L'énigmatique qacida du grand poète lyrique marocain Cheikh El-Mekki Ben El-Qorchi ( fin IXXe début XXe), très connue en Algérie, est l'une des plus appréciée parmi les pièces musicales de l'art citadin. Tirée d'un vieux conte berbère, ce chant a été interprété par les plus grands du chaâbi et du haouzi et mis en scène en 2007 par la dramaturge Fouzia Aït EL-Hadj. La qacida écrite par Cheikh El-Mekki reste une œuvre intemporelle qui narre avec humour les relations mouvementées entre un médecin savant venu d'Arabie et la population de Azemour, une petite ville du Maroc. Il renseigne également sur la place qui fût celle de la femme dans le Maghreb des siècles reculés. L'énigmatique qacida du grand poète lyrique marocain Cheikh El-Mekki Ben El-Qorchi ( fin IXXe début XXe), très connue en Algérie, est l'une des plus appréciée parmi les pièces musicales de l'art citadin. Tirée d'un vieux conte berbère, ce chant a été interprété par les plus grands du chaâbi et du haouzi et mis en scène en 2007 par la dramaturge Fouzia Aït EL-Hadj. La qacida écrite par Cheikh El-Mekki reste une œuvre intemporelle qui narre avec humour les relations mouvementées entre un médecin savant venu d'Arabie et la population de Azemour, une petite ville du Maroc. Il renseigne également sur la place qui fût celle de la femme dans le Maghreb des siècles reculés. Ce n‘est qu‘au bout de la cinquième tentative que le héros, désigné par le poète comme El-Achiq, arrive enfin à libérer sa bien-aimée Aouicha. Agée de 18 ans et musicienne accomplie, elle a été achetée et retenue prisonnière dans un ksar situé entre deux eaux, «Bin el-oued oual b‘har» par l‘inquiétant, le ténébreux Herraz (littéralement faiseur d‘amulettes) venu du Hidjaz. Très critique, la jeune fille reproche les ruses et mises en scène, éventées au fur et à mesure qu‘El-Achik a utilisées pour la libérer. C‘est en se décidant enfin à agir seul, sans déguisement, uniquement porteur d‘un guembri et armé d‘un poignard qu‘il arrive à ses fins. C‘est en fait, la jeune prisonnière qui se saisit de l‘arme et inverse les rôles. Après lui avoir présenté son ami de cœur, elle demande au malheureux herraz de se transformer en singe et de sauter, tout en le frappant à coups de bâton pour le punir de l‘avoir séparé d‘El-Achik durant 20 jours. Le plus étonnant de ce happy end à la marocaine, c‘est que loin de s‘offusquer des reproches que lui adresse la belle enfant, el-Achik la félicite pour son intelligence et la noblesse de son lignage. Dans la belle interprétation faite par M. Morcely dans son blog intitulée El-Djezaïr el-Mahroussa, la belle profite de l‘état d‘ébriété avancée du herraz pour se saisir de sa baguette magique et le transformer en chimpanzé. Elle demande ensuite au Djinn bleu qu‘elle a appelé de le retransformer en être humain pour qu‘il puisse acquérir ce qui manque à son éducation auprès de sa mère, car «la sagesse appartient aux femmes ».C‘est ainsi que l‘érudit retourne à son Hidjaz natal. Portrait express d‘un personnage mystérieux «Herraz H‘kim men Elh‘gaz/ Talaâ lel Ghrab âla Brez ; Herraz, savant venu du Hidjaz/ Sa quête l‘a mené à l‘Ouest» Dès les premiers vers l‘auteur donne un portrait express très saisissant du Herraz. Le Herraz poursuit une quête. La suite nous permet de comprendre qu‘il est arrivé au Maghreb à la recherche de femmes. Interprété comme suit par Morcely ; «Devin ou enchanteur, sorcier ou magicien ? El Harraz était redouté pour ses pouvoirs et personne ne savait d‘où il les détenait. Etait-il un Djinn ? Un geste, un regard de ses yeux perçants et les femmes tombaient à ses pieds comme des fruits mûrs. Cerbère érudit du Hidjaz, il connaît l‘art de l‘orientation et de la navigation, instruit par tant de sages et de savants, bien informé sur la ruse des femmes, buveur invétéré, il chevauche, à bride abattue, vers le Maghreb.» «Mebli bettassa» et «maâlam fi harb ennssa». Présenté comme grand buveur et spécialiste de la psychologie féminine, le savant est perçu avant tout comme un dangereux