Ahmed Cheniki est un intellectuel algérien qui place le questionnement au cœur de tous ses écrits. Ces interrogations reposent sur une démarche, disons archéologique, du théâtre arabe par exemple, dont il met à plat la genèse et les emprunts; une manière de séparer le bon grain de l'ivraie. Ahmed Cheniki est un intellectuel algérien qui place le questionnement au cœur de tous ses écrits. Ces interrogations reposent sur une démarche, disons archéologique, du théâtre arabe par exemple, dont il met à plat la genèse et les emprunts; une manière de séparer le bon grain de l'ivraie. Sa thèse de doctorat a porté sur «Le théâtre en Algérie, histoire et enjeux» suivie de «Vérités du théâtre en Algérie». Ces travaux ont acquis le statut d'ouvrages vivants sur cet objet d'études. Familier des théories qui embrassent aussi bien le fond et la forme que de ceux qui les énoncent ou les traduisent sur scène, il est donc de tous les festivals du 4e art, chercheur d'or et de talents. Les organisateurs du 12e Salon International du Livre d'Alger (www.sila.dz) l'ont sollicité pour une conférence qui met en jeu la relation du monde arabe avec l'Occident, relation pleine de bruit et de fureur. En tant qu'intellectuel et chercheur, Ahmed Cheniki a parfois des mots durs et une exigence qui dépassent les aspects conjoncturels d'une manifestation. Le Midi libre : Vous allez intervenir sur un sujet singulier mettant en relation élites, Nahda, mouvement de traduction et altérité. Qu'en est-il au juste ? Ahmed Cheniki : Il faut savoir qu'on ne peut comprendre la situation du monde arabe qu'à l'aune de l'européanisation, imposée ou consentie, des élites par l'adoption des formes de représentation «occidentales» au 19e siècle au Machrek (Nahda ou Renaissance) ou par la violence tragique avec la colonisation au Maghreb. Ainsi, va s'opérer une sorte de représentation syncrétique menant à une situation schizophrénique, ambivalente, mettant face à face deux entités, les élites et les sociétés profondes. C'est cette douloureuse réalité, génitrice de graves violences et de très dangereux malentendus, qui marque aujourd'hui les lieux paradoxaux d'une césure profonde et d'une grave blessure investissant toutes les sociétés arabes où l'altérité est vécue comme un espace minorant et péjorant, sinon, hostile. C'est autour de ces idées que s'articule ma réflexion. Que pensez-vous du thème générique du salon ? Oui, il me parait intéressant, mais à condition qu'on ne tombe pas dans le travers des discours officiels comme c'est le cas de la ronronnante et tragique année de la culture arabe. Il est temps d'interroger en profondeur la réalité des élites et des sociétés arabes en dehors de schémas préétablis et de regards chloroformés de certains intellectuels, fonctionnant comme les supports essentiels d'une stérilisation de la pensée et les espaces privilégiés des pouvoirs en place. Ce serait bon d'inviter des intellectuels non conformistes, c'est-à-dire nourris d'un regard et d'un discours critique. La présence de Mohamed Arkoun par exemple est rassurante. Comment appréciez-vous l'absence du théâtre ? Je crois que dans ce salon, et c'est tout à fait normal, on trouvera sur les étals des livres sur le théâtre, comme d'ailleurs des ouvrages abordant d'autres arts comme le cinéma, la peinture, la musique… Mais c'est une bonne chose que les organisateurs n'ont pas confondu théâtre et littérature comme semblent tragiquement le faire le TNA et Alger, capitale de la culture arabe qui méconnaissent gravement la distinction entre deux disciplines différentes, le théâtre et la littérature qui ont chacune ses spécificités. On place à la tête du jury du festival du théâtre des littéraires et on constitue un jury pour un prix de théâtre, trop inutile, des hommes de lettres où les spécialistes du théâtre sont absents. Sa thèse de doctorat a porté sur «Le théâtre en Algérie, histoire et enjeux» suivie de «Vérités du théâtre en Algérie». Ces travaux ont acquis le statut d'ouvrages vivants sur cet objet d'études. Familier des théories qui embrassent aussi bien le fond et la forme que de ceux qui les énoncent ou les traduisent sur scène, il est donc de tous les festivals du 4e art, chercheur d'or et de talents. Les organisateurs du 12e Salon International du Livre d'Alger (www.sila.dz) l'ont sollicité pour une conférence qui met en jeu la relation du monde arabe avec l'Occident, relation pleine de bruit et de fureur. En tant qu'intellectuel et chercheur, Ahmed Cheniki a parfois des mots durs et une exigence qui dépassent les aspects conjoncturels d'une manifestation. Le Midi libre : Vous allez intervenir sur un sujet singulier mettant en relation élites, Nahda, mouvement de traduction et altérité. Qu'en est-il au juste ? Ahmed Cheniki : Il faut savoir qu'on ne peut comprendre la situation du monde arabe qu'à l'aune de l'européanisation, imposée ou consentie, des élites par l'adoption des formes de représentation «occidentales» au 19e siècle au Machrek (Nahda ou Renaissance) ou par la violence tragique avec la colonisation au Maghreb. Ainsi, va s'opérer une sorte de représentation syncrétique menant à une situation schizophrénique, ambivalente, mettant face à face deux entités, les élites et les sociétés profondes. C'est cette douloureuse réalité, génitrice de graves violences et de très dangereux malentendus, qui marque aujourd'hui les lieux paradoxaux d'une césure profonde et d'une grave blessure investissant toutes les sociétés arabes où l'altérité est vécue comme un espace minorant et péjorant, sinon, hostile. C'est autour de ces idées que s'articule ma réflexion. Que pensez-vous du thème générique du salon ? Oui, il me parait intéressant, mais à condition qu'on ne tombe pas dans le travers des discours officiels comme c'est le cas de la ronronnante et tragique année de la culture arabe. Il est temps d'interroger en profondeur la réalité des élites et des sociétés arabes en dehors de schémas préétablis et de regards chloroformés de certains intellectuels, fonctionnant comme les supports essentiels d'une stérilisation de la pensée et les espaces privilégiés des pouvoirs en place. Ce serait bon d'inviter des intellectuels non conformistes, c'est-à-dire nourris d'un regard et d'un discours critique. La présence de Mohamed Arkoun par exemple est rassurante. Comment appréciez-vous l'absence du théâtre ? Je crois que dans ce salon, et c'est tout à fait normal, on trouvera sur les étals des livres sur le théâtre, comme d'ailleurs des ouvrages abordant d'autres arts comme le cinéma, la peinture, la musique… Mais c'est une bonne chose que les organisateurs n'ont pas confondu théâtre et littérature comme semblent tragiquement le faire le TNA et Alger, capitale de la culture arabe qui méconnaissent gravement la distinction entre deux disciplines différentes, le théâtre et la littérature qui ont chacune ses spécificités. On place à la tête du jury du festival du théâtre des littéraires et on constitue un jury pour un prix de théâtre, trop inutile, des hommes de lettres où les spécialistes du théâtre sont absents.