L'Opep a encore légèrement revu à la hausse lundi sa prévision de la production mondiale de pétrole des pays extérieurs au cartel pour cette année, notamment les Etats-Unis, mais jugé que des incertitudes pèsent sur le niveau de l'offre. Dans son rapport mensuel, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole a relevé de 0,01 million de barils par jour (mbj) son estimation de la production non-Opep en 2018: elle devrait atteindre 59,62 mbj, soit une croissance de 1,72 mbj sur un an. La croissance a en effet été revue à la hausse en Colombie, aux Etats-Unis et en Russie notamment. Les Etats-Unis (+1,53 mbj) seront de loin les principaux contributeurs à cette croissance annuelle, devant le Canada (+0,28 mbj), grâce au pétrole de schiste. L'Opep souligne ainsi que la production non-Opep s'est reprise en 2017 et 2018 après une contraction en 2016. "Cela a eu lieu à la suite d'une amélioration des conditions sur le marché pétrolier et de hausse des cours mais il est évident que des incertitudes demeurent concernant le rythme de croissance de l'offre non-Opep pour le restant de l'année", note le rapport. Le cartel cite ainsi des incertitudes multiples comme la hausse de l'inflation, les restrictions commerciales ou les contraintes logistiques affectant les producteurs de pétrole de schiste aux Etats-Unis. Il note aussi une "hausse des incertitudes" économiques à la suite de plusieurs décisions des Etats-Unis: nouvelles sanctions contre la Russie, droits de douane sur l'aluminium chinois, retrait de l'accord sur le nucléaire iranien. Concernant sa propre production de brut, l'Opep estime qu'elle a modestement progressé de 12.000 barils par jour sur un mois à 31,93 mbj en avril, selon des sources secondaires. L'Arabie saoudite, l'Algérie et l'Iran ont en effet pompé plus le mois dernier, tandis que la production reculait dans d'autres pays, notamment le Venezuela, affecté par de graves troubles politiques. Les producteurs membres de l'Opep et ceux non membres du cartel dont la Russie avaient signé en 2016 un accord pour limiter leur production afin de soutenir les prix. L'accord court jusqu'à fin 2018 et les partenaires doivent bientôt décider s'ils le prolongent. "En dépit des importantes incertitudes concernant des fondamentaux clefs du marché, l'Opep se tient comme toujours prête à soutenir la stabilité du marché pétrolier, aux côté des producteurs non-Opep" signataires de l'accord, indique le cartel. Côté demande, l'Opep a également revu à la hausse de 25.000 barils par jour son estimation de la croissance pour cette année: la demande devrait atteindre 98,85 mbj, soit une hausse annuelle de 1,65 mbj. Cette révision fait notamment suite à des performances économiques solides dans les pays développés de l'OCDE au premier trimestre.
Le pétrole en hausse Les cours du pétrole sont repartis en hausse lundi après la publication du rapport mensuel de l'Opep, dans un marché toujours focalisé sur les suites de l'annonce par les Etats-Unis de sa sortie de l'accord nucléaire iranien. Le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet a terminé à 78,23 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE) de Londres, en hausse de 1,11 dollar par rapport à la clôture de vendredi et à nouveau à un plus haut depuis la fin 2014. Sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de "light sweet crude" (WTI) pour le contrat de juin a pris 26 cents à 70,96 dollars. Selon le rapport de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), le cartel a une nouvelle fois pompé moins de brut que ne lui permet l'accord de limitation de la production conclu fin 2016 avec dix autres producteurs. Affectée par de graves troubles politiques, la production vénézuélienne a reculé, tandis qu'elle a augmenté en Arabie saoudite, en Algérie, et en Iran. "Grâce à la production vénézuélienne nous observons un niveau plutôt élevé de conformité à cet accord", a indiqué Bill O'Grady de Confluence Investment. "On aurait pu penser qu'avec la forte hausse des cours, les tentations de tricher seraient grandes. Mais finalement ce n'est pas tellement le cas", a-t-il par ailleurs ajouté. Côté demande, l'Opep a revu à la hausse de 25.000 barils par jour son estimation de la croissance pour cette année: la demande devrait atteindre 98,85 mbj, soit une hausse annuelle de 1,65 mbj. Le rapport vient également nuancer les affirmations d'une potentielle hausse de la production de l'Opep pour combler le manque créé par une éventuelle baisse des exportations iraniennes. "La réaction aux développements sur l'accord sur le nucléaire iranien a profité aux prix, mais les marchés n'y voient pas clair", ont commenté les analystes de JBC Energy. Les Etats-Unis ont abandonné l'accord sur le nucléaire iranien et comptent imposer des sanctions strictes sur l'économie du troisième plus grand producteur de l'Opep. Mais alors que la Chine, la Russie, et l'Union européenne ont dit vouloir continuer cet accord, les analystes peinent à estimer dans quelle mesure les exportations iraniennes souffriront. Le ministre de l'Energie des Emirats arabes unis Souhail al-Mazrouei, dont le pays assure la présidence tournante de l'Opep, estime que les Emirats, l'Arabie saoudite et le Koweït peuvent à eux trois compenser les sanctions américaines contre l'Iran, a-t-il affirmé dimanche, rapporte l'agence Bloomberg. "Si l'Opep veut garantir la stabilité des prix, elle devrait commencer à indiquer sa volonté de mettre un terme à l'accord avant qu'il n'arrive à son terme fin 2018, et ce à sa prochaine réunion officielle au plus tard", ont estimé les analystes de Commerzbank. L'Opep et ses dix partenaires, dont la Russie, se réuniront fin juin à Vienne.
Baisse en Asie Les cours du pétrole étaient orientés à la baisse, lundi en Asie, en raison d'une hausse des puits en activité aux Etats-Unis, mais le repli était limité du fait des tensions géopolitiques liées au nucléaire iranien. Vers 04H30 GMT, le baril de light sweet crude (WTI), référence américaine du brut, pour livraison en juin, baissait de 29 cents à 70,41 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le baril de Brent, référence européenne, pour livraison en juillet, cédait 47 cents, à 76,65 dollars. La société Baker Hughes a encore signalé vendredi dans son rapport hebdomadaire une hausse du nombre de puits de forage en activité aux Etats-Unis, qui a augmenté de 10 unités à 844 lors de la semaine achevée le 11 mai. Ce chiffre, qui est un indicateur très suivi du niveau futur de la production américaine, est à son plus haut depuis trois ans. Les cours ont ces dernières semaines atteint des niveaux qu'ils n'avaient plus connus depuis trois ans et demi en raison du retrait des Etats-Unis de l'accord sur le nucléaire iranien, et des menaces en ce sens que le président américain Donald Trump avait auparavant proférées. "Les marchés pétroliers ont fait une pause après une semaine au cours de laquelle le Brent a pris près de 3%", a déclaré Oriano Lizza, experte chez CMC Markets Singapore. "Environ un million de barils de pétrole par jour disparaîtront des marchés pétroliers mondiaux en cas de sanctions américaines contre l'Iran", a observé Greg McKenna, analyste à AxiTrader. "Mais on n'est pas encore sûr qu'elles auront l'effet escompté. Les Chinois sont prêts à combler le vide créé par l'interdiction faite par les Etats-Unis à leurs alliés de commercer avec l'Iran." En annonçant mardi sa décision de retirer les Etats-Unis de l'accord nucléaire, M. Trump a fait savoir que Washington avait réintroduit une série de sanctions visant des entreprises aussi bien américaines qu'étrangères commerçant avec l'Iran. Pour les experts des questions pétrolières, les prix demeurent soutenus par ces tensions géopolitiques et notamment par l'escalade entre l'Iran et Israël.