In La Nation.info Mardi 26 Avril 2011 Il ya plusieurs façons de faire fausse route. Continuer dans la même voie pour le régime. Et appeler à un coup d'Etat pour l'opposition. Que le Président Bouteflika soit malade cela ne constitue qu'un facteur aggravant de la crise. Cette dernière était déjà là quand le public sortait les chaises sur les trottoirs pour écouter aux terrasses des cafés le Bouteflika du premier mandat discourir à l'infini. Sur l'Algérie et sur le monde. Sur le passé et sur l'avenir. Sur le peuple et sur le pouvoir. Sur le président et sur les généraux. Mais sur toutes ces questions Bouteflika comme tous ses prédécesseurs- et ceux qui les ont fait- n'a eu que des discours. La réalité n'a jamais été abordée sérieusement. Par les actes. Ce n'était pas le but du jeu. Même si les discours se sont multipliés, tantôt se répétant. Tantôt se contredisant. Tantôt dans le style du sketche de Ramadan. Tantôt dans le savant babillage des experts. Et tantôt dans les roucoulements de quelques courtisans. Ou les rugissements de quelques opposants. La plupart en service commandé. Ou même pas. Ce qui est presque pire dans l'évaluation de l'état d'avilissement politique d'une société. Bouteflika est malade et Ali yahia Abdennour demande sa destitution légale par recours à l'article 88 de la constitution. A la tête d'une CNDC politiquement aussi malade que le Président lui-même, le vieux routier des Droits de l'Homme veut confier à un « conseil national de transition » désigné par un clan (fût-il de l'opposition !) la mission de tracer la feuille de route pour la sortie de crise. On devine que cela ne va pas plaire aux autres clans. Ceux dans l'opposition. Pas plus que ceux déjà au pouvoir. Mais quel bonheur pour la crise ! Enfin ! Il ya là de la vraie matière pour continuer à faire comme avant en ayant l'air de changer. Et en changeant juste les figurants. Pour juste un épisode. Et ce n'est pas le pire ! Le pire est que le pays, sa crise multiforme, sa société déstructurée, sa morale en putréfaction avancée, ses équilibres précaires, ses élites sous influence, traumatisées ou au bord de la crise de nerfs, ne seront pas en mesure de supporter le choc d'une autre issue illusoire. Encore une porte ouverte sur le vide et tout le monde descend ! Ou plutôt tombe. Qu'il est doux à demander Iskat ennidham ! Quand on est persuadé que le Nidham c'est l'Autre ! Quand on oublie, ou ne sait même pas, de combien d'autres on est l'Autre ! Et qu'on est le Nidham de tous ceux pour qui on est l'Autre. On croit un certain nombre de choses assez curieuses chez nous. Que seul le pouvoir est porteur de fausses solutions. Que seul le pouvoir est concerné par le changement. Que seul le pouvoir doit mettre ses actes en conformité avec ses paroles. Et quand ça tourne mal on appelle l'armée à un redressement révolutionnaire. Ou les jeunes à prendre les maquis. Le problème est qu'on se trompe lourdement à demander aux militaires de prendre partie dans cette affaire. Qu'ils n'ont plus les moyens, combien même en auraient-ils l'envie, de redistribuer les cartes comme ils l'ont toujours fait jusqu'ici. Le problème est que les jeunes d'aujourd'hui n'ont plus envie de mourir pour les multiples « opiums »des idéologies. Même pas celles d'Internet. Tant qu'à faire avec la violence. Les maquis des narco- trafiquants et du trafic d'armes sont un horizon stratégique ouvrant bien plus de perspectives de promotion sociale qu'un statut de martyr pour une révolution « par et pour les autres » Dans sa faillite, le Pouvoir algérien a réussi à entrainer la faillite de l'opposition. Et la faillite de la société. C'est là le drame. Et c'est à ce drame qu'il faut trouver une solution. C'est en cela que l'Algérie n'est pas concernée de la même manière que les autres par le « Printemps arabe ». La révolution, si elle devait avoir lieu ici, sera consensuelle, négociée et pacifique ! A tous les autres programmes ce sera NON ! Elle a déjà donné l'Algérie ! Aux illusionnistes, aux génies du changement par décret, aux révolutionnaires de palais, aux relais d'ambassades, aux imbéciles impénitents, aux prédateurs à dents longues, aux assassins, aux calomniateurs, aux fanfarons, aux traitres, aux criminels et aux mercenaires de toutes obédiences ! Elle a donné les plus naïfs de ses enfants. Les plus irremplaçables. Par ce qu'on mettra longtemps avant de faire pousser à nouveau sur cette terre de cette sorte d'enfants qui meurent pour des idées. On ne mourra plus désormais que pour tuer. La nuance est de taille. Entre ces deux espèces de candidats au sacrifice. Il ya une génération qui a été sacrifiée. Et une autre qui préfère vendre chèrement sa peau. Et tant qu'à l'offrir ce sera aux poissons. Au feu. A la corde. Au bitume. Mais pas pour vos figures. Les réactions au discours prononcé par le président Bouteflika vendredi dernier révèlent au moins une chose. La fracture qui traverse la scène algérienne entre une société virtuelle qui dispose du pouvoir réel, dont celui de neutraliser les institutions, et une société réelle qui ne dispose que d'un pouvoir virtuel, celui de se mobiliser. Il reste quelques chances de sortir le pays de ce jeu pervers qui consiste à faire se télescoper le virtuel et le réel Sans que jamais ils ne se rencontrent. Il est temps 50 ans après l'indépendance de libérer la société et le pouvoir. De ce piège des apparences. Fausses institutions, fausses sociétés, fausses mobilisations, fausses solutions et des textes à profusion. Une seule règle en amont : Pas d'exclusion. Une seule en aval : le respect de la règle. Et entre les deux se mettre d'accord sur la règle. Par une curieuse ironie du sort, à l'époque où Bouteflika remplissait bien sa mission d'amuseur des foules, après le diner en s'installant pour rigoler un bon coup on allait écouter le président parler dans les chaumières et on disait faut pas rater Cassandra ! C'était le nom du feuilleton mexicain à la mode avant l'arrivée des concurrents turcs. Pour rappel Cassandre est le nom de cette héroïne grecque qui annonce les catastrophes. Dont la destruction de Troie. Pour rappel également, un homme averti de la chose politique algérienne avait dit de Bouteflika à son arrivée au pouvoir : il enterrera le système… ou le pays. Ne l'aidons pas à enterrer le pays par de fausses solutions. S.G. Lectures: