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Un rôle à redéfinir
MISSION DES COLLECTIVITES LOCALES
Publié dans Le Midi Libre le 02 - 12 - 2007

Le développement économique et social est peut-être une affaire de spécialistes, mais il requiert également une participation active et efficace des élus locaux, en premier lieu du maire. C'est le président d'APC qui doit animer la vie collective au sein de la commune.
Le développement économique et social est peut-être une affaire de spécialistes, mais il requiert également une participation active et efficace des élus locaux, en premier lieu du maire. C'est le président d'APC qui doit animer la vie collective au sein de la commune.
Le mauvais temps est venu mettre son grain de sel dans la campagne électorale et ce jusqu'au jour du scrutin, mettant à nu une vérité bien amère. Nos élus ne maîtrisent pas encore la gestion de la ville. Les avaloirs bouchés, ayant causé de grands dégâts et des pertes humaines qui auraient pu être évités, sont un aveu d'échec cuisant même si dans le même temps, les candidats ont défilé à la télé et à travers les ondes de la radio nationale toutes chaînes confondues pour promettre monts et merveilles à une population résignée qui ne leur en demande pas tant, mais juste de bien gérer les problèmes de la vie quotidienne. Elle sait surtout, cette population, que les nouveaux élus ne manqueront pas d'oublier leurs promesses, une fois le vote consommé, - comme on dit d'un divorce, tant est grand le fossé séparant la classe politique des préoccupations terre à terre des citoyens -, partant de l'idée que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent.
Le maire est-il l'âme de la commune ?
Empêtrés dans la gestion de problèmes qui les dépassent, et pour lesquels la loi ne leur accorde que peu de prérogatives, les présidents d'APC ont-ils les mains libres pour tracer une politiques agressive, voire ambitieuse, dans les domaines économiques ? On peut prendre l'exemple du tourisme. Pendant longtemps, les APC ont géré certains établissements hôteliers, ou restaurants,de moindre dimension, quelques salles de cinéma, quelques souks el fellah, certaines coopératives de service. Les autres établissements étaient confiés aux wilayas. Mais cette période est bel et bien révolue. On a toujours en mémoire l'épisode des salles de cinéma dont la plupart ont fini par être vendues au privé, non pas pour une meilleure gestion, mais elles furent surtout cédées au dinar symbolique, pour être ensuite détournées de leur vocation première. Il n'y a pratiquement plus de salles de cinéma dignes de ce nom en Algérie. Mis à part l'Algéria, Ibn Zeydoun, le Mouggar, et quelques autres salles qui se comptent sur le doigt d'une seule main. Dans quelques grandes villes du pays, il ne reste pas grand chose des 450 salles héritées de la période coloniale.
Il y a aussi les souks el fellah : les unités furent dissoutes au beau milieu des années 90. Les personnels furent mis au chômage. C'était l'époque où les dissolutions se suivaient à un rythme soutenu, non seulement parce ces unités étaient en faillite de fait, mais comme pour démontrer au monde entier notre volonté de tourner le dos au socialisme. Etait-il possible de faire autrement ? De sauver, comme l'a indiqué M. Temmar, et l'outil de travail et la main d'œuvre ? Cela ne fut pas fait. Ne fut pas tenté. C'était sans doute plus idéologique que politique. A un trop plein d'idéologie populiste, répondait un autre trop plein d'idéologie libérale sauvage cette fois.
Le développement local en question
Le problème principal, c'est qu'aujourd'hui, il n'y a plus d'idéologie du tout. C'est le vide. Les assemblées populaires communales sont livrées à elles-mêmes. Elles n'ont plus aucune emprise sur le terrain. La réalité des choses leur échappe.
Il est temps de redéfinir le rôle et les missions des collectivités locales. Entre l'extrait de naissance et la gestion d'un souk el fellah, ne peut-il pas exister une voie médiane ? Comme cela se passe ailleurs, où le maire est le véritable magistrat municipal. C'est lui le chef de la police, de l'hygiène, de la scolarisation des gosses, de l'état des routes, de la politique du logement, de la vie culturelle, de la santé, et tutti quanti.
