La Chine a indiqué jeudi "ne pas pouvoir accepter" d'être encore accusée de pratiques commerciales déloyales par les États-Unis, dans une nouvelle passe d'armes entre les deux puissances et à quelques jours d'une rencontre attendue des deux présidents. Mardi, dans la mise à jour d'un rapport publié en mars, le représentant américain au Commerce Robert Lighthizer a estimé que la Chine n'avait pas remédié aux pratiques "injustes, déraisonnables et entraînant des distorsions de marché", critiquées de longue date par son pays et plusieurs autres. Au contraire, selon le rapport qui fait état d'activités de piratage visant des secteurs de pointe, la Chine a "visiblement pris de nouvelles mesures déraisonnables lors des derniers mois". Le ministère chinois du Commerce en a dénoncé les conclusions jeudi lors d'un point presse régulier. "Les États-Unis ont procédé à une soi-disant mise à jour du rapport, proférant de nouvelles accusations injustifiées contre la Chine, totalement sans fondement et faisant fi des faits. La Chine ne peut accepter cela", a dit un porte-parole, Gao Feng. "Nous espérons que les États-Unis vont cesser ces propos et actions qui nuisent aux liens commerciaux et à l'économie bilatérale et vont adopter une attitude constructive pour permettre aux relations de revenir sur la bonne voie", a ajouté M. Gao. Pékin et Washington se livrent une guerre commerciale depuis ces derniers mois. Les Etats-Unis imposent depuis juillet des droits de douane punitifs visant des marchandises chinoises d'une valeur de 250 milliards de dollars par an. Une mesure qui a entraîné des représailles de la Chine sur 110 milliards de dollars de biens américains. Washington a menacé de durcir encore les sanctions si aucune issue n'est trouvée avant janvier. Le président américain Donald Trump et son homologue Xi Jinping doivent se rencontrer en marge du sommet du G20 en Argentine en fin de semaine prochaine afin de tenter d'apaiser les tensions bilatérales.
L'UE appelle la Chine à s'engager dans la réforme de l'OMC La commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a appelé la Chine à s'engager aux côtés de l'Europe dans la réforme de l'OMC, face au risque que les Etats-Unis n'imposent leur propre système commercial en parallèle. "La Chine a beaucoup tiré profit de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et nous l'appelons à s'engager à nos côtés pour réformer et moderniser le système, afin de créer les conditions d'une concurrence saine", a affirmé la commissaire lors d'une intervention à Paris, à l'occasion d'une conférence sur la réforme de l'OMC. "Sinon, ce seront les Etats-Unis qui créeront leurs propres règles en dehors du système", a ajouté Mme Malmström, qui s'est lancée dans un véritable plaidoyer pour adapter les règles du commerce international, aux côtés du ministre français des Finances, Bruno Le Maire, et du directeur général de l'OMC, Roberto Azevedo. "Les règles ont besoin d'être actualisées. Lorsque nous les avons conçues en 1995, nous avions à l'esprit un autre système économique", a-t-elle reconnu. "Aujourd'hui, il n'est plus d'actualité." Sans nommer directement la Chine, la commissaire a insisté sur la nécessité de changer des pratiques dont est souvent accusé Pékin, notamment par les Etats-Unis et l'UE. "Nous avons besoin de traiter les distorsions (...) provoquées par certaines pratiques comme les subventions à l'industrie, le rôle de l'Etat dans les entreprises publiques et le transfert forcé de technologie", a-t-elle affirmé. Pour sa part, M. Le Maire a rappelé que le président Emmanuel Macron avait lui-même appelé à une réforme de l'OMC, à l'occasion d'un discours à l'OCDE fin mai. Dans son intervention, le ministre a plaidé pour une réforme "rapide, concrète et ambitieuse" de l'OMC, alertant sur le risque que le monde ne s'installe dans une "guerre froide commerciale" entre la Chine et les Etats-Unis. "Nous sommes aujourd'hui dans une situation de guerre froide commerciale entre les Etats-Unis et la Chine qui est dangereuse pour notre économie, pour la croissance et pour nos emplois. Il faut en sortir", a affirmé M. Le Maire, qui a fustigé les sanctions commerciales prises récemment par l'administration Trump. "Il y a une mauvaise réponse, c'est avoir une riposte de plus en plus dure qui va nous faire passer de la guerre froide commerciale à une véritable guerre commerciale ouverte", a-t-il prévenu. Entre les deux, "il n'y a désormais plus qu'un pas. Je souhaite que nous évitions que ce pas soit franchi", a-t-il affirmé. "Cette guerre commerciale ouverte serait un suicide économique pour le monde entier", a alerté M. Le Maire. "Cette guerre économique ne fera que des perdants. Elle est injustifiée, injustifiable et elle est tout simplement stupide". Selon le ministre, la bonne réponse "c'est le nouveau multilatéralisme" proposé par M. Macron qui doit se traduire par "une transformation de l'OMC". Le président français avait plaidé à l'OCDE pour un "diagnostic" des "dysfonctionnements du système actuel" et pour une feuille de route qui pourrait être établie lors du sommet du G20 organisé à la fin du mois à Buenos Aires. La Chine avait alors répondu positivement à cet appel et s'était dite "prête à travailler" avec tous les membres de l'OMC pour en rendre les règles "plus ouvertes, plus inclusives, plus transparentes, et non-discriminatoires".