Enseignement supérieur: lancement de la première édition du Prix du président de la République du chercheur innovant    Former un front médiatique national pour défendre l'image de l'Algérie    Algérie-Tunisie: les ministres de l'Intérieur soulignent leur volonté commune de contrer les phénomènes négatifs dans les zones frontalières    Fête de la Victoire: les victoires militaires et diplomatiques de la Révolution de libération au centre d'une conférence à Alger    Secousse tellurique de magnitude 3,2 degrés dans la wilaya de Médéa    Boughali reçoit l'ambassadeur du Mozambique à Alger    63ème anniversaire de la fête de la victoire: diverses activités dans l'Est du pays    Compétitions interclubs de la CAF 2024-2025: les dates et les horaires des quarts de finale connus    Textiles et cuirs: le chiffre d'affaire du groupe public Getex augmente en 2024    Les revenus générés par les produits forestiers dépassent le milliard de dinars    ANP: mise en échec de tentatives d'introduction de plus de 30 quintaux de drogue en provenance du Maroc    Le président de la République présente ses condoléances suite au décès en martyr du pilote Lieutenant-Colonel Bekkouche Nasr    Agression sioniste contre Ghaza: au moins 970 martyrs en 48h    Rebiga préside la cérémonie du 63e anniversaire de la Fête de la Victoire à la place de la Résistance à Alger    Massacre sioniste à Ghaza: "Les attaques doivent cesser sans plus attendre"    Le ministre tunisien de l'Intérieur visite la Direction des titres et documents sécurisés d'El-Hamiz    Ligue 1 Mobilis: le CRB écope d'un match à huis clos, un match de suspension pour Ramovic    Mondial 2026/Botswana-Algérie: premier entraînement des Verts à Gaborone    Une avancée stratégique vers la souveraineté numérique    Accent sur les succès militaires et la réponse aux accusations occidentales    Une des crises humanitaires les plus complexes au monde    Saisie d'importantes quantités de kif traité et de psychotropes, deux arrestations à Oued Rhiou    Le plan de prévention contre les incendies approuvé    Les représentants de la société civile interpellent les hautes autorités du pays    Les déchets alimentaires durant le Ramadhan    «Loyauté envers les martyrs»    Conversion de la dette tunisienne en investissements français    Béjaïa empreinte d'une remarquable effusion culturelle    Lancement jeudi prochain de la 14e édition    «El Ferda» et «Imerhane» enchantent le public    «Je n'ai jamais fermé les portes de la sélection»    Mobilis rend hommage à d'anciennes gloires de la JSK    Le CIO recommande la présence de la boxe    Manifestations à Washington et New York pour exiger la libération d'un étudiant miilitant palestinien    Vague d'indignation après l'expulsion de juristes espagnols par les autorités d'occupation    L'Algérie engagée à autonomiser les femmes et à promouvoir leurs droits politiques et sociaux        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Lahouari Addi* répond à M. Daho Ould Kablia (Suite)
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 25 - 07 - 2008

En votre qualité de président de l'Association nationale des anciens du MALG, vous avez répondu à mon article paru le 20 juillet dans ce même quotidien, utilisant une rhétorique que les lecteurs de la presse écrite croyaient révolue et qui ne correspond plus à la réalité politique et sociale de l'Algérie des années 2000. Il est bien sûr de votre droit de rester «congelé», mais vous n'avez pas le droit de faire des procès d'intention en affirmant que mon texte était «un réquisitoire».
