LafargeHolcim a annoncé lundi la démission de son directeur général Eric Olsen sur fond de tensions liées à une ancienne cimenterie du groupe en Syrie soupçonnée d'avoir financé des groupes armés pour rester en activité. Le dirigeant, symbole de l'armistice entre Lafarge et Holcim lors de la fusion entre le cimentier français et son concurrent suisse en avril 2015, quittera ses fonctions le 15 juillet. Il s'est défendu d'avoir été "en aucune manière impliqué, ni même informé d'actes répréhensibles". "Ma décision est guidée par la conviction qu'elle contribuera à apaiser les fortes tensions qui sont récemment apparues autour de la question de la Syrie", a indiqué Eric Olsen dans un communiqué. L'action du cimentier franco-suisse signait lundi la seule baisse du CAC 40. Vers 10h50, elle perdait 1,68% à 53,33 euros à Paris, tandis que l'indice phare de la place bondissait de 4,29% au lendemain du premier tour de l'élection présidentielle française. A Zurich, où LafargeHolcim est désormais basé, l'action cédait 0,6%. "Olsen commençait à construire sa réputation, et faute d'un successeur évident, nous jugeons cette nouvelle négative pour le groupe", écrivait la Deutsche Bank dans une note publiée juste avant la confirmation du remaniement. La révélation par le journal Le Monde, en juin 2016, que Lafarge avait versé de l'argent en 2013 et 2014 à l'Etat islamique pour continuer à opérer un site pendant la guerre en Syrie, a conduit le groupe à ouvrir une enquête interne. Le parquet de Paris a lui aussi lancé une enquête préliminaire sur la base d'une plainte de Bercy en janvier dernier. LafargeHolcim a indiqué lundi qu'Eric Olsen "n'était ni responsable ni pouvant être considéré comme informé des actes répréhensibles identifiés dans le cadre de cette enquête". Mais selon le Figaro et le Financial Times, qui ont rapporté ce week-end qu'Eric Olsen était proche du départ, l'affaire syrienne a ravivé les tensions au sein du conseil d'administration, et notamment entre le principal actionnaire, le suisse Thomas Schmidheiny, héritier du fondateur d'Holcim, et les représentants de l'ex-Lafarge. La fusion entre les deux groupes, en avril 2015, avait déjà manqué d'échouer à la dernière minute en raison d'un différend sur les termes financiers et la gouvernance entre Français et Suisses. Bruno Lafont, alors PDG de Lafarge, avait alors renoncé à la direction générale du groupe né de la fusion et proposé Eric Olsen, un franco-américain, pour le poste. Bruno Lafont s'était aussi contenté d'un poste de co-président non exécutif au nom de l'équilibre entre les deux cimentiers, mais il a décidé depuis qu'il ne se représenterait pas pour siéger au conseil d'administration lors de la prochaine assemblée générale, le 3 mai. LafargeHolcim a précisé que la recherche d'un successeur à Eric Olsen serait lancée immédiatement et que Beat Hess, président du conseil d'administration, superviserait la période de transition jusqu'à la nomination d'un nouveau directeur général. A partir du 15 juillet et après le départ d'Eric Olsen, Beat Hess deviendra directeur général par intérim et Roland Köhler, actuellement membre du comité exécutif de LafargeHolcim chargé de l'Europe, de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande ainsi que de l'activité de Trading, sera nommé "Chief Operating Officer".
Des mesures correctives Le groupe a fait savoir dans un autre communiqué que son conseil avait clos l'enquête interne ouverte sur la Syrie, consécutive à des informations selon lesquelles le personnel de la société aurait été impliqué, au cours de 2013 et jusqu'à la fermeture de l'usine mise en cause en septembre 2014, dans des transactions avec des groupes armés et des tiers visés par des sanctions. Il a confirmé "que certaines mesures prises en vue de permettre à l'usine syrienne de poursuivre un fonctionnement sûr étaient inacceptables et que des erreurs de jugement significatives, contrevenant au code de conduite alors en vigueur, avaient été commises". "Les résultats de l'enquête confirment également que, bien que ces mesures aient été prises à l'initiative la direction locale et régionale, certains membres de la direction du groupe ont eu connaissance de situations indiquant des violations du code de conduite des affaires de Lafarge", a ajouté le groupe. LafargeHolcim a toutefois souligné qu'Eric Olsen "n'était ni responsable ni pouvant être considéré comme informé des actes répréhensibles identifiés dans le cadre de cette enquête". Le groupe a également confirmé des mesures correctives annoncées début mars, notamment "l'adoption d'une procédure plus rigoureuse d'évaluation des tiers à haut risque, l'instauration d'un programme de dépistage des tiers à risques et d'un nouveau programme de contrôle autour des sanctions et des exportations".