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La Casbah, un haut lieu de culture et d'histoire
Un flux touristique «appréciable» enregistré en 2006
Publié dans Le Midi Libre le 03 - 07 - 2007

La Casbah antique est toujours là, présente et imposante, où chaque coin et recoin relatent par parcelles des histoires aussi impressionnantes que réelles du vieil Alger.
La Casbah antique est toujours là, présente et imposante, où chaque coin et recoin relatent par parcelles des histoires aussi impressionnantes que réelles du vieil Alger.
L‘éternelle Casbah se dresse toujours en signe de défiance aux années, aux intempéries et aux «attaques» de l‘homme, qui l‘agresse au quotidien.
La Casbah antique est toujours là, présente et imposante, où chaque coin et recoin relatent par parcelles des histoires aussi impressionnantes que réelles du vieil Alger. La Casbah ne raconte pas seulement Hassiba Ben Bouali et Ali La Pointe, elle raconte aussi ses vieilles et ses vieux gardiens d‘une mémoire.
Avec ses rues, venelles et ses maisons qui tournent le dos à la recherche d‘intimité en s‘ouvrant vers le ciel, témoins du passage des Ottomans, son atmosphère typiquement méditerranéenne, la Casbah vous accueille à bras ouverts avec son hospitalité séculaire. Cris de bambins, échos de voix de Casbadjis, murs décrépis sont autant d‘ingrédients qui constituent le décor de ce vieux quartier algérois.
Malgré tout le temps qui s‘est écoulé, la vieille médina a su garder un air mystérieux qui l‘a préservée de la charge des ans. Les douérate de la Casbah sont accolées les unes aux autres pour former ce qui ressemblerait à une cascade. De loin, cette vieille ville nous donne l‘impression de revivre des moments figés par le temps, de ressentir des sensations déjà éprouvées.
Nostalgie, charme et magie
Cette cité renferme entre ses murs des événements historiques, des aventures légendaires et des mythes qui ont survécu au temps. Les habitants de cette citadelle sont réputés pour leur savoir-vivre, leur langage symbolique et figuratif et leur générosité.
Dans ce contexte, le voyageur et le géographe Léon l‘Africain, alias El-Hassan El-Wazzâni, avait décrit la Casbah, après un de ses voyages à Alger entre 1510 et 1517 : «Elle est très grande. Ses murailles sont splendides et extrêmement fortes, construites en grosses pierres. Elle possède de belles maisons et des marchés bien ordonnés dans lesquels chaque profession a son emplacement particulier. On y trouve aussi bon nombre d‘hôtelleries et d‘étuves (hammams). Entre autres édifices, on y remarque un superbe temple (El-Djamaâ El-Kebir), très grand, placé sur le bord de la mer, et devant ce temple, une très belle esplanade aménagée sur la muraille même de la ville, au pied de laquelle viennent frapper les vagues.»
La Casbah donne une idée de la permanence de l‘architecture, de sa beauté, de sa gracieuse et fonctionnelle harmonie.
Sur un ton amer et l‘air pensif, une dame native de cette cité laisse libre cours à ses pensées : «Je suis née à la Casbah, mon père et ma mère en sont également originaires. Je me souviens du temps où il faisait réellement bon vivre et où il régnait un climat de bon voisinage. La Casbah, même si elle garde toujours son air mystérieux, a beaucoup perdu de son charme et de sa magie. Ce n‘est plus comme avant.»
La nostalgie ressentie dans les propos de cette sexagénaire enlève le voile sur un quotidien âcre des habitants. «Ce n‘est plus comme avant», une phrase qui résume le vécu des citoyens de cette ville durant plus d‘une décade. Une décennie marquée par la cruauté des «enfants» de Béni-Mezghenna. Des «enfants» ingrats qui ont voulu ternir l‘image de cette ville ottomane.
Hocine Flicha, Moh Jetta, Yacine Napoli et bien d‘autres noms tristement célèbres ont essayé, avec haine et rancune, de mettre à bas ce que d‘autres ont édifié avec amour et passion.
Les habitants de ce quartier populaire et populeux se souviennent encore des atrocités de la décennie noire.
