouvoir (AKP), appliquant ainsi le premier point d'une réforme dont la plupart des volets entreront en vigueur en 2019. Cette réforme prévoit notamment le transfert du pouvoir exécutif au président, qui pourra gouverner par décrets, et la suppression de la fonction de Premier ministre. Le quotidien Hürriyet a rapporté mardi qu'un remaniement ministériel d'envergure était en préparation, et que des élections anticipées, dès le printemps 2018, n'étaient pas exclues.