Les ministres des Finances des 185 pays membres du Fonds monétaire international (FMI) étaient réunis, samedi, pour l'assemblée semestrielle de l'institution, engagée dans une réforme stratégique, alors que l'économie mondiale connaît sa pire crise financière depuis 1929.Cette assemblée de printemps se tient au lendemain de la réunion du G7-Finances, au cours de laquelle les grands argentiers des pays les plus industrialisés ont jugé que les perspectives de l'économie mondiale s'étaient dégradées, sans toutefois prononcer le mot tabou de "récession".Les prévisions du FMI, critiquées par plusieurs pays riches, sont plus sévères. Les Etats-Unis, ébranlés par leur pire crise financière depuis le grand krach de 1929, vont connaître cette année "une légère récession", qui va peser sur la croissance mondiale, ramenée à 3,7 %, estime le FMI.L'institution financière internationale a, par ailleurs, chiffré à 945 milliards de dollars le coût potentiel de la crise pour le système financier international, dont 565 milliards liés à l'exposition des banques aux prêts immobiliers à risque. L'économie mondiale est prise entre "le gel" de la croissance et "le feu" de l'inflation a résumé, jeudi, le nouveau directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, qui préside pour la première fois cette réunion.En matière de hausse des prix, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a estimé, samedi, qu'elle avait fait sa part pour maintenir un équilibre des marchés pétroliers, en laissant inchangée sa production, en dépit des signes d'essoufflement de la croissance mondiale.Le commissaire européen aux Affaires économiques, Joaquin Almunia, a, par ailleurs, relayé le changement de ton du G7 sur les monnaies, en estimant que la hausse de l'euro face au dollar arrivait à un point tel que la monnaie unique risquait de se déconnecter de la réalité de l'économie européenne."La parité de change réelle de l'euro approche du niveau où elle ne serait clairement plus en ligne avec les fondamentaux économiques", a-t-il dit. Vendredi, le G7 a dit à mots couverts son inquiétude face à la chute du dollar. Les Européens ne cessent de déplorer l'appréciation spectaculaire de l'euro et d'encourager les Etats-Unis à faire davantage pour faire remonter le billet vert.Outre, l'examen de la conjoncture économique, les participants à l'assemblée ont globalement soutenu le projet proposé par DSK de boucler la réforme engagée il y a plus de deux ans pour rendre au fonds pertinence et légitimité. Les Etats membres ont jusqu'à la fin du mois pour approuver individuellement ses propositions qui nécessitent 85 % des suffrages. Chacun espérait davantage de ce projet qui prône le transfert d'un bloc de droits de vote fixé à 2,7 points de pourcentage des pays du Nord (57,9 %) vers les pays du Sud (42,1) %. Mais la plupart des participants semblent se ranger au pragmatisme affiché par le nouveau directeur général, qui a pris le parti de boucler dans les temps un accord modeste mais appelé à évoluer. "J'accueille volontiers l'occasion de m'associer aux pays émergents et à un grand nombre de membres du FMI pour soutenir le projet de réforme", a, en particulier, déclaré le secrétaire américain du Trésor, Henry Paulson, qui jouit d'un droit de veto au sommet de l'institution. Le ministre argentin de l'Economie, Martin Lousteau, a été l'un des rares participants à se montrer clairement sceptique, jugeant que les propositions étaient un premier pas "vraiment modeste" vers une plus grande représentation des pays du Sud. La crise financière américaine et ses répercussions sur les économies mondiales sont évidemment au centre des discussions entre le FMI et la Banque mondiale. Le FMI remarque que les économies des pays en développement, et notamment les économies africaines, restent vigoureuses même si elles sont aussi menacées par la hausse des prix des produits alimentaires. Selon les prévisions du FMI, "la croissance africaine devrait atteindre 6,3 % en 2008 et 6,4 % en 2009. C'est le plus fort taux, depuis la décolonisation. Soutenu par la flambée des prix des matières premières et par l'ouverture croissante de ses économies, le continent résiste, pour le moment, assez bien à la crise économique mondiale". Mais les répercussions pourraient, selon le FMI, se faire ressentir plus tard. A noter aussi les forts écarts entre les pays exportateurs de pétrole et les autres. Surtout que le continent n'est pas épargné par la hausse des prix des produits alimentaires, le riz ayant, par exemple, augmenté de 50 % dans certains pays. Au cours de la réunion de samedi, le directeur général du FMI s'est inquiété des risques économiques, humanitaires, mais aussi démocratiques liés à cette crise. Dominique Strauss Kahn évoque les conséquences terribles qu'elle pourrait avoir sur le plan politique et notamment les risques que des guerres éclatent. Pour y faire face, le président de la Banque mondiale, Robert Zoellick, en appelle donc à la mise en place d'un "new deal alimentaire" et aux dons internationaux. Dans certains pays, des mesures ponctuelles d'assouplissement fiscal, comme la suppression des taxes ou des droits de douane, ont déjà été mises en place avec l'assentiment exceptionnel du FMI. Le fonds demande aussi aux gouvernements de subventionner les populations les plus pauvres. Sur le plus long terme, le FMI et la Banque mondiale prônent l'augmentation des terres cultivées et de leur productivité.