Les Gardiens de la Révolution ont loué jeudi l'action "rapide" des forces armées face aux "émeutiers" en Iran, où l'internet reste largement inaccessible en dépit d'un retour au calme apparent après des violences ayant touché une centaine de villes. Après plusieurs jours de manifestations déclenchés vendredi, quelques heures après l'annonce subite d'une forte hausse du prix de l'essence, l'Etat avait affirmé mercredi être sorti victorieux d'un "complot" ourdi à l'étranger. Jusqu'à présent les autorités ont confirmé la mort de cinq personnes mais l'ONU a dit craindre que "des dizaines" de personnes aient été tuées dans les heurts. Selon les Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique d'Iran, "des incidents, petits et grands [...] ont eu lieu dans [un peu] moins de cent villes" auxquels il a été mis fin "en moins de 24 heures, et dans certaines villes en 72 heures." "C'est le résultat de la perspicacité et de l'action rapide des forces armées et des forces de l'ordre", jugent les Gardiens, ajoutant que les "principaux meneurs" ont été arrêtés dans les provinces de Téhéran, et d'Alborz (limitrophe de la capitale) ainsi qu'à Chiraz (centre-sud). "Chaque émeutier, où qu'il se trouve en Iran, sera identifié et puni", a averti le contre-amiral Ali Chamkhani, secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale, cité par l'agence Mehr. Depuis mercredi, la télévision d'Etat n'a diffusé aucune nouvelle image mettant en cause la violence des contestataires, montrant plutôt des manifestations "spontanées" de soutien aux autorités. Selon ces images, de tels rassemblements ont ainsi eu lieu à Qom, Ispahan, Chiraz et Kerman (centre), ainsi qu'à Bandar Abbas (sud). L'agence semi-officielle Isna a fait état d'un autre à Karaj, près de Téhéran.
- Combien de morts ? - Les troubles sont partis après l'annonce d'une réforme du mode de subvention de l'essence, censée bénéficier aux ménages les moins favorisés mais s'accompagnant d'une très forte hausse du prix à la pompe. Ils sont survenus alors que l'Irak, voisin de l'Iran, est touché par une vague de contestation populaire d'une ampleur inédite dénonçant l'inaction des autorités pour régler leurs problèmes ainsi que l'ingérence de Téhéran dans les affaires irakiennes. L'Iran soutient plusieurs groupes armés en Irak - dont certains sont associés de près ou de loin à la fragile coalition gouvernementale - et a aidé le pouvoir irakien dans sa guerre contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI). Pour Téhéran, la contestation en Irak, comme celle des derniers jours en Iran est téléguidée par des puissance étrangères hostiles à la République islamique: les Etats-Unis, Israël et l'Arabie saoudite, grand rival régional de l'Iran. Les autorités ont jusqu'ici confirmé la mort de quatre membres des forces de l'ordre et un civil depuis le début des troubles vendredi dernier. L'ONU, de son côté, a dit craindre que "des dizaines" de personnes aient été tuées dans les heurts. L'organisation de défense des droits humains, Amnesty International, a accusé le pouvoir d'avoir recouru excessivement "à la force létale pour écraser des manifestations largement pacifiques" et estime qu'au moins 106 contestataires" auraient été tués. "Tous les chiffres sur les victimes qui ne sont pas confirmés par le gouvernement sont spéculatifs et non fiables, et dans de nombreux cas procèdent d'une campagne de désinformation contre l'Iran dirigée de l'extérieur du pays", a réagi sur Twitter Aliréza Miryousséfi, porte-parole de la délégation iranienne au siège des Nations unies à New York.
- "Toute violence est inacceptable" - Bruxelles a dit attendre "des forces de sécurité iraniennes qu'elles fassent preuve de la plus grande retenue dans la gestion des manifestations". Pour l'UE, "toute violence est inacceptable" et "les droits à la liberté d'expression et de réunion doivent être garantis". L'accès à l'internet mondial restait largement coupé jeudi alors que sur Twitter fleurissent des mots-dièse comme #Internet4Iran ("Internet pour l'Iran") demandant la fin de ce couvre-feu numérique. Cité par Isna, le député réformateur Ali Motahari a estimé que la coupure de l'internet n'était "plus nécessaire compte tenu du retour au calme dans le pays" et a appelé les autorités à lever la mesure en vigueur depuis plus de quatre jours. Dans ce qui pourrait annoncer un début de rétablissement de la connexion, Isna a indiqué à la mi-journée que l'accès à des services comme "WhatsApp et Instagram" avait été rétabli dans la province d'Hormozgan (sud). L'ONG Netblocks, qui surveille la liberté d'accès à internet de par le monde, a indiqué sur Twitter vers 10h40 GMT qu'elle observait un début de rétablissement, partiel des liens cybernétiques du pays avec le monde extérieur. Selon Netblocks, le degré de connexion au web mondial "est remonté à 10%" de ce qu'il est en temps normal, après être tombé aussi bas que 4% ces derniers jours.