Durant cette période de l‘avènement du terrorisme en Algérie, les jeunes, notamment, ont souffert le martyre. Ils étaient pris entre le marteau et l‘enclume. Le contact avec les jeunes de ce vieux quartier algérois n‘était pas facile à établir. Ils se sont confinés dans un silence de muets. Il nous a fallu beaucoup d‘insistance et d‘énergie pour que les langues se délient.
«Qu‘est-ce que vous voulez qu‘on vous dise ? On a vécu, d‘ailleurs comme dans toutes les villes et villages d‘Algérie, des moments difficiles et atroces. Personne n‘a été épargné. Les jeunes ont été pris dans un étau. Ils avaient peur d‘être enrôlés de force dans les rangs des terroristes. Rares ceux qui sont restés ici. Certains ont préféré être internés dans un hôpital psychiatrique que de vivre à la Casbah. Les plus chanceux ont trouvé «refuge» sous d‘autres cieux», nous confie Aziz, un chômeur de 33 ans.
Redorer le blason
Mais ce temps-là semble révolu, selon les dires et témoignages des habitants.
Aujourd‘hui, la Casbah a commencé à retrouver quelque peu son image d‘antan. Elle est redevenue «La Mecque» des touristes étrangers.
Les rues et ruelles de la Casbah antique ont retrouvé un «mouvement» qu‘elle a cru perdu à jamais.
La haute Casbah, ou Sidi-Ramdane, une partie qui a connu des opérations de restauration, est sortie de son hibernation forcée.
Durant la saison estivale 2005/2006, chaque jour, des dizaines de touristes, français, italiens et espagnols visitaient ce musée grandeur nature.
«La Casbah est un patrimoine culturel et architectural. Alger est un haut lieu de culture et d‘histoire», s‘est accordé à dire un groupe de touristes français.
Dans ce sillage, un couple italien nous a déclaré : «Nous avons été motivés pour visiter Alger et particulièrement la Casbah, après avoir vu le film la Bataille d‘Alger. Nous avions cru que la Casbah était le fruit de l‘imagination du réalisateur et qu‘il ne s‘agissait que d‘un décor réalisé pour les besoins du tournage. Mais après avoir visité virtuellement, via internet, Alger, nous nous sommes rendus compte que la Casbah existe réellement. Cette visite nous a permis de découvrir des traditions nouvelles, notamment culinaires, et de découvrir la générosité et l‘hospitalité de tout un peuple.»
«Je suis ébloui par la beauté de cette cité. C‘est une aquarelle aux couleurs naturelles.» Ce regain a eu des répercussions positives sur les commerçants et artisans de cette région.
«Après un passage à vide qui a duré des années, mes articles artisanaux commencent à trouver preneur», indique un sculpteur sur cuivre.
«Actuellement, je vends en moyenne cinquante pièces par semaine. Avant, je n‘en vendais que cinq», a-t-il poursuivi.
Dans une chambre exiguë, d‘environ quatre mètres sur trois, Ammi Ali passe le plus clair de son temps à confectionner de petites merveilles qui ont fait le bonheur de plus d‘un gosse. «J‘exerce ce métier depuis maintenant presque trente-cinq ans. Mes mains refusent de faire autre chose que de fabriquer des jouets.» Notre «magicien moderne» ne craint pas la concurrence. Il estime que les jouets fabriqués en usine n‘ont pas d‘«âme». «Mes poupées sont fabriquées avec amour. Chaque pièce est façonnée avec sueur et affection.»
Cependant, il regrette que le marché soit inondé de jouets en plastique. Il regrette également que le flambeau ne sera pas repris par l‘un de ses enfants.
«J‘ai quatre garçons et cinq filles. Aucun n‘a voulu hériter de ce métier. Ils estiment que ce n‘est pas un métier d‘avenir. Les garçons se sont lancés dans un autre créneau qu‘ils estiment porteur : le trabendo.»
Avec désolation, il a tenté de justifier l‘attitude de ses enfants. «Les jeunes d‘aujourd‘hui sont impatients pas comme notre génération. Nous, nous avons appris à cultiver la patience. Eux, ils veulent gagner gros et rapidement.»
