Plus rien ne sera jamais comme avant en Afrique, depuis le succès des révolutions en Tunisie et en Egypte. Mais ces mouvements traverseront-ils le Sahara? Premier test le 18 février pour le président Museveni en Ouganda. Plus rien ne sera jamais comme avant en Afrique, depuis le succès des révolutions en Tunisie et en Egypte. Mais ces mouvements traverseront-ils le Sahara? Premier test le 18 février pour le président Museveni en Ouganda. Hasard malheureux du calendrier pour un des derniers «dinosaures» africains, le président Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 25 ans et candidat à sa réélection lors du scrutin présidentiel de vendredi 18 février, soit juste une semaine après la chute du président égyptien Hosni Moubarak. Besigye contre Museveni La victoire des peuples tunisiens puis égyptiens sur des autocrates aux manettes depuis des décennies peut susciter des vocations chez les opposants ougandais. Kizza Besigye, principal challenger de Museveni, ne se cache d'ailleurs pas de vouloir importer ces modèles dans ce pays des Grands Lacs. Selon lui, les Ougandais exaspérés par le chômage de masse, la corruption endémique et la répartition très inégale des bienfaits de la croissance économique, sont «mûrs pour un soulèvement comme en Egypte». Ancien collaborateur du président ougandais, le docteur Besigye a déjà perdu en 2001 et 2006 face à Museveni. Mais cette fois-ci, il fanfaronne et affirme pouvoir l'emporter avec 60% des voix (contre 35% en 2006). M. Besigye connaît bien son adversaire politique. Il était en effet le médecin personnel de Museveni, alors chef rebelle, jusqu'en 1986. Il a occupé ensuite plusieurs postes importants au gouvernement et dans l'armée avant d'être écarté par le régime en 1999. En 1996, Museveni avait recueilli environ 75% des votes. Mais dix ans plus tard il était passé sous la barre de 60%, un net effritement qui devrait donc faire du scrutin du 18 février prochain le plus incertain qu'il ait jamais affronté. Un climat violent et répressif Dans un récent rapport très alarmiste, Amnesty International s'est inquiétée de l'existence de nombreuses milices, tant du côté du pouvoir que de l'opposition. La campagne électorale a d'ailleurs été marquée par des violences et autres actes d'intimidation. «Tout peut arriver en Ouganda maintenant… Les dictateurs ne peuvent pas être enlevés via des élections libres et justes», a affirmé l'opposant Besigye, après avoir rencontré des diplomates américains à Kampala. Si la compagnie française Coface, spécialiste des risques pays, voit Museveni l'emporter, elle relève que «l'insatisfaction de la population est latente, notamment dans les villes où la population jeune pâtit d'une insertion difficile sur le marché du travail». «Par ailleurs, le renforcement des lignes de fractures ethniques et du mouvement sécessionniste baganda du royaume du Buganda (au centre du pays) accroissent le risque d'instabilité politique à l'approche des élections présidentielle et parlementaire», avertit la Coface. Le «général» Museveni, officiellement retiré de l'armée depuis 1996, peut toutefois compter sur l'appui de ses militaires, dont certains hauts-gradés ont tiré un grand bénéfice personnel de l'implication de Kampala dans les guerres ayant ravagé la République démocratique du Congo voisine (RDC). Une répression sanglante d'opposants très remontés pourrait toutefois, dans le contexte international actuel, mettre le feu aux poudres et rendre la situation incontrôlable. Un régime soutenu par les Etats-Unis Mais le président Museveni est peut-être «le plus chanceux des dictateurs africains», comme l'écrit avec malice le quotidien britannique The Independent. Le régime est en effet un allié de poids de Washington dans la très instable région des Grands Lacs, toujours traumatisée par le génocide rwandais de 1994 et les guerres civiles dans l'est de la RDC. Et les Etats-Unis ne voudront pas brutalement modifier le jeu régional alors que la menace d'al-Qaida reste vive, depuis les attentats de Kampala de l'été 2010 (commis par les shebab somaliens, affiliés à al-Qaida), et qu'un nouvel Etat, le Sud-Soudan, très riche en pétrole et frontalier de l'Ouganda, entre en scène après l'écrasant «Oui» à la sécession lors d'un référendum. La nouvelle manne pétrolière L'Ouganda bénéficie en outre d'un taux de croissance économique moyen de 6,8% ces vingt dernières années et s'apprête à devenir un pays exportateur de pétrole. Ce facteur est essentiel, car Washington importe de plus en plus d'«or noir» d'Afrique afin d'être moins dépendant du pétrole du Moyen-Orient, une région toujours instable. Les réserves de pétrole en Ouganda ont déjà été officiellement estimées à 2,5 milliards de barils. Elle pourrait même atteindre le seuil des 5 milliards, propulsant le pays dans le peloton de tête des principales puissances pétrolières du continent. La