Les dirigeants européens ont appelé à la mobilisation générale vendredi face à l'envolée inquiétante de l'inflation, exhortant les syndicats à la modération salariale à la veille d'une grande manifestation européenne sur le pouvoir d'achat. “Nous sommes très préoccupés par le niveau de l'inflation” qui a atteint une ampleur “incroyable”, a déclaré à la presse le président du forum des ministres des Finances de la zone euro (Eurogroupe), le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, à l'issue d'une réunion en Slovénie. La hausse des prix a atteint un record en zone euro le mois dernier, à 3,5% sur un an, poussée par la flambée des prix énergétiques et alimentaires, avec des pointes à plus de 4% dans certains pays. “Nous voulons inviter les gouvernements nationaux à mettre en place des mesures pour combattre l'inflation”, a ajouté M. Juncker. Un appel relayé par le président de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet. “Nous encourageons les gouvernements à faire tout ce qu'ils peuvent, dans leur propre domaine de compétence, pour diminuer les risques que nous observons du côté de l'inflation”, en n'augmentant pas excessivement les impôts indirects ou les prix administrés et surtout en prônant la modération salariale, a-t-il dit, critiquant au passage l'indexation des salaires sur l'inflation comme en Belgique ou au Luxembourg. La BCE, gardienne de la stabilité des prix en zone euro, redoute que la flambée des prix n'entraîne des revalorisations salariales excessives qui provoqueraient “une spirale inflationniste”.“La stabilité des prix est essentielle en particulier pour les personnes les plus vulnérables” sur le plan social, a insisté M. Trichet. “L'inflation est l'ennemi de ceux qui n'ont pas de pouvoir d'achat”, lui a fait écho M. Juncker. Mais les syndicats européens ne l'entendent pas de cette oreille car la grogne monte sur le continent.La Confédération européenne des syndicats (CES) attend samedi 30.000 à 40.000 manifestants de toute l'Europe dans les rue de la capitale slovène, Ljubljana, pour demander des hausses de salaires et l'instauration de salaires minimums dans les pays de l'UE qui n'en imposent pas. Leur rassemblement coïncidera avec la deuxième journée de la réunion des ministres européens des Finances à proximité. La valse des étiquettes en Europe se conjugue à un ralentissement de plus en net de la croissance, alors qu'aux Etats-Unis la récession se profile et la crise financière mondiale persiste. “Les risques pour la croissance ont augmenté”, a reconnu en Slovénie le commissaire européen aux Affaires économiques Joaquin Almunia. Le Fonds monétaire international n'attend plus que 1,3% de croissance cette année en zone euro, un chiffre jugé toutefois trop pessimiste par les grands argentiers européens. Dans ce contexte, M. Juncker a également invité les gouvernements à la discipline budgétaire. Un chemin que semble emprunter la France. Le président français Nicolas Sarkozy a présenté dans la journée un plan d'économies pour lutter contre les déficits, avec en particulier le non-remplacement à partir de 2009 d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Par ailleurs, face à la crise financière, les ministres se sont mis d'accord pour renforcer leur coopération, tout en se montrant optimistes sur la capacité des banques à faire face aux turbulences actuelles. Ils ont adopté un document commun visant notamment à limiter le recours aux fonds publics pour venir à la rescousse des établissements financiers privés en difficulté.