AFFAIRE DES PROTESTATAIRES DE LA CITE BOIS DES PINS (HYDRA) Le procès fixé pour le 6 octobre Le Soir d'Algérie, 2 août 2011 Le procès des émeutiers, habitants de la cité Bois des Pins d'Hydra est fixé pour le 6 octobre prochain, a-t-on appris hier de source proche du tribunal correctionnel de Bir Mourad Raïs. Selon notre source, ils seront une dizaine à répondre des chefs d'inculpation «d'attroupement illégal » et d'«atteinte aux biens de l'Etat et à la sécurité publique». Abder Bettache – Alger (Le Soir) – A l'origine de cette manifestation de rue, la décision des autorités de construire un parking sur un jardin mitoyen des immeubles de la cité. En effet, en mai dernier, une décision émanant de la municipalité d'Hydra, le quartier résidentiel qui abrite la cité populaire Bois des Pins, fait état de la construction d'un parking de douze étages, nécessitant le rasage d'une petite forêt d'une superficie de 11 000 m2 mitoyenne des immeubles de la cité. Ayant eu vent de cette démarche, les riverains se sont révoltés contre cette décision, la qualifiant d'«arbitraire ». Ils montent ainsi au créneau pour dénoncer un projet non conforme aux lois de l'urbanisme. Malgré cette opposition, l'intégralité du jardin des pins a été rasée le 10 juillet, provoquant ainsi de violentes émeutes. Plusieurs riverains ont été brutalisés par les forces de police qui ont également procédé à des arrestations. Les personnes arrêtées ont été entendues par la justice pour être relâchées quelques heures après. La tenue de leur procès a été fixée pour le 6 octobre prochain. Il est à rappeler que plusieurs démarches ont été entreprises par le comité de quartier pour préserver ce bois, dont une pétition de 4 500 signataires des résidents de la cité adressée aux hautes autorités du pays, dont le président. «Cela fait plus de 52 ans que ce bois existe, ces pins ont été plantés à l'époque coloniale et ces eucalyptus nous les avons boisés lors des opérations de volontariat dans les années 1970. Nous nous sommes battus pour cet espace vert», nous dira un sexagénaire natif du quartier. Il insiste sur le fait que ce bois a fait l'objet, en 1984, d'une circulaire interministérielle pour sa préservation. Une délégation du comité des sages du quartier a été également reçue hier par le wali d'Alger pour des pourparlers. Sur un autre plan, il est à noter que les habitants de la cité Bois des Pins ont déposé deux plaintes auprès du tribunal administratif de Bir Mourad Raïs. Une plainte de fond portant sur la légalité des travaux, ainsi que sur la priorité du terrain, bien indivisible des habitants propriétaires, une autre plainte en référé pour «stopper immédiatement les travaux jusqu'au jugement de fond», comme le stipule la loi, et une dernière plainte déposée au niveau du tribunal pénal de Bir Mourad Raïs contre «la police pour violences, agressions et destructions de biens d'autrui.» Plaintes, dit-on, accompagnées de plus de quinze certificats médicaux légaux. C'est dans ce cadre, a-t-on indiqué, qu'un rassemblement de soutien a eu lieu devant le tribunal administratif de Bir Mourad Raïs pour soutenir la plainte en référée déposée par les citoyens contre la wilaya d'Alger et la mairie d'Hydra. A ce propos, plusieurs moudjahidates de la guerre de Libération nationale, des comités et des délégations de quartier ont exprimé leurs soutien à cette démarche. A. B. Les moudjahidate appuient la population «Le siège policier de la cité Bois des Pins, à Hydra, nous a ramenés en 1957, moment où les parachutistes du général Massu ont investi immeubles et appartements d'Alger durant la glorieuse bataille d'Alger.» Ce «verdict», sans appel, a été prononcé par six moudjahidate, et pas des moindres. Djamila Bouhired, Fatouma Ouzegane, Louisa Ighilahriz, Zoulikha Bekadour, Malika Ousliha et Louisa Ouzarene ont cosigné une déclaration, rendue publique dimanche dernier, à l'issue de la visite qu'elles avaient rendue aux habitants contestataires qui reçoivent, là, un soutien symbolique inestimable. Une déclaration à charge contre un pouvoir de «parachutés et de charognards ». A la veille du 50e anniversaire «d'une souveraineté recouvrée dans la peine et la souffrance», les six moudjahidate se disent «révoltées par l'impéritie qui règne à tous les niveaux du système où les “parachutés” grassement rétribués distribuent des miettes aux policiers chargés de les protéger. Isolés dans leurs bunkers, ils ignorent tout de la réalité socio-politique du pays qu'ils gouvernent avec un fallacieux projet de société qui n'est pas celui dont ont rêvé les meilleurs d'entre nous». Condamnant la répression qui frappe les mouvements sociaux en Algérie, dans le sillage «d'un vent de liberté qui souffle sur la planète», les moudjahidate affirment que «l'Algérie n'est pas la Tunisie, l'Egypte, la Libye ou la Syrie. Elle a réussi, au prix du sacrifice des meilleurs de ses enfants, une grande et magnifique guerre de Libération nationale, récupérée, hélas, par les résistants de la dernière heure». Pour ces authentiques combattantes, le constat est aujourd'hui des plus désespérants : «La République que nous voulions démocratique et populaire est bafouée par des hommes et des femmes sans foi ni loi.» Le peuple algérien, notent-elles encore, «résiste et lutte contre le démembrement de ses biens et la course à la rapine ». Et en l'espèce, l'affaire de la forêt du Bois des Pins à Hydra, convoitée par un ponte du régime, illustre extraordinairement bien le constat dressé par les moudjahidate pour l'Algérie indépendante. K. A.