perspective d'une gigantesque manne pétrolière n'incite donc guère Museveni, ex-chef rebelle passé du bush au palais présidentiel, à abandonner le pouvoir à ses opposants. A moins que la rue ougandaise ne se révolte… Hasard malheureux du calendrier pour un des derniers «dinosaures» africains, le président Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 25 ans et candidat à sa réélection lors du scrutin présidentiel de vendredi 18 février, soit juste une semaine après la chute du président égyptien Hosni Moubarak. Besigye contre Museveni La victoire des peuples tunisiens puis égyptiens sur des autocrates aux manettes depuis des décennies peut susciter des vocations chez les opposants ougandais. Kizza Besigye, principal challenger de Museveni, ne se cache d'ailleurs pas de vouloir importer ces modèles dans ce pays des Grands Lacs. Selon lui, les Ougandais exaspérés par le chômage de masse, la corruption endémique et la répartition très inégale des bienfaits de la croissance économique, sont «mûrs pour un soulèvement comme en Egypte». Ancien collaborateur du président ougandais, le docteur Besigye a déjà perdu en 2001 et 2006 face à Museveni. Mais cette fois-ci, il fanfaronne et affirme pouvoir l'emporter avec 60% des voix (contre 35% en 2006). M. Besigye connaît bien son adversaire politique. Il était en effet le médecin personnel de Museveni, alors chef rebelle, jusqu'en 1986. Il a occupé ensuite plusieurs postes importants au gouvernement et dans l'armée avant d'être écarté par le régime en 1999. En 1996, Museveni avait recueilli environ 75% des votes. Mais dix ans plus tard il était passé sous la barre de 60%, un net effritement qui devrait donc faire du scrutin du 18 février prochain le plus incertain qu'il ait jamais affronté. Un climat violent et répressif Dans un récent rapport très alarmiste, Amnesty International s'est inquiétée de l'existence de nombreuses milices, tant du côté du pouvoir que de l'opposition. La campagne électorale a d'ailleurs été marquée par des violences et autres actes d'intimidation. «Tout peut arriver en Ouganda maintenant… Les dictateurs ne peuvent pas être enlevés via des élections libres et justes», a affirmé l'opposant Besigye, après avoir rencontré des diplomates américains à Kampala. Si la compagnie française Coface, spécialiste des risques pays, voit Museveni l'emporter, elle relève que «l'insatisfaction de la population est latente, notamment dans les villes où la population jeune pâtit d'une insertion difficile sur le marché du travail». «Par ailleurs, le renforcement des lignes de fractures ethniques et du mouvement sécessionniste baganda du royaume du Buganda (au centre du pays) accroissent le risque d'instabilité politique à l'approche des élections présidentielle et parlementaire», avertit la Coface. Le «général» Museveni, officiellement retiré de l'armée depuis 1996, peut toutefois compter sur l'appui de ses militaires, dont certains hauts-gradés ont tiré un grand bénéfice personnel de l'implication de Kampala dans les guerres ayant ravagé la République démocratique du Congo voisine (RDC). Une répression sanglante d'opposants très remontés pourrait toutefois, dans le contexte international actuel, mettre le feu aux poudres et rendre la situation incontrôlable. Un régime soutenu par les Etats-Unis Mais le président Museveni est peut-être «le plus chanceux des dictateurs africains», comme l'écrit avec malice le quotidien britannique The Independent. Le régime est en effet un allié de poids de Washington dans la très instable région des Grands Lacs, toujours traumatisée par le génocide rwandais de 1994 et les guerres civiles dans l'est de la RDC. Et les Etats-Unis ne voudront pas brutalement modifier le jeu régional alors que la menace d'al-Qaida reste vive, depuis les attentats de Kampala de l'été 2010 (commis par les shebab somaliens, affiliés à al-Qaida), et qu'un nouvel Etat, le Sud-Soudan, très riche en pétrole et frontalier de l'Ouganda, entre en scène après l'écrasant «Oui» à la sécession lors d'un référendum. La nouvelle manne pétrolière L'Ouganda bénéficie en outre d'un taux de croissance économique moyen de 6,8% ces vingt dernières années et s'apprête à devenir un pays exportateur de pétrole. Ce facteur est essentiel, car Washington importe de plus en plus d'«or noir» d'Afrique afin d'être moins dépendant du pétrole du Moyen-Orient, une région toujours instable. Les réserves de pétrole en Ouganda ont déjà été officiellement estimées à 2,5 milliards de barils. Elle pourrait même atteindre le seuil des 5 milliards, propulsant le pays dans le peloton de tête des principales puissances pétrolières du continent. La perspective d'une gigantesque manne pétrolière n'incite donc guère Museveni, ex-chef rebelle passé du bush au palais présidentiel, à abandonner le pouvoir à ses opposants. A moins que la rue ougandaise ne se révolte…