Rejoignant l'œuvre de Mammeri, Bellil, Achour, Aceval et d'autres chercheurs qui ont passionnément et patiemment recueilli et transcrit tout ce qu'ils ont pu d'un patrimoine immatériel, menacé de disparition définitive, l'universitaire Zineb Labidi apporte sa contribution à travers ce recueil de contes traduits, publié par les éditions Média Plus en 2006. Rejoignant l'œuvre de Mammeri, Bellil, Achour, Aceval et d'autres chercheurs qui ont passionnément et patiemment recueilli et transcrit tout ce qu'ils ont pu d'un patrimoine immatériel, menacé de disparition définitive, l'universitaire Zineb Labidi apporte sa contribution à travers ce recueil de contes traduits, publié par les éditions Média Plus en 2006. L'ouvrage de Zineb Labidi représente une aubaine pour les mamies et les mamans d'aujourd'hui auxquelles la télévision ainsi que leur nouveau mode de vie interdit le mode de transmission traditionnelle de ces joyaux de la mémoire collective que sont les contes et fables qui nous sont parvenus du fond des âges. Les enfants scolarisés peuvent dorénavant y puiser à loisir avec ou sans l'aide de leurs familles. L'on ne peut dès lors que regretter, que la version en langue originale, arabe ou berbère, de ces 24 contes bien de chez nous, n'ait pas été transcrite en même temps que la traduction en français que l'auteure réussit fort bien. Ce, d'autant que Zineb Labidi expose en préface tout le travail d'enregistrement et de transcription fait auprès de 4 conteuses d'âges différents. L'universitaire souligne pourtant que grâce à ce travail, «ces histoires seront du domaine de l'écrit, mais elles peuvent retrouver la voix. Un souffle, un corps peuvent un jour les porter et leur donner leurs couleurs. » Mais si le texte original est perdu, n'est-ce pas les trahir que de les transmettre dans une langue qui ne peut que les travestir d'oripeaux qui les éloignent de leur musicalité propre ? Le conte fonctionne en effet comme le chant le plus profond de l'identité d'un peuple et d'une terre, à telle enseigne que l'auteure rapporte dans l'un de ses interviews que ce travail était impossible à publier en 1980…Toujours dans sa préface, l'auteure souligne l'évolution du langage et du style d'une génération de conteuses à l'autre. « Trois conteuses d'une même famille et trois voix. Celle de l'aïeule est encore pleine de la rudesse des montagnards. Les mots tombent drus et peuvent être crus. Pas de circonvolution, ni métaphore, ni litote. La langue de la fille est comme un espace de rencontre et de négociation entre la langue campagnarde et celle, plus raffinée, de la ville. La petite-fille parle par moments comme à la télé : langue ampoulée, compassée, comme contrainte. Mais la vie qui palpite dans le conte est trop forte et l'histoire , commencée dans une langue pompeuse et de nulle part , se déroule comme un écheveau de soie dans une langue souple, dans laquelle se retrouve le souffle et la manière de dire de toute une société. La quatrième conteuse occuperait l'espace de la troisième génération, à partir de l'aïeule. Ses contes sont quelquefois une variation des contes du premier répertoire. Elle a aussi d'autres histoires : celle de M'hamed ou du blasphème. On s'éloigne du conte merveilleux. On est davantage du côté de la fable, moralisatrice ou non.» Après avoir ainsi ouvert l'appétit au lecteur, par ces observations d'une pertinence très fine, l'auteure lui propose un festin amer. « Kan ya ma kan /Fi Qadim ezzaman/ Lahbaq wa sussan/ Fi hjar N'bi/ Alih slat wa slam. Cette ouverture si musicale du conte est traduite par : «Il était une fois/Dans les temps anciens/ Lys et basilic/ Sur les genoux du Prophète/ Sur lui prière et salut.» Ce simple fragment démontre si besoin est l'échec esthétique effectué par la traduction. Quoi qu'il en soit, le lecteur qui se souvient encore de la langue merveilleuse des contes retrouvera dans ce recueil les détails qui avec le temps se sont peu à peu estompé de sa mémoire. Dans un contexte souvent effroyable et cruel comme la vie, des personnages, facétieux, intelligents ou faussement benêts se débattent pour grandir et devenir autonomes. Des garçonnets débrouillards se prénommant M'qidèche ou H'didouane ne craignent pas d'affronter des ogresses assoiffées de chair humaine. Des jeunes filles belles comme le jour, s'allient à leurs courageux prétendants pour échapper à leurs pères, des tyrans sanguinaires. Les animaux et les végétaux secourent les êtres humains qui les traitent avec bonté… En lisant ce recueil, le lecteur s'immerge dans la solide morale populaire pleine d'humour et de vivacité. Vivant en France depuis les années 1990, Zineb Labidi est maître de conférence et enseigne les littératures francophones à l'université de Paris VIII. Avant de s'exiler «pour ne pas mourir»; elle était enseignante au département de français de la fac d'Alger. Zineb Labidi a à son actif des ouvrages multidisciplinaires. Ecrits d'Algérie, collectif, Editions Autres temps, (1996), Passagères, recueil de nouvelles, Editions