A la fin de notre rencontre, nous nous étions replongés dans une époque de notre tendre enfance. Une époque que nous avions cru oublier. Une seule chose nous revenait à l‘esprit : une note de gaieté dans un monde de haine.
Selon des rapports de la Direction du tourisme, la Casbah enregistrait, durant les années 1980, entre 300 et 500 touristes quotidiennement. Durant la saison estivale 2005/2006, l‘eau a commencé à reprendre son cours. Il a été dénombré entre 100 et 300 touristes dans cette cité.
Notons également qu‘un rapport de la Chambre française du commerce et de l‘industrie a révélé que pour l‘année 2006, 40.000 pieds-noirs se sont rendus en Algérie, dont la moitié a visité la Casbah.
Des métiers qui ont survécu au temps
En traversant ses «z‘nikat» sinueuses, le commun des mortels remarquera que la cité séculaire a pu sauvegarder les métiers qui s‘y sont développés au fil des années. Les Casbadjis ont essayé vaille que vaille de les préserver des effets du temps et de la modernité. Hérités de père en fils ou de mère en fille, les métiers les plus répandus sont la broderie sur soie ou sur le velours pour les femmes. Des métiers qui ne sont, d‘ailleurs, pas leur apanage. Quant aux professions masculines, ce sont la finesse et la méticulosité qui les caractérisent.
Les hommes passent pour des maîtres dans l‘ébénisterie, la sculpture sur le cuivre.
La Casbah a ce pouvoir de donner l‘impression que rien n‘a bougé, que le temps est figé. En pénétrant ses maisons, une émotion drôle nous a envahis. Un sentiment bizarre nous a gagnés, une certitude d‘avoir déjà vécu ces moments et que cet endroit nous est familier. Les maisons de la Casbah sont conçues de manière à préserver l‘intimité de la famille.
Le patio, un espace
de convivialité
Au milieu de chaque «douira» se trouve un «wast eddar» (patio), qui a plus un rôle socioculturel que décoratif, nous explique une enseignante à l‘Université des sciences de l‘information et de la communication, qui a réalisé une étude sur l‘urbanisme comme un moyen de communication.
Au centre de cet espace convivial se dresse, généralement, comme une reine, une petite vasque ou un jet d‘eau.
Tout autour du patio se trouvent les chambres. De petites pièces sombres avec des petites fenêtres qui permettent aux rayons du soleil de pénétrer. Les murs intérieurs du patio sont revêtus de faïence décorés de motifs floraux. Ces «douérate» sont composées de deux étages et un «menzah» (terrasse). Jadis, une douéra était occupée par une seule famille, alors qu‘actuellement chaque maison est occupée par plusieurs familles, qui dans la majorité écrasante des cas, n‘ont aucun lien de parenté.
Ce changement est dû, principalement, à l‘exode rural qu‘a connu la capitale notamment au début des années 1970 et la crise de logement que connaît l‘Algérie.
Un autre élément révélateur du rang social du propriétaire de la douéra est incontestablement la nature et le volume des sculptures des portes d‘entrée. «Lorsque la porte d‘entrée est entièrement sculptée, cela est interprété comme un signe de l‘appartenance du maître de la maison à un rang social élevé», précise cette
universitaire.
Selon les us et coutumes, les gens aisés doivent posséder une banquette couverte de marbre devant l‘entrée de leur maison. Elle permettra aux visiteurs, des hommes bien sûr, d‘attendre le retour du chef de la maison. Certaines familles payent, aussi, un serviteur pour garder l‘entrée.
Toutefois, il est indispensable de signaler que la Casbah a perdu une partie de son aspect architectural. Certaines transformations ont été introduites dans ses maisons. Des portes en bois sculpté ont cédé la place aux portes en fer. Les pots de fleurs, qui ornaient les petites fenêtres, ont disparu pour être remplacés par des barreaux en acier. «Les maisons «souffrent» de vétusté. Ce changement s‘est opéré essentiellement durant la période des attaques terroristes. Même chez nous, nous n‘étions pas en sécurité», nous dit un vieux du quartier.
