L'Iran s'est engagé lundi auprès de l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA) à prendre une série de mesures censées améliorer la transparence de son programme nucléaire, au sujet duquel John Kerry a dit s'attendre à un accord dans un délai de quelques mois entre les grandes puissances et Téhéran après l'échec des pourparlers de Genève. L'Iran s'est engagé lundi auprès de l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA) à prendre une série de mesures censées améliorer la transparence de son programme nucléaire, au sujet duquel John Kerry a dit s'attendre à un accord dans un délai de quelques mois entre les grandes puissances et Téhéran après l'échec des pourparlers de Genève. Le secrétaire d'Etat américain a en outre démenti toute divergence au sein du groupe P5+1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'Onu et l'Allemagne) alors que des diplomates ont imputé à la France l'absence d'accord à l'issue de la réunion de Genève. Signe supplémentaire de l'évolution de la position de l'Iran depuis l'élection d'Hassan Rohani à la présidence du pays en juin, la République islamique a signé lundi une déclaration commune avec l'AIEA à l'occasion d'une visite à Téhéran du directeur général de l'agence onusienne, Yukiya Amano. L'AIEA et l'Iran sont convenus de "renforcer leur coopération et leur dialogue afin de garantir la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire de l'Iran", est-il écrit dans cette déclaration commune, qui comporte en annexe une liste de six premières mesures à prendre par les Iraniens. Parmi celles-ci, l'Iran va notamment accepter des inspections de son usine de production d'eau lourde d'Arak et de sa mine d'uranium de Gachin, deux exigences formulées de longue date par l'AIEA. "La déclaration commune qui a été signée aujourd'hui représente une feuille de route qui spécifie les mesures bilatérales liées au règlement des questions en suspens", a déclaré Ali Akbar Salehi, directeur de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique, lors d'une conférence de presse commune avec Yukiya Amano retransmise à la télévision. Le directeur général de l'AIEA a pour sa part souligné que l'accord serait "mis en œuvre dans les trois prochains mois à compter de ce jour". "Beaucoup de travail reste à accomplir", a-t-il ajouté. L'Iran va aussi fournir des informations au sujet de futurs réacteurs de recherche et au sujet de 16 sites destinés à accueillir des centrales nucléaires. Les autorités iraniennes s'engagent aussi à clarifier des déclarations passées sur leurs activités d'enrichissement d'uranium. Tous ces points répondent à des demandes de l'AIEA que l'Iran a ignorées sous la présidence de Mahmoud Ahmadinejad, ce qui a alimenté les soupçons de la communauté internationale sur l'existence d'un volet militaire clandestin dans le programme nucléaire iranien. Parallèlement à ses discussions avec l'AIEA, l'Iran négocie avec six grandes puissances et ces pourparlers qui semblaient proches d'aboutir samedi à Genève n'ont finalement pas été concluants. Les deux parties sont convenues de se retrouver le 20 novembre. John Kerry, qui avait suspendu vendredi sa tournée au Proche-Orient pour mettre son poids dans les négociations à Genève, a relativisé lundi l'absence d'accord provisoire, qui porterait sur une réduction ou un gel de certaines activités iraniennes en échange d'un allègement progressif et temporaire des sanctions internationales contre Téhéran. "Il ne s'agit pas d'une course pour parvenir à n'importe quel accord", a souligné le secrétaire d'Etat américain, en visite aux Emirats arabes unis, évoquant une "responsabilité absolue" de rechercher une solution par la voie diplomatique. John Kerry a assuré que le groupe P5+1 était "uni samedi lorsque nous avons soumis une proposition aux Iraniens, et les Français l'ont signée, nous l'avons signée et tout le monde convenait que c'était une proposition équitable". Comment la France a bloqué l'accord... Depuis la relance des pourparlers sur le nucléaire iranien à la mi-octobre, autant Washington que Téhéran sont pressés de parvenir à un accord : le président Barack Obama, dont l'autorité au Moyen-Orient a été écornée depuis sa volte-face sur les frappes militaires contre le régime syrien de Bachar Al-Assad, est avide d'un succès diplomatique dans la région, qui aurait également des retombées majeures sur les conflits qui déstabilisent le Proche-Orient, à commencer par la Syrie, principal allié régional de Téhéran. Quant au président iranien, Hassan Rohani, il sait que sa légitimité repose sur sa capacité à obtenir une levée, au moins partielle mais rapide, des sanctions qui étranglent l'économie iranienne. Ce faisceau d'intérêts convergents, ajouté à une certaine fatigue face à des négociations enlisées depuis dix ans, a poussé les Américains et les Iraniens à accélérer la recherche d'un compromis, dont les termes précis ne sont toutefois pas connus. Mais ils ont suffisamment inquiété la France, indiquent nos sources, pour la pousser à sortir du bois et à rompre le silence observé par les délégations depuis le lancement des négociations, le 15 octobre, à Genève. Depuis deux semaines, aucune "fuite" n'était venue perturber les discussions. Une règle jusque-là jugée indispensable pour maintenir la confiance entre les pays participants, tant la moindre rumeur aurait été immédiatement exploitée par les adversaires d'un accord, à commencer par les ultraconservateurs iraniens, désireux de fragiliser M. Rohani. Dans un premier temps, l'annonce surprise de l'arrivée, vendredi 8 novembre, à Genève, de Laurent Fabius, le ministre français des affaires étrangères, et de son homologue américain, John Kerry, a été perçue comme le signe annonciateur de l'imminence d'un accord. D'autant qu'ils ont aussitôt été rejoints par les chefs de la diplomatie britannique et allemand, accourus à la hâte en Suisse. Une impression renforcée lorsque les négociations ont été prolongées pour permettre la venue des Russes et des Chinois, arrivés samedi. Une telle mobilisation laissait supposer que les discussions avançaient et qu'un accord était dans les tuyaux. C'était sans compter sur la détermination des Français, inquiets de la précipitation des Américains. Ils jugent, au contraire, que le moment est propice pour exiger le maximum de garanties aux Iraniens, tant ils sont en demande de gestes du fait de l'impact des sanctions et aussi à cause du capital politique investi dans ces négociations par le président Rohani. Dès que le Quai d'Orsay apprend, jeudi, que John Kerry a l'intention de se rendre le lendemain à Genève, alors que la réunion devait initialement se dérouler entre directeurs politiques, Laurent Fabius bouscule son agenda et atterrit, vendredi en fin de matinée, à Genève, avant Kerry. A peine arrivé, il fait tout de suite une brève déclaration : "Nous voulons un accord qui soit une première réponse solide aux inquiétudes liées au nucléaire iranien. Il y a des avancées, mais rien n'est encore acquis." Le choix des mots est pesé. La tonalité ouvertement dubitative tranche avec la "musique" diffusée depuis la veille. Toutefois, l'excitation provoquée par le débarquement précipité d'une nuée de ministres des affaires étrangères relègue les propos de M. Fabius au second plan. Mais dès le lendemain matin, il sera plus explicite et beaucoup plus entendu. Au moment même où les pourparlers reprennent, Laurent Fabius affiche clairement son scepticisme lors d'un entretien sur France Inter. Le doute n'était alors plus permis. Il s'agissait bien d'une stratégie offensive. "Il y a des bastonnades", a concédé, non sans satisfaction, un diplomate français car, a-t-il insisté, "on veut éviter l'euphorie du verre à moitié plein". "Jeux à somme nulle et mentalité de la guerre froide" Les propos de Laurent Fabius, immédiatement relayés par les agences de presse, électrisent les couloirs de l'hôtel Intercontinental où sont retranchées les délégations qui mènent des consultations tous azimuts. C'est la première fois que des points précis de l'accord sont exposés au grand jour. Il n'est désormais plus question que du "blocage" français dans les conversations. La réaction ne se fait pas attendre. En fin de matinée, un membre de l'entourage de John Kerry lâche cette phrase assassine à des journalistes : "Les Américains, l'Union européenne et les Iraniens travaillent intensément ensemble depuis plusieurs mois sur cette proposition et ceci n'est rien d'autre qu'une tentative de M. Fabius de se montrer pertinent à un stade tardif dans les négociations. " La charge est aussi violente qu'inhabituelle à ce niveau. Une autre source américaine a confirmé au Monde que l'entourage de M. Kerry était "furieux" après les déclarations de Fabius. Le chef de la diplomatie française a ensuite récidivé à deux reprises, peu avant le déjeuner et à l'issue de la séance plénière, aux premières heures de dimanche, avec des déclarations à chaque fois tranchantes. Les propos de Laurent Fabius ont été d'autant plus remarqués qu'il a été le seul, pendant la journée, à s'exprimer publiquement à plusieurs reprises et à contre-courant, marquant ainsi clairement sa différence. De