Marsa, (2000), La balade des Djinns, Editions Casbah, (2004), Ma langue est mon territoire, collectif, Editions Sigaud (2001) et « Kan Ya Makan, l'Algérie des conteuses», aux éditions Mediaplus , 2006. Zineb Labidi est née dans les Aurès en 1946 à la Meskiana qui est également la terre d'origine de Yamina Mechakra, auteure de La grotte éclatée et Arris. L'ouvrage de Zineb Labidi représente une aubaine pour les mamies et les mamans d'aujourd'hui auxquelles la télévision ainsi que leur nouveau mode de vie interdit le mode de transmission traditionnelle de ces joyaux de la mémoire collective que sont les contes et fables qui nous sont parvenus du fond des âges. Les enfants scolarisés peuvent dorénavant y puiser à loisir avec ou sans l'aide de leurs familles. L'on ne peut dès lors que regretter, que la version en langue originale, arabe ou berbère, de ces 24 contes bien de chez nous, n'ait pas été transcrite en même temps que la traduction en français que l'auteure réussit fort bien. Ce, d'autant que Zineb Labidi expose en préface tout le travail d'enregistrement et de transcription fait auprès de 4 conteuses d'âges différents. L'universitaire souligne pourtant que grâce à ce travail, «ces histoires seront du domaine de l'écrit, mais elles peuvent retrouver la voix. Un souffle, un corps peuvent un jour les porter et leur donner leurs couleurs. » Mais si le texte original est perdu, n'est-ce pas les trahir que de les transmettre dans une langue qui ne peut que les travestir d'oripeaux qui les éloignent de leur musicalité propre ? Le conte fonctionne en effet comme le chant le plus profond de l'identité d'un peuple et d'une terre, à telle enseigne que l'auteure rapporte dans l'un de ses interviews que ce travail était impossible à publier en 1980…Toujours dans sa préface, l'auteure souligne l'évolution du langage et du style d'une génération de conteuses à l'autre. « Trois conteuses d'une même famille et trois voix. Celle de l'aïeule est encore pleine de la rudesse des montagnards. Les mots tombent drus et peuvent être crus. Pas de circonvolution, ni métaphore, ni litote. La langue de la fille est comme un espace de rencontre et de négociation entre la langue campagnarde et celle, plus raffinée, de la ville. La petite-fille parle par moments comme à la télé : langue ampoulée, compassée, comme contrainte. Mais la vie qui palpite dans le conte est trop forte et l'histoire , commencée dans une langue pompeuse et de nulle part , se déroule comme un écheveau de soie dans une langue souple, dans laquelle se retrouve le souffle et la manière de dire de toute une société. La quatrième conteuse occuperait l'espace de la troisième génération, à partir de l'aïeule. Ses contes sont quelquefois une variation des contes du premier répertoire. Elle a aussi d'autres histoires : celle de M'hamed ou du blasphème. On s'éloigne du conte merveilleux. On est davantage du côté de la fable, moralisatrice ou non.» Après avoir ainsi ouvert l'appétit au lecteur, par ces observations d'une pertinence très fine, l'auteure lui propose un festin amer. « Kan ya ma kan /Fi Qadim ezzaman/ Lahbaq wa sussan/ Fi hjar N'bi/ Alih slat wa slam. Cette ouverture si musicale du conte est traduite par : «Il était une fois/Dans les temps anciens/ Lys et basilic/ Sur les genoux du Prophète/ Sur lui prière et salut.» Ce simple fragment démontre si besoin est l'échec esthétique effectué par la traduction. Quoi qu'il en soit, le lecteur qui se souvient encore de la langue merveilleuse des contes retrouvera dans ce recueil les détails qui avec le temps se sont peu à peu estompé de sa mémoire. Dans un contexte souvent effroyable et cruel comme la vie, des personnages, facétieux, intelligents ou faussement benêts se débattent pour grandir et devenir autonomes. Des garçonnets débrouillards se prénommant M'qidèche ou H'didouane ne craignent pas d'affronter des ogresses assoiffées de chair humaine. Des jeunes filles belles comme le jour, s'allient à leurs courageux prétendants pour échapper à leurs pères, des tyrans sanguinaires. Les animaux et les végétaux secourent les êtres humains qui les traitent avec bonté… En lisant ce recueil, le lecteur s'immerge dans la solide morale populaire pleine d'humour et de vivacité. Vivant en France depuis les années 1990, Zineb Labidi est maître de conférence et enseigne les littératures francophones à l'université de Paris VIII. Avant de s'exiler «pour ne pas mourir»; elle était enseignante au département de français de la fac d'Alger. Zineb Labidi a à son actif des ouvrages multidisciplinaires. Ecrits d'Algérie, collectif, Editions Autres temps, (1996), Passagères, recueil de nouvelles, Editions Marsa, (2000), La balade des Djinns, Editions Casbah, (2004), Ma langue est mon territoire, collectif, Editions Sigaud (2001) et « Kan Ya Makan, l'Algérie des conteuses», aux éditions Mediaplus , 2006. Zineb Labidi est née dans les Aurès en 1946 à la Meskiana qui est également la terre d'origine de Yamina Mechakra, auteure de La grotte éclatée et Arris.