La Casbah, la charmeuse, continue, en dépit du poids des années, d‘émerveiller par la simplicité de son style et la grandeur de son histoire.
L‘éternelle Casbah se dresse toujours en signe de défiance aux années, aux intempéries et aux «attaques» de l‘homme, qui l‘agresse au quotidien.
La Casbah antique est toujours là, présente et imposante, où chaque coin et recoin relatent par parcelles des histoires aussi impressionnantes que réelles du vieil Alger. La Casbah ne raconte pas seulement Hassiba Ben Bouali et Ali La Pointe, elle raconte aussi ses vieilles et ses vieux gardiens d‘une mémoire.
Avec ses rues, venelles et ses maisons qui tournent le dos à la recherche d‘intimité en s‘ouvrant vers le ciel, témoins du passage des Ottomans, son atmosphère typiquement méditerranéenne, la Casbah vous accueille à bras ouverts avec son hospitalité séculaire. Cris de bambins, échos de voix de Casbadjis, murs décrépis sont autant d‘ingrédients qui constituent le décor de ce vieux quartier algérois.
Malgré tout le temps qui s‘est écoulé, la vieille médina a su garder un air mystérieux qui l‘a préservée de la charge des ans. Les douérate de la Casbah sont accolées les unes aux autres pour former ce qui ressemblerait à une cascade. De loin, cette vieille ville nous donne l‘impression de revivre des moments figés par le temps, de ressentir des sensations déjà éprouvées.
Nostalgie, charme et magie
Cette cité renferme entre ses murs des événements historiques, des aventures légendaires et des mythes qui ont survécu au temps. Les habitants de cette citadelle sont réputés pour leur savoir-vivre, leur langage symbolique et figuratif et leur générosité.
Dans ce contexte, le voyageur et le géographe Léon l‘Africain, alias El-Hassan El-Wazzâni, avait décrit la Casbah, après un de ses voyages à Alger entre 1510 et 1517 : «Elle est très grande. Ses murailles sont splendides et extrêmement fortes, construites en grosses pierres. Elle possède de belles maisons et des marchés bien ordonnés dans lesquels chaque profession a son emplacement particulier. On y trouve aussi bon nombre d‘hôtelleries et d‘étuves (hammams). Entre autres édifices, on y remarque un superbe temple (El-Djamaâ El-Kebir), très grand, placé sur le bord de la mer, et devant ce temple, une très belle esplanade aménagée sur la muraille même de la ville, au pied de laquelle viennent frapper les vagues.»
La Casbah donne une idée de la permanence de l‘architecture, de sa beauté, de sa gracieuse et fonctionnelle harmonie.
Sur un ton amer et l‘air pensif, une dame native de cette cité laisse libre cours à ses pensées : «Je suis née à la Casbah, mon père et ma mère en sont également originaires. Je me souviens du temps où il faisait réellement bon vivre et où il régnait un climat de bon voisinage. La Casbah, même si elle garde toujours son air mystérieux, a beaucoup perdu de son charme et de sa magie. Ce n‘est plus comme avant.»
La nostalgie ressentie dans les propos de cette sexagénaire enlève le voile sur un quotidien âcre des habitants. «Ce n‘est plus comme avant», une phrase qui résume le vécu des citoyens de cette ville durant plus d‘une décade. Une décennie marquée par la cruauté des «enfants» de Béni-Mezghenna. Des «enfants» ingrats qui ont voulu ternir l‘image de cette ville ottomane.
Hocine Flicha, Moh Jetta, Yacine Napoli et bien d‘autres noms tristement célèbres ont essayé, avec haine et rancune, de mettre à bas ce que d‘autres ont édifié avec amour et passion.
Les habitants de ce quartier populaire et populeux se souviennent encore des atrocités de la décennie noire.
Durant cette période de l‘avènement du terrorisme en Algérie, les jeunes, notamment, ont souffert le martyre. Ils étaient pris entre le marteau et l‘enclume. Le contact avec les jeunes de ce vieux quartier algérois n‘était pas facile à établir. Ils se sont confinés dans un silence de muets. Il nous a fallu beaucoup d‘insistance et d‘énergie pour que les langues se délient.
