Cérémonie populaire aux Invalides, minute de silence dans tout le pays et recueillement en Corrèze : en lien avec la famille de Jacques Chirac, l'exécutif mettait vendredi la dernière touche à l'hommage qui sera rendu à l'ancien président de la République, "personnalité politique hors norme" décédée jeudi. Depuis l'annonce de la mort de cette figure de la Ve République, les hommages se multiplient pour saluer la mémoire de celui qui fut locataire de l'Elysée pendant douze ans (1995-2007), deux fois Premier ministre et maire de Paris. Depuis 21h30 jeudi, quelque 1.700 personnes - selon la présidence - se sont pressées au palais de l'Elysée pour signer les livres de condoléances installés dans le vestibule d'honneur de l'hôtel d'Evreux devant une grande photo de Jacques Chirac, qui sera inhumé au cimetière du Montparnasse auprès de sa fille Laurence. "Je suis très peinée de la perte de mon idole depuis que j'ai 20 ans. Je vivais au Liban ce qui fait que je suis doublement attachée à lui, à sa politique", a déclaré Marie-Hélène à Reuters dans la cour de l'Elysée, juste après avoir signé le registre. Cette retraitée de 69 ans a salué en lui l'homme "bon vivant, coquin, frondeur" qui était très apprécié selon elle au Proche-Orient, au point d'avoir conduit de nombreuses familles à prénommer leur enfant "Chirac". "C'est le seul qui n'avait pas d'ennemis, à qui on ne faisait pas des coups fourrés, parce qu'il était franc et direct", a-t-elle considéré.
Hommage en Corrèze Au lendemain d'une allocution télévisée prononcée en début de soirée, Emmanuel Macron a de son côté évoqué en conseil des ministres "l'énergie et l'humanité" d'une "personnalité politique hors norme", a indiqué la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye. Côté hommages, "différents échanges ont lieu entre le cabinet du président de la République et la famille de Jacques Chirac", a-t-elle poursuivi. La dépouille de l'ancien chef de l'Etat sera présentée aux Invalides afin que les Français puissent lui rendre un dernier hommage dimanche à partir de 14h00, a dit Sibeth Ndiaye. "Lundi à midi, un hommage solennel sera rendu en l'église Saint-Sulpice en présence du président de la République, qui n'effectuera pas de discours à cette occasion", a-t-elle ajouté. Le gouvernement et des chefs d'Etat et de gouvernement étrangers assisteront à cet office religieux célébré par l'archevêque de Paris, Mgr Michel Aupetit. "Lundi, à 15h, une minute de silence sera effectuée dans l'ensemble des administrations publiques et dans les écoles", a aussi précisé la porte-parole. Ce sera mardi au tour de l'Assemblée nationale de rendre hommage à l'ancien chef de l'Etat lors d'une cérémonie solennelle programmée en début d'après-midi, avant les questions au gouvernement. D'anciens présidents de la chambre basse, d'ex-Premiers ministres et des membres de la famille Chirac devraient être présents, a-t-on appris de source parlementaire. Le décès de Jacques Chirac a entraîné le report d'une semaine des débats sur l'immigration à l'Assemblée nationale et au Sénat, désormais programmés les lundi 7 et mercredi 9 octobre. Le week-end du 5-6 octobre, "à la demande de la famille" selon Sibeth Ndiaye, un hommage spécifique sera rendu en Corrèze, fief électoral de Jacques Chirac qui y possédait une résidence, le château de Bity.
40 ans d'activité politique Jacques Chirac, qui présida la France de 1995 à 2007, est décédé jeudi matin à l'âge de 86 ans, apres plus de 40 ans d'activité politique. "Le président Jacques Chirac s'est éteint ce matin paisiblement parmi les siens", a dit à Reuters Frédéric Salat-Baroux, époux de Claude Chirac, la fille de l'ancien président. Victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC) en septembre 2005, durant son second mandat, Jacques Chirac avait renoncé à paraître en public ces dernières années, très affaibli par la maladie. Emmanuel Macron a annulé son déplacement prévu à Rodez (Aveyron) jeudi sur la réforme des retraites et prononcera une allocution radiotélévisée à 20h00 (18h00 GMT). L'Elysée ouvrira ses portes ce jeudi soir à partir de 21h00 afin que les Français qui le souhaitent puissent venir exprimer leurs condoléances, a-t-on appris auprès de la présidence. Un recueil de condoléances sera mis à leur disposition dans le vestibule d'honneur du palais de l'Elysée jusqu'à dimanche, précise-t-on de même source. La journée de lundi est décrétée "jour de deuil national". Un service solennel à l'intention de l'ancien président se tiendra ce jour-là à 12h00 à l'église Saint-Sulpice à Paris. "C'est beaucoup mieux comme ça, car Jacques Chirac n'était plus Jacques Chirac ces derniers temps. C'était un grand homme, un très grand Français", a réagi la comédienne et chanteuse Line Renaud, qui était très proche de la famille Chirac. Les responsables politiques, de l'extrême gauche à l'extrême droite, ont rendu un hommage unanime à l'ancien président. Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, a salué l'homme "capable de s'opposer à la folie de la guerre en Irak" en 2003, et Jean-Luc Mélenchon, chef de file de La France insoumise, a rendu hommage à un président qui "aimait la France mieux que d'autres depuis". "Mort, même l'ennemi a le droit au respect", a déclaré pour sa part à BFM TV le cofondateur du Front national Jean-Marie Le Pen, qui affronta Jacques Chirac au second tour de l'élection présidentielle de 2002. L'ancien président socialiste François Hollande, qui partageait avec Jacques Chirac l'amour de la Corrèze et un goût pour le "relativisme" goguenard, a loué un "humaniste", un "homme de culture", un "Européen" et un "républicain", qui "connaissait charnellement le pays". A l'annonce de la nouvelle, le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, a fait observer une minute de silence durant la séance et a brièvement interrompu les travaux de la chambre. Le président du Sénat, Gérard Larcher, a lui aussi fait observer une minute de silence. "La France et les Français ont perdu leur Président. La famille gaulliste perd un de ses plus grands inspirateurs", a écrit sur Twitter l'un de ses anciens "grognards", le chef de file des députés Républicains, Christian Jacob. Un autre "chiraquien" historique, le Haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye, a déclaré sur Twitter que Jacques Chirac "incarnait la noblesse de la politique". "L'Europe ne perd pas seulement un grand chef d'Etat, mais aussi un ami proche", a réagi sur Twitter le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. Douze ans chef de l'Etat (1995-2007), deux fois Premier ministre, "Chirac-le-fonceur", fut un hussard du gaullisme à la personnalité et aux convictions complexes.