Les financements bancaires, qui ont progressé de près de 14% en 2018 par rapport à 2017, devraient s'orienter davantage vers les industries manufacturières et les services productifs portés par les PME, a indiqué mardi à Alger le Gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Loukal. "Dans l'avenir, les financements bancaires devraient s'orienter davantage vers les industries manufacturières et les services productifs portés par les PME, à valeur ajoutée avérée", a avancé M. Loukal lors d'une journée technique sur la modernisation des banques, organisée par l'Association des banques et établissements financiers (Abef) en présence du ministre des Finances, Abderrahmane Raouya, et des responsables de la place bancaire. M. Loukal a fait remarquer que le financement bancaire destiné à l'économie, même s'il a indéniablement progressé ces dernières années avec une hausse annuelle de crédits passée de 8,7% en 2016 à 12,3% en 2017 et à 13,8% en 2018 , n'a tout de même pas été "totalement inclusif" dans l'ensemble des secteurs de l'économie. Les crédits à l'économie, qui ont atteint près de 50% du PIB en 2018, passant de 7.909 milliards de DA (mds DA) en 2016 à 10.102 mds de DA en 2018, ont été surtout concentrés sur les secteurs de l'énergie et de l'eau pour ce qui est des crédits à long terme. La part des crédits à moyen et long termes dans le total des crédits à l'économie est passée de 57% en 2009 à 75% en 2018. Mais cette progression résulte surtout de la hausse des crédits liés au financement des investissements dans l'énergie et l'eau, a-t-il soutenu. Mais vu l'importance des PME dans le développement économique du pays, l'amélioration de la capacité des banques et du système financier à accompagner la création et le développement des petites et moyennes entreprises productives est plus que jamais requise. La dynamisation de leurs activités de conseil à la clientèle et notamment l'expertise en matière d'analyse de projets est également recommandé, selon le gouverneur. "Ce sont des métiers que les banques doivent nécessairement développer pour promouvoir le développement des crédits d'investissement et mieux gérer les risques", a-t-il dit à l'adresse des banquiers présents. La Banque centrale consacre, selon lui, des efforts permanents pour la promotion de ce segment d'activité notamment à travers la mise à niveau et la modernisation des centrales de la gestion des risques et des impayés. Abordant les différents axes de la réforme bancaire et financière, il a notamment souligné la faible capacité des banques à collecter l'épargne: "La collecte des ressources est l'un des talons d'Achille du système bancaire algérien". Sur les quelque 5.000 mds de DA de monnaie fiduciaire en circulation, soit 32% de la masse monétaire M2, on estime entre 1.500 mds de DA à 2.000 mds de DA l'épargne hors circuit bancaire des agents économiques, a rappelé M. Loukal. "L'amélioration des services bancaires existants et une politique agressive d'offre de services bancaires innovants, y compris une politique de taux attrayants, permettrait certainement de drainer une grande partie de cette épargne vers le circuit bancaire", a-t-il avancé. Cette démarche est d'autant plus nécessaire que l'actuelle aisance en matière de liquidité bancaire est générée, dans l'essentiel, par le financement monétaire appelé à prendre fin dans un horizon temporaire limité, a-t-il soutenu. Notant que le rôle des banques dans un financement sain et durable de l'économie nationale est plus que jamais crucial, surtout que le financement de l'économie demeure largement dominé par la dépense publique, M. Loukal n'a pas manqué de rappeler que le financement non conventionnel, même s'il a permis de desserrer la contrainte financière et d'assurer la continuité de la dépense publique, ne pouvait en aucun cas constituer une solution durable.
Les banques invitées à auditer leurs systèmes d'information La réforme de la gouvernance des banques doit, à son tour, constituer un axe majeur de la réforme bancaire escomptée, guidée par les principes d'autonomie, d'efficacité et d'obligation de performance, selon le gouverneur qui a invité les banques à accélérer l'amélioration de l'intermédiation bancaire, en se reposant sur la modernisation de leurs systèmes d'information. A cet égard, la commission bancaire s'apprête à demander la conduite, par les banques et établissements financiers, d'audits de leurs systèmes d'information sur la base d'un cahier des charges exhaustif et uniformisé, a-t-il fait savoir. Il a, en outre, invité les banques à s'atteler à une mise à niveau permanente de leurs ressources humaines et à sa qualification en vue d'aborder la réforme financière par une aptitude plus marquée à l'égard des nouveaux métiers bancaires. L'ensemble de ces défis "semblent à la portée de la place bancaire et financière dont la résilience aux chocs externes à été prouvée quatre années durant avec un fort potentiel de rentabilité et une capitalisation adéquate", a-t-il estimé.
La modernisation des banques est décisive pour réussir les réformes structurelles La modernisation bancaire constitue aujourd'hui un jalon "décisif" des réformes structurelles, devant favoriser la diversification de l'économie nationale et la mettre sur la voie d'une croissance plus soutenue, a indiqué pour sa part le ministre des Finances, Abderrahmane Raouya. Lors d'une journée technique sur la modernisation des banques, organisée par l'Association des Banques et établissements financiers (Abef), en présence de responsables de la Banque d'Algérie, du patronat, de la centrale syndicale et de la place financière, M. Raouya a notamment invité les banques à faire plus d'efforts pour mobiliser l'épargne. "Il est attendu des banques une contribution qualitative par une mobilisation plus intense de l'épargne et une meilleure allocation au profit des agents économiques", a-t-il recommandé. Les banques de la place sont ainsi invitées à améliorer la qualité de leurs services, promouvoir la couverture territoriale et diversifier davantage la gamme des produits proposés, a soutenu le ministre. Il est également attendu des banques des efforts conséquents en termes de formation et de valorisation des ressources humaines surtout sur les volets portant sur l'évaluation et la gestion des risques, l'action commerciale et les systèmes d'information, a-t-il insisté. L'expansion de l'activité bancaire ne doit tout de même pas se faire au détriment de la robustesse des indicateurs de solidité financière, a-t-il ajouté en se réjouissant des efforts de la Banque d'Algérie pour mettre en place des dispositifs réglementaires régissant l'activité bancaire conformément aux standards internationaux de nature à favoriser l'émergence d'un système bancaire moderne et résilient. A travers quatre panels techniques, les participants à cette rencontre ont débattu des voies et moyens pour mener à bien la réforme des banques face aux mutations économiques, la diversification de l'offre des financements, la modernisation des systèmes d'information ainsi que l'inclusion financière. Ces thèmes représentent "un échantillon significatif des actions de réformes financières entreprises en Algérie", selon M. Raouya. Pour sa part, le président de l'ABEF, Achour Aboud, a souligné que le secteur bancaire national était en train d'accélérer sa mue de façon à constituer un véritable vecteur d'intégration de l'économie algérienne dans le nouveau paysage international. "Toute la communauté bancaire est consciente du chemin qui reste à parcourir pour hisser le secteur aux standards internationaux, mais nul ne peut ignorer les avancées significatives et les réalisations accomplies par le secteur grâce aux différents programme de sa mise à niveau", a-t-il affirmé. Selon lui, avec une trentaine de banques et établissements financiers, employant près de 35.000 employés, le secteur bancaire et financier algérien détient un réseau commercial de plus de 1.500 agences, gère 14 millions de comptes et un encours de crédits à l'économie de 10.000 milliards de DA.