«Qu‘est-ce que vous voulez qu‘on vous dise ? On a vécu, d‘ailleurs comme dans toutes les villes et villages d‘Algérie, des moments difficiles et atroces. Personne n‘a été épargné. Les jeunes ont été pris dans un étau. Ils avaient peur d‘être enrôlés de force dans les rangs des terroristes. Rares ceux qui sont restés ici. Certains ont préféré être internés dans un hôpital psychiatrique que de vivre à la Casbah. Les plus chanceux ont trouvé «refuge» sous d‘autres cieux», nous confie Aziz, un chômeur de 33 ans.
Redorer le blason
Mais ce temps-là semble révolu, selon les dires et témoignages des habitants.
Aujourd‘hui, la Casbah a commencé à retrouver quelque peu son image d‘antan. Elle est redevenue «La Mecque» des touristes étrangers.
Les rues et ruelles de la Casbah antique ont retrouvé un «mouvement» qu‘elle a cru perdu à jamais.
La haute Casbah, ou Sidi-Ramdane, une partie qui a connu des opérations de restauration, est sortie de son hibernation forcée.
Durant la saison estivale 2005/2006, chaque jour, des dizaines de touristes, français, italiens et espagnols visitaient ce musée grandeur nature.
«La Casbah est un patrimoine culturel et architectural. Alger est un haut lieu de culture et d‘histoire», s‘est accordé à dire un groupe de touristes français.
Dans ce sillage, un couple italien nous a déclaré : «Nous avons été motivés pour visiter Alger et particulièrement la Casbah, après avoir vu le film la Bataille d‘Alger. Nous avions cru que la Casbah était le fruit de l‘imagination du réalisateur et qu‘il ne s‘agissait que d‘un décor réalisé pour les besoins du tournage. Mais après avoir visité virtuellement, via internet, Alger, nous nous sommes rendus compte que la Casbah existe réellement. Cette visite nous a permis de découvrir des traditions nouvelles, notamment culinaires, et de découvrir la générosité et l‘hospitalité de tout un peuple.»
«Je suis ébloui par la beauté de cette cité. C‘est une aquarelle aux couleurs naturelles.» Ce regain a eu des répercussions positives sur les commerçants et artisans de cette région.
«Après un passage à vide qui a duré des années, mes articles artisanaux commencent à trouver preneur», indique un sculpteur sur cuivre.
«Actuellement, je vends en moyenne cinquante pièces par semaine. Avant, je n‘en vendais que cinq», a-t-il poursuivi.
Dans une chambre exiguë, d‘environ quatre mètres sur trois, Ammi Ali passe le plus clair de son temps à confectionner de petites merveilles qui ont fait le bonheur de plus d‘un gosse. «J‘exerce ce métier depuis maintenant presque trente-cinq ans. Mes mains refusent de faire autre chose que de fabriquer des jouets.» Notre «magicien moderne» ne craint pas la concurrence. Il estime que les jouets fabriqués en usine n‘ont pas d‘«âme». «Mes poupées sont fabriquées avec amour. Chaque pièce est façonnée avec sueur et affection.»
Cependant, il regrette que le marché soit inondé de jouets en plastique. Il regrette également que le flambeau ne sera pas repris par l‘un de ses enfants.
«J‘ai quatre garçons et cinq filles. Aucun n‘a voulu hériter de ce métier. Ils estiment que ce n‘est pas un métier d‘avenir. Les garçons se sont lancés dans un autre créneau qu‘ils estiment porteur : le trabendo.»
Avec désolation, il a tenté de justifier l‘attitude de ses enfants. «Les jeunes d‘aujourd‘hui sont impatients pas comme notre génération. Nous, nous avons appris à cultiver la patience. Eux, ils veulent gagner gros et rapidement.»
A la fin de notre rencontre, nous nous étions replongés dans une époque de notre tendre enfance. Une époque que nous avions cru oublier. Une seule chose nous revenait à l‘esprit : une note de gaieté dans un monde de haine.
