Le négociateur en chef européen pour le Brexit, Michel Barnier, a demandé jeudi à Londres de "clarifier" ses positions sur la facture du divorce et les droits des citoyens, à l'issue de quatre jours de négociations à Bruxelles. "Le premier round était celui de l'organisation, cette semaine a été le temps de la présentation. Le troisième round doit être celui de la clarification", a résumé M. Barnier lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue britannique David Davis. Et de prévenir: "Nous progressons mieux lorsque nos positions respectives sont claires". En réponse, M. Davis a évoqué des discussions "robustes mais constructives". "Il faut encore discuter de beaucoup de choses", a-t-il avancé. "Au final, parvenir à une solution exigera de la flexibilité des deux parties". Les deux négociateurs ont ensuite déjeuné à l'ambassade du Royaume-Uni auprès de l'UE, en territoire britannique donc, un geste symbolique. Pour cette première immersion au cœur des sujets les plus sensibles, les discussions ont mis en lumière, comme les négociateurs s'y attendaient, le fossé qui sépare les deux parties. L'UE attend toujours la publication de la position britannique sur le réglement financier, ce "solde des comptes" exigés par Bruxelles en lien avec les engagements pris par le Royaume-Uni en tant que pays membre de l'Union. La facture est estimée à environ 100 milliards d'euros côté européen, une somme jugée "exorbitante" outre-Manche. L'annonce importante s'est en fait produite la semaine passée, quand le Royaume-Uni "a reconnu qu'il y a des obligations qui vont durer au delà de (s)a sortie de l'UE", a observé un haut responsable européen. Devant les journalistes, Michel Barnier a martelé une fois de plus qu'"une sortie ordonnée exige de solder les comptes".
'Divergence fondamentale' David Davis l'a de son côté réitéré, assurant que les deux camps "reconnaissent l'importance de régler les obligations que nous avons l'un envers l'autre". Par ailleurs, le Français a souligné l'existence d'"une divergence fondamentale" sur la question cruciale du sort des ressortissants européens installés au Royaume-Uni, "sur la manière de garantir (leurs) droits", en particulier envers les membres de la famille et sur les bénéfices sociaux. "Nous ne voyons aucun autre moyen pour garantir la pérennité de ces droits" que la possibilité de régler les litiges devant la Cour de justice de l'UE (CJUE), a expliqué Michel Barnier. Or Londres a clairement exprimé sa volonté de ne plus reconnaître la souveraineté de la plus haute juridiction européenne une fois son départ effectif de l'Union. M. Barnier a ensuite cité l'exemple de la Norvège, membre de l'Espace économique européen, avec qui les litiges sont réglés par une cour spécifique mais dont la jurisprudence est adossé à la CJUE. Pas moins de 98 fonctionnaires britanniques avaient débarqué lundi dans la capitale belge pour participer aux discussions, réparties au sein de groupes de travail. Selon des sources proches des négociations, Londres ne devrait donner son accord sur un chiffre pour la facture qu'à la toute fin des discussions, tandis que le désaccord sur la CJUE devrait se retrouver tout au long des pourparlers. Sur la question de la frontière entre l'Irlande et la province britannique d'Irlande du nord, troisième priorité pour la première phase de négociation, là encore l'UE a dit attendre des "clarifications" sur les intentions de Londres. Pour Michel Barnier l'enjeu est de "protéger la coopération" entre le nord et le sud de l'île. Une fois que des avancées auront été enregistrées dans ces domaines et quelques autres, notamment Euratom, alors seulement Londres et Bruxelles pourront aborder la forme que prendra leur future relation L'UE voudrait boucler les discussions à l'automne 2018 pour avoir le temps de ratifier l'accord agréé avant la date fatidique de mars 2019.