Le Conseil de paix et sécurité (CPS) de l'Union africaine (UA) a, mardi 30 avril à Tunis, prolongé de deux mois le premier ultimatum accordé aux putschistes soudanais pour passer le pouvoir aux civils. Mardi 30 avril à Tunis, le Conseil de paix et sécurité (CPS) de l'Union africaine (UA) a prolongé de deux mois, le premier ultimatum accordé aux putschistes soudanais pour passer le pouvoir aux civils. "Nous avons analysé le contexte et les spécificités de la situation au Soudan, (…) notamment les conflits armés et la situation économique dans ce pays. Nous avons également reçu un rapport du président de la Commission, Son Excellence, M. Faki Mahamat, sur la situation actuelle au Soudan, ce qui nous a permis de relever certains progrès allant dans le sens des exigences de la 840e réunion du Conseil de paix et sécurité", tenue le 15 avril, a déclaré à Sputnik, l'ambassadeur Bankole Adeoye, qui assure la présidence tournante du CPS. L'organe décisionnel permanent de l'UA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits, avait "exigé", le 15 avril, des militaires soudanais qu'ils "se retirent et rendent le pouvoir à une autorité politique de transition dirigée par des civils, conformément à la volonté du peuple et à l'ordre constitutionnel", et ce, "dans un délai maximum de quinze jours". Dans le cas contraire, "la suspension de la participation du Soudan aux activités de l'UA", serait prononcée, "jusqu'à la restauration de l'ordre constitutionnel", avait insisté le CPS dans un communiqué. La décision de prolonger l'ultimatum intervient quelques heures avant son expiration, et au lendemain d'un point d'information sur le Soudan, présenté, au CPS, par le président de la Commission, Moussa Faki. Lors de cette réunion qui s'est tenue à huis clos, le chef de l'exécutif de l'UA a prêché pour la prolongation des délais initialement impartis, invoquant les derniers développements au Soudan, notamment la mise en place d'une autorité conjointe entre civils et militaires, a appris Sputnik de sources concordantes. La position de Faki rejoignait une recommandation -juridiquement non contraignante- émise, le 24 avril au Caire, par des chefs d'État africains, dont la Troïka de l'UA, composée de l'actuel président en exercice, l'Égyptien Abdel Fattah al-Sissi, son prédécesseur, le Rwandais Paul Kagamé, ainsi que son successeur, le Sudafricain Cyril Ramaphosa. Prenant acte de "l'évolution de la situation au Soudan", ces chefs d'État avaient, alors, recommandé au Conseil de paix et sécurité de prolonger de trois mois le délai accordé aux militaires soudanais pour organiser une "transition pacifique" du pouvoir. Un appel qui a été "pris en considération" par le CPS, reconnaît le président de cet organe auprès de Sputnik. Les débats qui se sont tenus, au sein du CPS, s'étaient néanmoins prolongés pendant plusieurs heures, au-delà des temps initialement impartis. Ils ont été marqués par des oppositions au sein des quinze membres composant cet organe de l'UA, d'après les sources de Sputnik. "Il s'agissait, tout d'abord, de questionner l'opportunité de poser un délai supplémentaire, dans la mesure où même une prolongation de l'ultimatum pourrait s'avérer insuffisante pour organiser une transition. Par ailleurs, la sanction risquait d'être contreproductive, et même nocive, dans la mesure où elle pourrait soustraire la suite du processus à l'accompagnement de l'Union africaine. D'un autre côté, c'est aussi la crédibilité du CPS qui est en jeu, avec le risque de le voir appliquer, avec cette décision inédite, une politique de deux poids et deux mesures", déclarait, plus tôt dans la journée, un membre du CPS, devant Sputnik. Il s'agit, en effet, de la première fois que le CPS, seul organe habilité à sanctionner "les changements anticonstitutionnels de gouvernement", en vertu de l'article 7 du protocole relatif à sa création, en 2002, revient sur un ultimatum déjà donné à un pays où vient de se produire un coup d'État. En 2012, le CPS avait imposé la suspension de la Guinée Bissau, après un coup d'État militaire. En 2013, suite au renversement du Président Mohamed Morsi, dans un contexte de protestations populaires inédites, l'Égypte s'est vue imposer pareille sanction. Le Burkina Faso a également connu l'exclusion des instances de l'Union africaine suite au putsch éphémère du général Gilbert Diendéré, en septembre 2015. "La décision de prolonger le délai de 60 jours a été [finalement] prise au consensus [mode de prise de décision habituel au sein du CPS]. Nous voulons la stabilité et le progrès du Soudan. J'espère que ce délai supplémentaire encouragera les militaires soudanais, ainsi que toutes les parties prenantes, (…) à trouver une solution durable. Il y avait, en effet, des signaux positifs qui ont amené le CPS à reconsidérer sa position [du 15 avril, ndlr]. Maintenant, il faut savoir que 60 jours est un délai raisonnable pour transférer le pouvoir aux civils. (…) Le cas échéant, si nous ne voyons pas de signal positif, d'ici 60 jours, le Conseil est habilité à prendre toutes les sanctions qui s'imposent, dans le cadre de son mandat", précise le président du CPS à Sputnik. Le CPS s'est réuni à Tunis, en marge d'une retraite de deux jours du Comité des représentants permanents (Corep), accrédités à Addis Abeba, siège de l'Union africaine. L'événement a été inauguré, lundi, en présence du président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki, mais aussi du ministre tunisien des Affaires étrangères, Khemaïes Jhinaoui. "Il s'agit du plus grand rendez-vous africain qui se tient en Tunisie depuis le Sommet [de l'Organisation de l'Unité africaine, ancêtre de l'UA] de 1994", s'est félicité, lundi, le ministre tunisien, dans une déclaration donnée à la presse locale. Le Corep a, quant à lui, discuté du processus de restructuration de l'Union africaine, mais aussi des mécanismes de fonctionnement de l'organisation intergouvernementale, notamment de la coordination avec les Communautés économiques régionales (CER).