L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) devait opter pour le statu quo lors de sa réunion semestrielle, hier, mais les cours du pétrole restent sous la pression de la surabondance d'offre alors que plusieurs pays du cartel souhaitent les voir grimper. Les ministres des douze pays de l'Opep se réunissent dans la matinée au siège du cartel à Vienne pour décider de leur objectif de production pour les six mois à venir. Le surplus d'or noir qui noie les marchés continue de mettre la pression sur les cours du pétrole. En début d'échanges européens, vers 07H30 GMT, le brent perdait 34 cents à 61,69 dollars le baril, tandis que le WTI s'échangeait à 57,54 dollars le baril, en baisse de 46 cents. Lors de sa dernière réunion le cartel avait conservé son plafond de production inchangé, à 30 millions de barils par jour (mbj), dans l'objectif de contenir la production des pays hors-Opep et de stimuler la demande. Le plafond du cartel est figé à ce niveau depuis plus de trois ans. Près de six mois après l'une des réunions les plus commentées de l'Opep - la décision avait porté un sévère coup aux cours du pétrole déjà fragilisés - l'organisation semble partie pour poursuivre cette stratégie. En effet, le ralentissement de la production de pétrole non-conventionnel, comme le pétrole de schiste aux Etats-Unis et le pétrole de sable bitumineux au Canada, a été vu comme une victoire pour l'organisation. L'Arabie saoudite, chef de file de l'Opep, a affirmé lundi que la stratégie du cartel de ne pas réduire sa production a porté ses fruits, car l'offre mondiale d'or noir commence à ralentir et la demande s'améliore. Les ministres irakien et koweïtien ont eux aussi constaté que le marché pétrolier s'améliorait. Pourtant le marché demeure sur-approvisionné: la Russie, le premier producteur mondial de brut, vise à maintenir sa production, l'Opep dépasse aujourd'hui son plafond, avec une production à 31,21 mbj en avril et les réserves de brut aux Etats-Unis atteignent des niveaux record. De plus, si les sanctions internationales contre l'Iran sont levées en juin, le pays pourrait produire un million de barils de pétrole par jour supplémentaires dans les six mois qui suivent, selon le ministre iranien du Pétrole.
Un prix équitable A la veille de la décision de l'Opep, les marchés continuent de s'inquiéter de la surabondance d'or noir. Si un baril autour des 60 dollars représente une amélioration notable pour les producteurs de pétrole, tous les membres de l'Opep ne sont pas prêts à se satisfaire de ce prix. Et plusieurs d'entre eux ont demandé un prix du pétrole raisonnable, entre 75 et 80 dollars le baril. Si le prix n'augmente pas à 77 dollars le baril, alors le budget du Koweït sera en déficit, a indiqué le ministre koweïtien Ali Saleh Al-Omair. Le ministre angolais du Pétrole, José Maria Vasconcelos de Botelho, a mentionné qu'il serait satisfait avec un baril à 80 dollars. Le pays dont le pétrole représente 98% des revenus a en effet beaucoup souffert de la chute des cours. Les ministres irakien et vénézuélien du Pétrole ont également fait part de leur idée d'un prix équitable, qu'ils ont estimé entre 75 et 80 dollars. L'Opep a besoin d'un prix équitable, un prix qui ne serait pas nocif pour la croissance économique et qui permettrait aux investissements de continuer, a pour sa part noté Bijan Namdar Zangeneh, le ministre iranien du Pétrole. Les grandes manœuvres de l'Opep ne paraissent pas encore être en mesure de rétablir l'équilibre du marché. Seule une baisse significative des prix en direction des 40 dollars au moins le permettrait, a conclu Christopher Dembik, analyste chez Saxo Banque.
Poches d'optimisme Le baril de Brent, la référence internationale du brut, s'échange présentement juste en dessous des 64 dollars le baril, soit près de 45% de moins qu'à son pic de la mi-juin 2014, lorsque les cours avaient atteint 115 dollars. Mais un baril à 64 dollars représente une amélioration notable pour les producteurs d'or noir. En janvier les baril de Brent avait en effet atteint son plus bas niveau en près de 6 ans. Le marché s'améliore, ont noté les ministres irakien et koweïtien. Ali al-Naïmi, le ministre saoudien du Pétrole voit le marché se stabiliser, la demande augmenter et l'offre ralentir. Il y a six mois l'Opep avait décidé de conserver son plafond de production à 30 millions de barils par jour (mbj) pour modérer la croissance de la production hors-Opep, et l'offre d'or noir non-conventionnel, comme le pétrole de schiste ou le pétrole issu des sables bitumineux. La fermeture massive du nombre de forages de pétrole de schiste aux Etats-Unis a été considérée par le bloc de la péninsule arabique comme la preuve du succès de sa stratégie, a expliqué Christopher Dembik, analyste chez Saxo Banque. Ainsi, l'Opep ne devrait pas changer d'un iota sa tactique. Les options dont dispose le cartel sont soit le maintien soit l'augmentation du plafond de production, a affirmé M. Omair, dans des déclarations à l'agence officielle Kuna. Mais la surabondance d'offre va continuer de peser sur les cours, alors que la Russie, le premier producteur mondial de pétrole, vise à maintenir sa production, que l'Opep dépasse aujourd'hui son plafond, avec une production de 31,21 barils par jour en avril, et que les réserves de brut aux Etats-Unis atteignent des niveaux records.
Demande encourageante Ainsi tout renchérissement des cours du pétrole devra passer par une augmentation notable de la demande. L'Opep table sur une augmentation de la demande de pétrole de 60%, d'ici à 2040. A plus court terme, nous voyons la demande mondiale augmenter et en meilleure santé, il semble que nous revenons à une croissance de la demande autour de 1 mbj, a noté Ryan Lance, P-DG de la compagnie pétrolière américaine ConocoPhillips. L'Agence internationale de l'Energie, projette une augmentation de la croissance de la demande de 1,1 mbj en 2015, à 93,6 mbj, contre une croissance de 700 000 barils par jour en 2014. La demande de brut est en effet stimulée par l'affaiblissement des cours, mais pour les pays consommateurs, un prix équitable du baril du pétrole est un prix bas. Le ministre du Pétrole de l'Inde, le quatrième plus gros consommateur de pétrole au monde, l'a estimé à 65 dollars le baril.
L'Iran table sur un million de barils supplémentaires Si les sanctions internationales contre l'Iran sont levées, le pays pourrait produire un million de barils de pétrole par jour supplémentaires dans les six mois qui suivent, selon le ministre du Pétrole iranien, une perspective qui pourrait de nouveau lester les cours. Nous pensons que (dans le cadre d'une levée des sanctions) nous pourrons produire un demi-million de barils par jour (mbj) supplémentaires dans le mois qui suit, puis un million de barils par jour dans les six à sept mois, a détaillé Bijan Namdar Zangeneh, ministre du Pétrole iranien lors du séminaire de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). L'Iran et le groupe 5+1 (Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie et Allemagne) tentent depuis plus de 20 mois de conclure un accord qui garantirait le caractère uniquement pacifique du programme nucléaire du pays et lèverait en contrepartie les sanctions internationales. Et pour le ministre, il serait normal que l'offre du pays revienne à ses niveaux d'avant les sanctions qui ont forcé l'Iran à diminuer sa production et ses exportations. L'Iran a produit 2,88 mbj en avril, selon l'Agence internationale de l'Energie (AIE). Par ailleurs, depuis la mise en place des sanctions, les exportations pétrolières du pays ont chuté de près de moitié, à environ 1,3 mbj. Une levée totale pourrait intervenir en décembre si un accord global sur le dossier nucléaire était conclu fin juin avec les grandes puissances, a estimé l'Iran à la fin du mois dernier. Le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, a mentionné en avril que cela pourrait prendre entre six mois et un an après l'obtention de l'accord. Une perspective qui pourrait toutefois peser sur les cours, déjà lestés par un surplus mondial d'or noir, même si Bijan Namdar Zangeneh estime que le retour de l'offre iranienne ne devrait pas affecter les marchés et que l'Opep la prendra (alors) en considération.
L'Equateur demande un prix raisonnable Le ministre des Hydrocarbures de l'Equateur, Pedro Merizalde a demandé ce jeudi des prix raisonnables pour le pétrole, à la veille de la réunion de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) sur son niveau de production. Le ministre a déclaré à la presse qu'il souhaitait des prix plus stables pour que les états producteurs de pétrole et les compagnies pétrolières puissent plus facilement planifier. Ce que nous devons penser tous au niveau mondial, c'est que les prix devraient être raisonnables (...) pour que nous puissions planifier sur le long terme dans nos pays en ce qui concerne l'éducation, la santé, les routes et tout ce dont on a besoin, a expliqué le ministre après son intervention au séminaire de l'Opep. Nous devons avoir un niveau raisonnable (de prix), sans la volatilité qui cause beaucoup de problèmes, tant pour les producteurs que pour les consommateurs, a-t-il ajouté. Le ministre des Hydrocarbures a affirmé que tous (les pays de l'Opep), et pas seulement l'Equateur considèrent que le niveau actuel des prix n'est pas acceptable. Il a ajouté que lorsqu'un produit est vendu, il est normal de vouloir le prix le plus élevé. L'Equateur, le plus petit membre de l'Opep, produit environ 550 000 barils de pétrole par jour.