Téhéran, le président Rohani se répand sur Twitter : "Ne vous y trompez pas, écrit-il, les jeux à somme nulle, la mentalité de la guerre froide, tout cela conduit à ce que tout le monde perde." Mais rien n'y fait, l'accord semble être sorti de ses rails. Les "bastonnades" reprendront le 20 novembre à Genève, lors de la poursuite des négociations. Le secrétaire d'Etat américain a en outre démenti toute divergence au sein du groupe P5+1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'Onu et l'Allemagne) alors que des diplomates ont imputé à la France l'absence d'accord à l'issue de la réunion de Genève. Signe supplémentaire de l'évolution de la position de l'Iran depuis l'élection d'Hassan Rohani à la présidence du pays en juin, la République islamique a signé lundi une déclaration commune avec l'AIEA à l'occasion d'une visite à Téhéran du directeur général de l'agence onusienne, Yukiya Amano. L'AIEA et l'Iran sont convenus de "renforcer leur coopération et leur dialogue afin de garantir la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire de l'Iran", est-il écrit dans cette déclaration commune, qui comporte en annexe une liste de six premières mesures à prendre par les Iraniens. Parmi celles-ci, l'Iran va notamment accepter des inspections de son usine de production d'eau lourde d'Arak et de sa mine d'uranium de Gachin, deux exigences formulées de longue date par l'AIEA. "La déclaration commune qui a été signée aujourd'hui représente une feuille de route qui spécifie les mesures bilatérales liées au règlement des questions en suspens", a déclaré Ali Akbar Salehi, directeur de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique, lors d'une conférence de presse commune avec Yukiya Amano retransmise à la télévision. Le directeur général de l'AIEA a pour sa part souligné que l'accord serait "mis en œuvre dans les trois prochains mois à compter de ce jour". "Beaucoup de travail reste à accomplir", a-t-il ajouté. L'Iran va aussi fournir des informations au sujet de futurs réacteurs de recherche et au sujet de 16 sites destinés à accueillir des centrales nucléaires. Les autorités iraniennes s'engagent aussi à clarifier des déclarations passées sur leurs activités d'enrichissement d'uranium. Tous ces points répondent à des demandes de l'AIEA que l'Iran a ignorées sous la présidence de Mahmoud Ahmadinejad, ce qui a alimenté les soupçons de la communauté internationale sur l'existence d'un volet militaire clandestin dans le programme nucléaire iranien. Parallèlement à ses discussions avec l'AIEA, l'Iran négocie avec six grandes puissances et ces pourparlers qui semblaient proches d'aboutir samedi à Genève n'ont finalement pas été concluants. Les deux parties sont convenues de se retrouver le 20 novembre. John Kerry, qui avait suspendu vendredi sa tournée au Proche-Orient pour mettre son poids dans les négociations à Genève, a relativisé lundi l'absence d'accord provisoire, qui porterait sur une réduction ou un gel de certaines activités iraniennes en échange d'un allègement progressif et temporaire des sanctions internationales contre Téhéran. "Il ne s'agit pas d'une course pour parvenir à n'importe quel accord", a souligné le secrétaire d'Etat américain, en visite aux Emirats arabes unis, évoquant une "responsabilité absolue" de rechercher une solution par la voie diplomatique. John Kerry a assuré que le groupe P5+1 était "uni samedi lorsque nous avons soumis une proposition aux Iraniens, et les Français l'ont signée, nous l'avons signée et tout le monde convenait que c'était une proposition équitable". Comment la France a bloqué l'accord... Depuis la relance des pourparlers sur le nucléaire iranien à la mi-octobre, autant Washington que Téhéran sont pressés de parvenir à un accord : le président Barack Obama, dont l'autorité au Moyen-Orient a été écornée depuis sa volte-face sur les frappes militaires contre le régime syrien de Bachar Al-Assad, est avide d'un succès diplomatique dans la région, qui aurait également des retombées majeures sur les conflits qui déstabilisent le Proche-Orient, à commencer par la Syrie, principal allié régional de Téhéran. Quant au président iranien, Hassan Rohani, il sait que sa légitimité repose sur sa capacité à obtenir une levée, au moins partielle mais rapide, des sanctions qui étranglent l'économie iranienne. Ce faisceau d'intérêts convergents, ajouté à une certaine fatigue face à des négociations enlisées depuis dix ans, a poussé les Américains et les Iraniens à accélérer la recherche d'un compromis, dont les termes précis ne sont toutefois pas connus. Mais