En faisant le distinguo entre la gestion de l'état civil et celle des affaires de la cité, on a poussé les maires à n'être que de simples apparitchiks, des prédateurs qui prélèvent leur dîme du budget communal, soit au profit de leur coterie, de leur famille, soit au profit de leurs partis. Et de ce fait, les mairies sont devenues les annexes des partis politiques, d'autant plus que la représentation à la proportionnelle ne donne pas de réels pouvoirs aux maires, et fait d'eux des otages du jeu politicien local. Au lieu d'être les décideurs, ils doivent d'abord avoir l'aval des partis locaux, et ensuite celui du wali, et ainsi de suite.
Par conséquent, on doit admettre que le développement économique et social est peut-être une affaire de spécialistes, mais il requiert également une participation active et efficace des élus locaux, en premier lieu du maire. C'est le président d'APC qui doit animer la vie collective au sein de la commune. Il doit donner une âme à tout ce qui se fait sur son territoire : emploi, culture, logement, hygiène, éclairage public, en un mot, à tout ce qui a trait aux domaines économique, social et culturel. Il est le premier à qui on demande de ne pas adopter la politique de l'autruche :«je ne ai rien vu, je n'ai rien entendu, je n'ai rien à dire».
Certes, on a vu dans un passé assez récent, que le mélange des genres n'avait pas été très heureux ; l'Etat ne peut pas être à la fois épicier, gérer les salles de cinéma, vendre des fruits et légumes au souk el fellah, diriger un hôtel ou un restaurant, manager une cimenterie.
Les deux extrêmes
L'expérience des années 70 jusqu'à la fin des années 80 a montré les limites voire les ratés d'un tel système dans lequel l'Etat joue à l'épicier, au boulanger, au boucher. Mais le contraire est également néfaste. Car un désengagement de l'Etat, notamment par le biais des élus à tous les niveaux (municipalité, wilaya, et pourquoi pas à l'échelle régionale), n'est pas souhaitable. Jouer au Tartuffe en criant : cachez moi ces problèmes sociaux que je ne saurais voir, est une fuite en avant qui a discrédité l'ensemble des institutions de la République.
La conquête des APC par le FIS dissous juste après l'ouverture au pluralisme, en 1990, a conduit à des dépassements qui ont amené les autorités publiques à nommer des DEC, donc des administrateurs, pour gérer les communes. Et aujourd'hui, on oscille toujours entre les deux extrêmes. L'Etat veut garder la main haute sur la gestion pour éviter tout abus, et les candidats, par la voix des partis politiques, voudraient accorder plus de prérogatives aux élus, donc aux maires. Dans la mesure où certains de ces partis, qui sont dans la coalition gouvernementale, et donc au pouvoir, défendent une telle thèse, qu'est-ce qui les empêche de passer à l'action en présentant un projet de révision du code communal accordant plus de prérogatives aux maires ?
La réponse vient de la part des responsables du ministère de l'Intérieur : trop d'élus sont impliqués dans des scandales judiciaires liés au foncier et à l'abus de biens sociaux.
Prérogatives et garde-fous
C'est terrible, n'est-ce pas ? C'est un peu l'histoire du serpent qui se mord la queue. Néanmoins, il est temps de secouer le cocotier. Administrativement, il est possible de tirer les leçons de toutes les erreurs du passé pour rendre aux élus locaux le rôle qui doit être le leur. Pour leur permettre d'être les véritables chevilles ouvrières du développement local à tous les niveaux et dans tous les domaines. Bien sûr, la loi doit prévoir des garde-fous pour donner à la fonction élective toute sa noblesse et toute son efficacité.
Ce que l'on constate aujourd'hui, c'est que les APC sont devenues des coquilles vides, ce qui fait que le peu de parcelle de pouvoir qui reste entre les mains des maires, est utilisé, - pas par tous les maires heureusement ! – à des fins peu honorables.
Que faut-il faire alors ? La meilleure solution serait d'octroyer de véritables prérogatives aux maires, y compris d'être élus au suffrage universel (et pas seulement par leurs pairs au sein du Conseil municipal) et en même temps de prévoir des balises pour empêcher tout abus de biens sociaux et tout détournement de deniers publics. Pourquoi ce qui est valable ailleurs ne peut pas l'être chez nous, en Algérie ?
Par exemple, qu'est-ce qui empêche un leader de parti politique, un Belkhadem, un Ouyahia, un Saïd Sadi, une Louisa Hanoune, un Boudjera Soltani, de briguer une candidature à l'APC ? Si le maire joue vraiment son rôle moteur de développement au sein de sa municipalité, les personnalités qui ont une stature nationale seraient-elles intéressées ? N'est-ce pas que dans les grandes démocraties, la mairie est un tremplin pour occuper de hautes fonctions au sein de l'Etat ? Les exemples sont nombreux, du maire de New York à Ahmadindjad, en passant par Jacques Chirac. Sarkozy lui-même était maire de Neuilly. Alors ?