Selon des rapports de la Direction du tourisme, la Casbah enregistrait, durant les années 1980, entre 300 et 500 touristes quotidiennement. Durant la saison estivale 2005/2006, l‘eau a commencé à reprendre son cours. Il a été dénombré entre 100 et 300 touristes dans cette cité.
Notons également qu‘un rapport de la Chambre française du commerce et de l‘industrie a révélé que pour l‘année 2006, 40.000 pieds-noirs se sont rendus en Algérie, dont la moitié a visité la Casbah.
Des métiers qui ont survécu au temps
En traversant ses «z‘nikat» sinueuses, le commun des mortels remarquera que la cité séculaire a pu sauvegarder les métiers qui s‘y sont développés au fil des années. Les Casbadjis ont essayé vaille que vaille de les préserver des effets du temps et de la modernité. Hérités de père en fils ou de mère en fille, les métiers les plus répandus sont la broderie sur soie ou sur le velours pour les femmes. Des métiers qui ne sont, d‘ailleurs, pas leur apanage. Quant aux professions masculines, ce sont la finesse et la méticulosité qui les caractérisent.
Les hommes passent pour des maîtres dans l‘ébénisterie, la sculpture sur le cuivre.
La Casbah a ce pouvoir de donner l‘impression que rien n‘a bougé, que le temps est figé. En pénétrant ses maisons, une émotion drôle nous a envahis. Un sentiment bizarre nous a gagnés, une certitude d‘avoir déjà vécu ces moments et que cet endroit nous est familier. Les maisons de la Casbah sont conçues de manière à préserver l‘intimité de la famille.
Le patio, un espace
de convivialité
Au milieu de chaque «douira» se trouve un «wast eddar» (patio), qui a plus un rôle socioculturel que décoratif, nous explique une enseignante à l‘Université des sciences de l‘information et de la communication, qui a réalisé une étude sur l‘urbanisme comme un moyen de communication.
Au centre de cet espace convivial se dresse, généralement, comme une reine, une petite vasque ou un jet d‘eau.
Tout autour du patio se trouvent les chambres. De petites pièces sombres avec des petites fenêtres qui permettent aux rayons du soleil de pénétrer. Les murs intérieurs du patio sont revêtus de faïence décorés de motifs floraux. Ces «douérate» sont composées de deux étages et un «menzah» (terrasse). Jadis, une douéra était occupée par une seule famille, alors qu‘actuellement chaque maison est occupée par plusieurs familles, qui dans la majorité écrasante des cas, n‘ont aucun lien de parenté.
Ce changement est dû, principalement, à l‘exode rural qu‘a connu la capitale notamment au début des années 1970 et la crise de logement que connaît l‘Algérie.
Un autre élément révélateur du rang social du propriétaire de la douéra est incontestablement la nature et le volume des sculptures des portes d‘entrée. «Lorsque la porte d‘entrée est entièrement sculptée, cela est interprété comme un signe de l‘appartenance du maître de la maison à un rang social élevé», précise cette
universitaire.
Selon les us et coutumes, les gens aisés doivent posséder une banquette couverte de marbre devant l‘entrée de leur maison. Elle permettra aux visiteurs, des hommes bien sûr, d‘attendre le retour du chef de la maison. Certaines familles payent, aussi, un serviteur pour garder l‘entrée.
Toutefois, il est indispensable de signaler que la Casbah a perdu une partie de son aspect architectural. Certaines transformations ont été introduites dans ses maisons. Des portes en bois sculpté ont cédé la place aux portes en fer. Les pots de fleurs, qui ornaient les petites fenêtres, ont disparu pour être remplacés par des barreaux en acier. «Les maisons «souffrent» de vétusté. Ce changement s‘est opéré essentiellement durant la période des attaques terroristes. Même chez nous, nous n‘étions pas en sécurité», nous dit un vieux du quartier.
La Casbah, la charmeuse, continue, en dépit du poids des années, d‘émerveiller par la simplicité de son style et la grandeur de son histoire.


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