enchanteur par les Berbères du Maroc. Rencontre avec Aouicha C‘est lors d‘une rencontre musicale que le Herraz remarque Aouicha et s‘en éprend. Virtuose du luth, elle sait également chanter dans la langue du herraz. Vendue au H‘kim par des jaloux. «Tmelek biha oua melkatou bezzine oua chaâr ; il en devient propriétaire, mais elle le possède à son tour par sa beauté et ses cheveux.» Au bout de sept jours sans nouvelles, El-Achik, apprend que Aouicha est prisonnière du herraz. Les jeunes filles du village déguisent le jeune homme en cadi. Il adresse alors au herraz une invitation traditionnelle. «Il m‘est illicite de toucher à ta nourriture, Cadi véreux», rétorque le herraz. La deuxième ruse consiste à se faire passer pour un disciple de Sidi Rahal. Avec tambours et danses extatiques, le groupe demande à être reçu au nom de l‘ ancêtre Sidi Rahal. Lorsque le cerbère se montre, ils lui déclarent ; «Puisque tu es venu chez nous au Maghreb, fais-nous entrer dans ton palais et honore-nous d‘eau de rose et de fleurs d‘oranger. Nous t‘apportons bien et protection !» El-Herraz répond alors : «Votre wali n‘est ni un nabi, ni un messager». Se tournant vers ses gardes il ordonne ; akramhoum bel oukkaz ! Honorez-les à coups de canne !» «Ouana flet bin leghrez» L‘expression savoureuse du poète montre le jeune homme se faufilant comme une aiguille entre des points cousus. Seul le courage paye La tentative suivante est une offensive de charme. Après avoir entendu le récit du jeune homme sur les méfaits du Herraz , 9 jeunes virtuoses et trois danseuses, parmi les plus talentueuses, «El-khodat el faïzate» décident d‘aider El-Achik. Elle le nomment ‘‘Yemna‘‘ et couvert d‘un haik, il prend les devants. «Nous sommes venues de Fez pour te voir, sage érudit, le plus précieux des hommes, pour le plaisir de la musique et du vin!» A quoi l‘irascible répond : «Cherche, plutôt un campement où te loger fille de rien…» A la quatrième tentative ni les chants gnawis des esclaves, ni les plats typiques n‘attendrissent El-Herraz. «Hors d‘ici faces de chèvres !» s‘écrie-t-il. «Fel Gharb, el-cheikh oua nssa khaoua fel jelssa (Chez nous, au Maghreb, les femmes assistent fraternellement aux fêtes avec le cheikh)», explique Aouicha pour convaincre son ravisseur de recevoir El-Achik qui cette fois est venu seul l‘affronter. La fin proposée par le conte est cruelle pour le mage d‘Arabie, renvoyé chez sa mère pour y apprendre que la science se trouve auprès des femmes. Avec des tournures langagières et un humour succulents, ce conte très instructif devenu poème puis chanson mériterait une analyse linguistique, musicale et anthropologique qui semble n‘avoir pas encore été effectuée. Ce n‘est qu‘au bout de la cinquième tentative que le héros, désigné par le poète comme El-Achiq, arrive enfin à libérer sa bien-aimée Aouicha. Agée de 18 ans et musicienne accomplie, elle a été achetée et retenue prisonnière dans un ksar situé entre deux eaux, «Bin el-oued oual b‘har» par l‘inquiétant, le ténébreux Herraz (littéralement faiseur d‘amulettes) venu du Hidjaz. Très critique, la jeune fille reproche les ruses et mises en scène, éventées au fur et à mesure qu‘El-Achik a utilisées pour la libérer. C‘est en se décidant enfin à agir seul, sans déguisement, uniquement porteur d‘un guembri et armé d‘un poignard qu‘il arrive à ses fins. C‘est en fait, la jeune prisonnière qui se saisit de l‘arme et inverse les rôles. Après lui avoir présenté son ami de cœur, elle demande au malheureux herraz de se transformer en singe et de sauter, tout en le frappant à coups de bâton pour le punir de l‘avoir séparé d‘El-Achik durant 20 jours. Le plus étonnant de ce happy end à la marocaine, c‘est que loin de s‘offusquer des reproches que lui adresse la belle enfant, el-Achik la félicite pour son intelligence et la noblesse de son lignage. Dans la belle interprétation faite par M. Morcely dans son blog intitulée El-Djezaïr el-Mahroussa, la belle profite de l‘état d‘ébriété avancée du herraz pour se saisir de sa baguette