ils ont suffisamment inquiété la France, indiquent nos sources, pour la pousser à sortir du bois et à rompre le silence observé par les délégations depuis le lancement des négociations, le 15 octobre, à Genève. Depuis deux semaines, aucune "fuite" n'était venue perturber les discussions. Une règle jusque-là jugée indispensable pour maintenir la confiance entre les pays participants, tant la moindre rumeur aurait été immédiatement exploitée par les adversaires d'un accord, à commencer par les ultraconservateurs iraniens, désireux de fragiliser M. Rohani. Dans un premier temps, l'annonce surprise de l'arrivée, vendredi 8 novembre, à Genève, de Laurent Fabius, le ministre français des affaires étrangères, et de son homologue américain, John Kerry, a été perçue comme le signe annonciateur de l'imminence d'un accord. D'autant qu'ils ont aussitôt été rejoints par les chefs de la diplomatie britannique et allemand, accourus à la hâte en Suisse. Une impression renforcée lorsque les négociations ont été prolongées pour permettre la venue des Russes et des Chinois, arrivés samedi. Une telle mobilisation laissait supposer que les discussions avançaient et qu'un accord était dans les tuyaux. C'était sans compter sur la détermination des Français, inquiets de la précipitation des Américains. Ils jugent, au contraire, que le moment est propice pour exiger le maximum de garanties aux Iraniens, tant ils sont en demande de gestes du fait de l'impact des sanctions et aussi à cause du capital politique investi dans ces négociations par le président Rohani. Dès que le Quai d'Orsay apprend, jeudi, que John Kerry a l'intention de se rendre le lendemain à Genève, alors que la réunion devait initialement se dérouler entre directeurs politiques, Laurent Fabius bouscule son agenda et atterrit, vendredi en fin de matinée, à Genève, avant Kerry. A peine arrivé, il fait tout de suite une brève déclaration : "Nous voulons un accord qui soit une première réponse solide aux inquiétudes liées au nucléaire iranien. Il y a des avancées, mais rien n'est encore acquis." Le choix des mots est pesé. La tonalité ouvertement dubitative tranche avec la "musique" diffusée depuis la veille. Toutefois, l'excitation provoquée par le débarquement précipité d'une nuée de ministres des affaires étrangères relègue les propos de M. Fabius au second plan. Mais dès le lendemain matin, il sera plus explicite et beaucoup plus entendu. Au moment même où les pourparlers reprennent, Laurent Fabius affiche clairement son scepticisme lors d'un entretien sur France Inter. Le doute n'était alors plus permis. Il s'agissait bien d'une stratégie offensive. "Il y a des bastonnades", a concédé, non sans satisfaction, un diplomate français car, a-t-il insisté, "on veut éviter l'euphorie du verre à moitié plein". "Jeux à somme nulle et mentalité de la guerre froide" Les propos de Laurent Fabius, immédiatement relayés par les agences de presse, électrisent les couloirs de l'hôtel Intercontinental où sont retranchées les délégations qui mènent des consultations tous azimuts. C'est la première fois que des points précis de l'accord sont exposés au grand jour. Il n'est désormais plus question que du "blocage" français dans les conversations. La réaction ne se fait pas attendre. En fin de matinée, un membre de l'entourage de John Kerry lâche cette phrase assassine à des journalistes : "Les Américains, l'Union européenne et les Iraniens travaillent intensément ensemble depuis plusieurs mois sur cette proposition et ceci n'est rien d'autre qu'une tentative de M. Fabius de se montrer pertinent à un stade tardif dans les négociations. " La charge est aussi violente qu'inhabituelle à ce niveau. Une autre source américaine a confirmé au Monde que l'entourage de M. Kerry était "furieux" après les déclarations de Fabius. Le chef de la diplomatie française a ensuite récidivé à deux reprises, peu avant le déjeuner et à l'issue de la séance plénière, aux premières heures de dimanche, avec des déclarations à chaque fois tranchantes. Les propos de Laurent Fabius ont été d'autant plus remarqués qu'il a été le seul, pendant la journée, à s'exprimer publiquement à plusieurs reprises et à contre-courant, marquant ainsi clairement sa différence. De Téhéran, le président Rohani se répand sur Twitter : "Ne vous y trompez pas, écrit-il, les jeux à somme nulle, la mentalité de la guerre froide, tout cela conduit à ce que tout le monde perde." Mais rien n'y fait, l'accord semble être sorti de ses rails. Les "bastonnades" reprendront le 20 novembre à Genève, lors de la poursuite des négociations.