Le mauvais temps est venu mettre son grain de sel dans la campagne électorale et ce jusqu'au jour du scrutin, mettant à nu une vérité bien amère. Nos élus ne maîtrisent pas encore la gestion de la ville. Les avaloirs bouchés, ayant causé de grands dégâts et des pertes humaines qui auraient pu être évités, sont un aveu d'échec cuisant même si dans le même temps, les candidats ont défilé à la télé et à travers les ondes de la radio nationale toutes chaînes confondues pour promettre monts et merveilles à une population résignée qui ne leur en demande pas tant, mais juste de bien gérer les problèmes de la vie quotidienne. Elle sait surtout, cette population, que les nouveaux élus ne manqueront pas d'oublier leurs promesses, une fois le vote consommé, - comme on dit d'un divorce, tant est grand le fossé séparant la classe politique des préoccupations terre à terre des citoyens -, partant de l'idée que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent.
Le maire est-il l'âme de la commune ?
Empêtrés dans la gestion de problèmes qui les dépassent, et pour lesquels la loi ne leur accorde que peu de prérogatives, les présidents d'APC ont-ils les mains libres pour tracer une politiques agressive, voire ambitieuse, dans les domaines économiques ? On peut prendre l'exemple du tourisme. Pendant longtemps, les APC ont géré certains établissements hôteliers, ou restaurants,de moindre dimension, quelques salles de cinéma, quelques souks el fellah, certaines coopératives de service. Les autres établissements étaient confiés aux wilayas. Mais cette période est bel et bien révolue. On a toujours en mémoire l'épisode des salles de cinéma dont la plupart ont fini par être vendues au privé, non pas pour une meilleure gestion, mais elles furent surtout cédées au dinar symbolique, pour être ensuite détournées de leur vocation première. Il n'y a pratiquement plus de salles de cinéma dignes de ce nom en Algérie. Mis à part l'Algéria, Ibn Zeydoun, le Mouggar, et quelques autres salles qui se comptent sur le doigt d'une seule main. Dans quelques grandes villes du pays, il ne reste pas grand chose des 450 salles héritées de la période coloniale.
Il y a aussi les souks el fellah : les unités furent dissoutes au beau milieu des années 90. Les personnels furent mis au chômage. C'était l'époque où les dissolutions se suivaient à un rythme soutenu, non seulement parce ces unités étaient en faillite de fait, mais comme pour démontrer au monde entier notre volonté de tourner le dos au socialisme. Etait-il possible de faire autrement ? De sauver, comme l'a indiqué M. Temmar, et l'outil de travail et la main d'œuvre ? Cela ne fut pas fait. Ne fut pas tenté. C'était sans doute plus idéologique que politique. A un trop plein d'idéologie populiste, répondait un autre trop plein d'idéologie libérale sauvage cette fois.
Le développement local en question
Le problème principal, c'est qu'aujourd'hui, il n'y a plus d'idéologie du tout. C'est le vide. Les assemblées populaires communales sont livrées à elles-mêmes. Elles n'ont plus aucune emprise sur le terrain. La réalité des choses leur échappe.
Il est temps de redéfinir le rôle et les missions des collectivités locales. Entre l'extrait de naissance et la gestion d'un souk el fellah, ne peut-il pas exister une voie médiane ? Comme cela se passe ailleurs, où le maire est le véritable magistrat municipal. C'est lui le chef de la police, de l'hygiène, de la scolarisation des gosses, de l'état des routes, de la politique du logement, de la vie culturelle, de la santé, et tutti quanti.
En faisant le distinguo entre la gestion de l'état civil et celle des affaires de la cité, on a poussé les maires à n'être que de simples apparitchiks, des prédateurs qui prélèvent leur dîme du budget communal, soit au profit de leur coterie, de leur famille, soit au profit de leurs partis. Et de ce fait, les mairies sont devenues les annexes des partis politiques, d'autant plus que la représentation à la proportionnelle ne donne pas de réels pouvoirs aux maires, et fait d'eux des otages du jeu politicien local. Au lieu d'être les décideurs, ils doivent d'abord avoir l'aval des partis locaux, et ensuite celui du wali, et ainsi de suite.
Par conséquent, on doit admettre que le développement économique et social est peut-être une affaire de spécialistes, mais il requiert également une participation active et efficace des élus locaux, en premier lieu du maire. C'est le président d'APC qui doit animer la vie collective au sein de la commune. Il doit donner une âme à tout ce qui se fait sur son territoire : emploi, culture, logement, hygiène, éclairage public, en un mot, à tout ce qui a trait aux domaines économique, social et culturel. Il est le premier à qui on demande de ne pas adopter la politique de l'autruche :«je ne ai rien vu, je n'ai rien entendu, je n'ai rien à dire».
Certes, on a vu dans un passé assez récent, que le mélange des genres n'avait pas été très heureux ; l'Etat ne peut pas être à la fois épicier, gérer les salles de cinéma, vendre des fruits et légumes au souk el fellah, diriger un hôtel ou un restaurant, manager une cimenterie.
Les deux extrêmes
L'expérience des années 70 jusqu'à la fin des années 80 a montré les limites voire les ratés d'un tel système dans lequel l'Etat joue à l'épicier, au boulanger, au boucher. Mais le contraire est également néfaste. Car un désengagement de l'Etat, notamment par le biais des élus à tous les niveaux (municipalité, wilaya, et pourquoi pas à l'échelle régionale), n'est pas souhaitable. Jouer au Tartuffe en criant : cachez moi ces problèmes sociaux que je ne saurais voir, est une fuite en avant qui a discrédité l'ensemble des institutions de la République.
La conquête des APC par le FIS dissous juste après l'ouverture au pluralisme, en 1990, a conduit à des dépassements qui ont amené les autorités publiques à nommer des DEC, donc des administrateurs, pour gérer les communes. Et aujourd'hui, on oscille toujours entre les deux extrêmes. L'Etat veut garder la main haute sur la gestion pour éviter tout abus, et les candidats, par la voix des partis politiques, voudraient accorder plus de prérogatives aux élus, donc aux maires. Dans la mesure où certains de ces partis, qui sont dans la coalition gouvernementale, et donc au pouvoir, défendent une telle thèse, qu'est-ce qui les empêche de passer à l'action en présentant un projet de révision du code communal accordant plus de prérogatives aux maires ?
La réponse vient de la part des responsables du ministère de l'Intérieur : trop d'élus sont impliqués dans des scandales judiciaires liés au foncier et à l'abus de biens sociaux.
Prérogatives et garde-fous
C'est terrible, n'est-ce pas ? C'est un peu l'histoire du serpent qui se mord la queue. Néanmoins, il est temps de secouer le cocotier. Administrativement, il est possible de tirer les leçons de toutes les erreurs du passé pour rendre aux élus locaux le rôle qui doit être le leur. Pour leur permettre d'être les véritables chevilles ouvrières du développement local à tous les niveaux et dans tous les domaines. Bien sûr, la loi doit prévoir des garde-fous pour donner à la fonction élective toute sa noblesse et toute son efficacité.
Ce que l'on constate aujourd'hui, c'est que les APC sont devenues des coquilles vides, ce qui fait que le peu de parcelle de pouvoir qui reste entre les mains des maires, est utilisé, - pas par tous les maires heureusement ! – à des fins peu honorables.
Que faut-il faire alors ? La meilleure solution serait d'octroyer de véritables prérogatives aux maires, y compris d'être élus au suffrage universel (et pas seulement par leurs pairs au sein du Conseil municipal) et en même temps de prévoir des balises pour empêcher tout abus de biens sociaux et tout détournement de deniers publics. Pourquoi ce qui est valable ailleurs ne peut pas l'être chez nous, en Algérie ?
Par exemple, qu'est-ce qui empêche un leader de parti politique, un Belkhadem, un Ouyahia, un Saïd Sadi, une Louisa Hanoune, un Boudjera Soltani, de briguer une candidature à l'APC ? Si le maire joue vraiment son rôle moteur de développement au sein de sa municipalité, les personnalités qui ont une stature nationale seraient-elles intéressées ? N'est-ce pas que dans les grandes démocraties, la mairie est un tremplin pour occuper de hautes fonctions au sein de l'Etat ? Les exemples sont nombreux, du maire de New York à Ahmadindjad, en passant par Jacques Chirac. Sarkozy lui-même était maire de Neuilly. Alors ?


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