magique et le transformer en chimpanzé. Elle demande ensuite au Djinn bleu qu‘elle a appelé de le retransformer en être humain pour qu‘il puisse acquérir ce qui manque à son éducation auprès de sa mère, car «la sagesse appartient aux femmes ».C‘est ainsi que l‘érudit retourne à son Hidjaz natal. Portrait express d‘un personnage mystérieux «Herraz H‘kim men Elh‘gaz/ Talaâ lel Ghrab âla Brez ; Herraz, savant venu du Hidjaz/ Sa quête l‘a mené à l‘Ouest» Dès les premiers vers l‘auteur donne un portrait express très saisissant du Herraz. Le Herraz poursuit une quête. La suite nous permet de comprendre qu‘il est arrivé au Maghreb à la recherche de femmes. Interprété comme suit par Morcely ; «Devin ou enchanteur, sorcier ou magicien ? El Harraz était redouté pour ses pouvoirs et personne ne savait d‘où il les détenait. Etait-il un Djinn ? Un geste, un regard de ses yeux perçants et les femmes tombaient à ses pieds comme des fruits mûrs. Cerbère érudit du Hidjaz, il connaît l‘art de l‘orientation et de la navigation, instruit par tant de sages et de savants, bien informé sur la ruse des femmes, buveur invétéré, il chevauche, à bride abattue, vers le Maghreb.» «Mebli bettassa» et «maâlam fi harb ennssa». Présenté comme grand buveur et spécialiste de la psychologie féminine, le savant est perçu avant tout comme un dangereux enchanteur par les Berbères du Maroc. Rencontre avec Aouicha C‘est lors d‘une rencontre musicale que le Herraz remarque Aouicha et s‘en éprend. Virtuose du luth, elle sait également chanter dans la langue du herraz. Vendue au H‘kim par des jaloux. «Tmelek biha oua melkatou bezzine oua chaâr ; il en devient propriétaire, mais elle le possède à son tour par sa beauté et ses cheveux.» Au bout de sept jours sans nouvelles, El-Achik, apprend que Aouicha est prisonnière du herraz. Les jeunes filles du village déguisent le jeune homme en cadi. Il adresse alors au herraz une invitation traditionnelle. «Il m‘est illicite de toucher à ta nourriture, Cadi véreux», rétorque le herraz. La deuxième ruse consiste à se faire passer pour un disciple de Sidi Rahal. Avec tambours et danses extatiques, le groupe demande à être reçu au nom de l‘ ancêtre Sidi Rahal. Lorsque le cerbère se montre, ils lui déclarent ; «Puisque tu es venu chez nous au Maghreb, fais-nous entrer dans ton palais et honore-nous d‘eau de rose et de fleurs d‘oranger. Nous t‘apportons bien et protection !» El-Herraz répond alors : «Votre wali n‘est ni un nabi, ni un messager». Se tournant vers ses gardes il ordonne ; akramhoum bel oukkaz ! Honorez-les à coups de canne !» «Ouana flet bin leghrez» L‘expression savoureuse du poète montre le jeune homme se faufilant comme une aiguille entre des points cousus. Seul le courage paye La tentative suivante est une offensive de charme. Après avoir entendu le récit du jeune homme sur les méfaits du Herraz , 9 jeunes virtuoses et trois danseuses, parmi les plus talentueuses, «El-khodat el faïzate» décident d‘aider El-Achik. Elle le nomment ‘‘Yemna‘‘ et couvert d‘un haik, il prend les devants. «Nous sommes venues de Fez pour te voir, sage érudit, le plus précieux des hommes, pour le plaisir de la musique et du vin!» A quoi l‘irascible répond : «Cherche, plutôt un campement où te loger fille de rien…» A la quatrième tentative ni les chants gnawis des esclaves, ni les plats typiques n‘attendrissent El-Herraz. «Hors d‘ici faces de chèvres !» s‘écrie-t-il. «Fel Gharb, el-cheikh oua nssa khaoua fel jelssa (Chez nous, au Maghreb, les femmes assistent fraternellement aux fêtes avec le cheikh)», explique Aouicha pour convaincre son ravisseur de recevoir El-Achik qui cette fois est venu seul l‘affronter. La fin proposée par le conte est cruelle pour le mage d‘Arabie, renvoyé chez sa mère pour y apprendre que la science se trouve auprès des femmes. Avec des tournures langagières et un humour succulents, ce conte très instructif devenu poème puis chanson mériterait une analyse linguistique, musicale et anthropologique qui semble n‘avoir pas encore été effectuée.