In Hoggar.org La salle était pourtant indiquée par une immense banderole « Club du Pain », mais certains congressistes allèrent néanmoins vers une salle voisine nommée « kleb des pins », un peu par habitude… Ils furent refoulés sans ménagement, car ils n'avaient pas les muselières réglementaires… Après quelques tergiversations, tout le monde put enfin prendre place dans la salle du « Congrès »… Ils étaient venus là avec la ferme intention « d'encaisser » pendant ou juste après le « Congrès ». Ils avaient tous entendu parler des faramineuses rentrées des hydrocarbures, et des rumeurs insistantes selon lesquelles il y avait trop d'argent dans le pays et pas assez de projets pour le dépenser… Pragmatiques, certains sont venus avec d'énormes sacs opaques type « chkara », d'autres avec des pelles, d'autres encore avec des coffres forts vides… Mais comme il n'y avait pas assez de ces « outils de travail » sur le marché, certains avaient carrément vidé toutes les poubelles publiques qu'ils avaient trouvées sur leur chemin et les trimbalèrent avec eux… Belkhadem était attendu pour commencer la fête, mais il fut en retard. Il envoya un texto aux congressistes pour les faire patienter. On put y lire : « J'ai une khadma, Toufik m'a demandé de lui nouer les lacets de ses bottes, serai avec vous dans 30 minutes ». Deux heures plus tard, Belkhadem arrive avec des joues singulièrement enflées… Quelqu'un lui passa une chkara contentant de la glace concassée qu'il mit aussitôt sur sa mâchoire… Il commença son discours en s'essayant à l'humour noir : « Ce que j'ai sur la gueule, c'est un avertissement pour nous tous, mais je vous assure que le coup de bottes est venu sans aucun avertissement »… La salle rit à gorge déployée, et l'on put enfin commencer les travaux du « Congrès »… Le rapporteur s'apprêta à lire une motion du soutien à quelqu'un ou à quelque chose, mais fut soudain pris de compassion pour les congressistes : « Je sais que vous allez voter « oui », alors abrégeons : Etes-vous d'accord avec la motion que j'allais vous lire? ». Tout le monde leva la main, excepté quelques insoumis qui n'avaient pu entendre le rapporteur… A ce moment-là Hadjar posa son whisky et fit sortir deux Dobermans de sous son pupitre… Les récalcitrants levèrent alors frénétiquement les deux mains en signe de ralliement… Les congressistes étaient donc à 100% d'accord avec la ligne du parti. Mais quand il s'est agi d'élire des représentants au « comité central », il y eut de sérieuses divergences comme dans n'importe quel parti démocratique. Les mains qui s'étaient levées pour approuver la motion se dirigèrent machinalement sur les figures du voisin, et l'on se battit allégrement jusqu'en fin de soirée… La bataille fut âpre, mais les gagnants étaient tout indiqués : c'étaient ceux qui restaient encore debout… Belkhadem prit note des heureux élus et conclut le congrès en invitant tout le monde à chanter « Qassamen !», c.-à-d. « Partageons !»… Mounir Sahraoui 22 mars 2010