Le gouvernement français a enclenché la préparation de l'après-Carlos Ghosn à la tête de Renault en demandant une réunion du conseil d'administration pour examiner les candidats à la succession du P-DG englué depuis bientôt deux mois dans un scandale, ont dit mardi à Reuters plusieurs sources proches du dossier. Le constructeur automobile doit convoquer une réunion de son comité des nominations, qui sera suivie par une session du conseil dans son entier dimanche 20 janvier, ont indiqué trois personnes au fait du processus. Des porte-paroles de Renault et du ministère de l'Economie ont dit ne pas avoir connaissance d'un projet de réunion du conseil d'administration le week-end qui vient. L'Etat français, principal actionnaire de Renault, a jusqu'ici soutenu la décision du groupe de maintenir Carlos Ghosn dans ses fonctions, optant à la place pour une direction intérimaire après l'arrestation du P-DG en novembre au Japon sur des accusations de malversations financières chez Nissan. Alors qu'il a été démis de ses fonctions de président chez Nissan et Mitsubishi, partenaires de l'alliance franco-japonaise, il est toujours officiellement PDG de Renault, la direction étant assurée par un tandem composé de l'administrateur référent Philippe Lagayette et de Thierry Bolloré, directeur général adjoint promu aux mêmes fonctions exécutives que Carlos Ghosn. Ce changement d'attitude du gouvernement fait suite au rejet mardi par la justice japonaise de la demande de libération sous caution de celui qui était encore, avant le coup de théâtre de son arrestation, l'homme fort de la première alliance automobile mondiale, et à une nouvelle inculpation vendredi dernier pour deux chefs d'accusation supplémentaires au Japon. Une source gouvernementale avait indiqué la veille que l'Etat français changerait d'avis sur le maintien de Carlos Ghosn à la tête du constructeur si celui-ci "est durablement empêché".
Un ou plusieurs successeurs Selon deux des sources, Jean-Dominique Senard, qui quittera prochainement la présidence du fabricant de pneumatiques Michelin, remplacera probablement Carlos Ghosn comme président de Renault. D'après une source impliquée dans les discussions, l'Etat français et ses conseillers ont pressenti plusieurs personnes pour le poste de directeur général: Thierry Bolloré, mais aussi Didier Leroy, haut dirigeant de Toyota, le DG d'Elior Philippe Guillemot et un autre manager. Un porte-parole d'Elior a toutefois déclaré mardi soir que "Philippe Guillemot dément être candidat à la succession de Carlos Ghosn". Une autre source a indiqué que Jean-Dominique Senard pourrait aussi reprendre l'ensemble des fonctions de P-DG de Carlos Ghosn. Didier Leroy a refusé de faire un commentaire. Reuters n'est pas parvenu à joindre Michelin et son président pour commenter ces informations. Aucun commentaire n'a pu être obtenu dans l'immédiat auprès d'Elior ou des chasseurs de têtes Korn Ferry et Emeric Lepoutre & Partners, impliqués dans les efforts pour trouver de nouveaux dirigeants. "Jean-Dominique Senard a une très grande réputation de probité, il a déjà préparé sa succession chez Michelin, il connaît l'automobile", a déclaré un bon connaisseur du secteur automobile. "C'est bien aussi qu'il soit extérieur à Renault, il y a tellement de conflits à l'heure actuelle au sein de l'alliance. J'espère seulement qu'il prendra le temps de voir les Japonais pour restaurer le dialogue." C'est pour renouer ces fils, rapporte le Figaro, qu'une mission composée de plusieurs représentants de l'Etat français, dont Martin Vial, commissaire aux participations, et Emmanuel Moulin, directeur de cabinet du ministre de l'Économie Bruno Le Maire, ont pris la direction de Tokyo pour une série d'échanges avec les protagonistes du dossier Renault-Nissan. Alors que l'alliance fondée en 1999 s'est constituée autour d'un lent et délicat rapprochement entre ingénieries françaises et japonaises, l'affaire Carlos Ghosn a ébranlé un équilibre toujours fragile. Les Echos précisent de leur côté que la seule inconnue qui restait à lever mardi soir était le résultat de l'appel interjeté par les avocats de Carlos Ghosn à la décision du tribunal japonais.
Carlos Ghosn reste en prison Carlos Ghosn est toujours Pdg de Renault et de l'alliance automobile Renault-Nissan. Une source gouvernementale a dit lundi que l'Etat français, principal actionnaire de Renault, changerait d'avis sur le maintien de Carlos Ghosn à la tête du groupe automobile s'il "est durablement empêché". La demande de libération sous caution de Carlos Ghosn a été rejetée mardi par le tribunal de district de Tokyo, après son inculpation vendredi dernier pour deux chefs d'accusation supplémentaires au Japon. L'échec de cette nouvelle tentative des avocats du Pdg de Renault est due à la méfiance du tribunal japonais qui estime qu'il y a un risque de destruction de preuves. Son principal avocat, Motonari Otsuru, a annoncé dans un communiqué qu'il allait faire appel de ce refus de remise en liberté, mais si la décision de le maintenir en prison est confirmée par un deuxième juge, Carlos Ghosn restera en détention provisoire au moins jusqu'au 10 mars. Cette mesure pourra être étendue sur demande du procureur par période reconductible d'un mois. L'ancien président de Nissan est détenu depuis le 19 novembre à Tokyo. Il a été inculpé 1) pour abus de confiance aggravé - accusation jugée la plus grave-, 2) pour avoir provisoirement fait passer en 2008 dans les comptes du constructeur japonais des pertes sur des investissements personnels 3) et pour minoration de revenus sur la période 2015-2018. Carlos Ghosn a nié ces accusations. Mais, au Japon, il est rare qu'un inculpé qui nie les accusations portées contre lui soit libéré sous caution avant son procès. Carlos Ghosn est toujours Pdg de Renault et de l'alliance automobile Renault-Nissan. Une source gouvernementale a dit lundi que l'Etat français, principal actionnaire de Renault, changerait d'avis sur le maintien de Carlos Ghosn à la tête du groupe automobile s'il "est durablement empêché".
Le DG de Nissan souhaite que Renault ait "accès au dossier, aux faits" Le directeur général de Nissan Hiroto Saikawa, dans une interview au quotidien Les Echos diffusée lundi soir, a "souhaité que les administrateurs de Renault aient eux aussi accès au dossier complet, aux faits", ajoutant : "Je pense que, lorsque ce sera le cas, ils tireront la même conclusion que nous." Renault a déclaré la semaine dernière que son enquête interne n'avait pas mis au jour de fraude sur les exercices 2017 et 2018, et que les investigations se poursuivraient sur les exercices antérieurs. Encore de nouvelles accusations, notamment sur les 7 millions d'euros Selon Les Echos, le parquet japonais envisage de nouvelles accusations, liées à une rémunération à hauteur de sept millions d'euros par une structure conjointe cette fois à Nissan et Mitsubishi aux Pays-Bas. L'épouse de Carlos Ghosn a lancé un appel à l'ONG Human Rights Watch (HRW) pour qu'elle se penche sur le cas de son mari en raison du "traitement sévère" qui serait le sien au Japon.