J'ai bien précisé que les Algériens étaient attachés affectivement à leur armée parce qu'elle fait partie de leur histoire. Par conséquent, si vous voulez ouvrir le débat, il faut qu'il soit loyal et sans coups bas, sinon restez dans votre bulle, enfermé dans un passé quasi-imaginaire dont vous tirez profit et n'accusez pas ceux qui ne sont pas d'accord avec vous. Vous me récusez le droit de parler de Abdelhafid Boussouf et de ses méthodes en corroborant précisément ce que j'appelle «le réflexe Boussouf» qui a trouvé son prolongement dans les vicissitudes de la construction de l'Etat post-indépendance. Vous allez même plus loin, me conseillant de rester dans «ma nouvelle patrie» (la France), insinuant que les cinq millions d'Algériens qui sont à l'étranger ont choisi une nouvelle patrie, et que les millions d'Algériens qui veulent partir sont à la recherche d'une nouvelle patrie ! C'est grave, M. Daho Ould Kablia, ce que vous dites. Ce n'est pas de l'inconscience, c'est de l'aliénation. Vous confirmez là votre apolitisme que vous avez déjà montré en accusant les Marocains, les Tunisiens et les Egyptiens de ne pas nous avoir aidés durant la guerre de Libération, ignorant totalement la géographie : Ghardimaou se situe en Tunisie et Oujda au Maroc ! Sans l'aide de nos frères marocains et tunisiens, l'armée coloniale aurait étouffé les maquis de l'ALN. Je vous rappelle que durant toute la révolution, Boussouf était entre Oujda, Le Caire et Tunis, où le FLN avait ses bases logistiques qui lui ont permis d'atteindre ses objectifs. Cette fois-ci, vous récidivez contre des compatriotes en leur déniant le droit d'être algériens parce qu'ils souhaitent que l'armée se conforme à la Constitution. C'est cela la mystique nationaliste qui crée une Algérie imaginaire et abstraite que vous opposez à des Algériens en chair et en os et qui, pour vous, sont des traîtres. Vous n'osez pas le mot, mais votre écrit le suggère clairement. Que vous le vouliez ou non, chaque Algérien est attaché à son pays et vous n'avez aucun droit de nier le sentiment patriotique des uns ou des autres. Même sur les harraga, preuve tragique du bilan désastreux de votre gouvernement, vous n'avez pas le droit de porter un tel jugement. Le précédent chef du gouvernement a même eu l'outrecuidance, sans rire, d'affirmer lors d'un colloque à Alger que les harraga quittent le pays pour se marier avec des blondes ! Voilà le personnel politique qui nous est imposé sans qu'il soit élu, caractérisé par l'incompétence et l'arrogance que cache mal une surenchère nationaliste cousue de fil blanc. Vous n'avez pas le monopole de la patrie, M. Ould Kablia. Boussouf avait les circonstances atténuantes : nous étions en guerre, mais vous, vous n'en avez aucune. Nous ne sommes pas en guerre, à moins que vous n'estimiez que votre gouvernement est en guerre contre le peuple ou une partie du peuple. Vous n'avez même pas compris mon propos sur Boussouf. Ce personnage appartient à l'histoire et il fait partie du patrimoine public, ce qui autorise n'importe qui à porter un jugement sur lui. A l'été 1962, une journaliste étrangère avait demandé à Abdelhafid Boussouf s'il avait la conscience tranquille après tout ce dont il avait été accusé. Il lui avait répondu : «Mais Madame, seuls ont les mains pures ceux qui n'ont pas de mains», reprenant le mot du philosophe allemand Emmanuel Kant. Cette réponse ne s'adressait pas à un procureur d'un tribunal mais à l'Histoire et aux générations futures. Il a justifié ce qu'il avait fait et c'est aux historiens de juger. Boussouf était marqué par l'ordre colonial injuste qu'il cherchait à détruire par la violence. La radicalité du système colonial l'a forgé dans son intolérance et dans sa suspicion. Il se méfiait même de son ombre. Comme les militants de sa génération, il portait en lui les limites culturelles de sa société, notre société figée par l'ordre colonial dans son retard sur l'Europe. Le populisme révolutionnaire dont il était l'un des représentants a rencontré un écho auprès de larges couches de la population qui aspirait à finir avec l'ordre colonial. Mais pour autant, doit-on sacraliser cette génération et la soustraire aux investigations du débat critique ? Et comment ne pas faire le lien entre les limites idéologiques du nationalisme algérien dans sa phase de formation avec l'impossibilité de construire un Etat de droit cinquante ans après l'Indépendance ? Vous me refusez le droit de réfléchir sur ce lien ? Vous n'acceptez les débats sur l'histoire que s'ils sont apologétiques et menés avec la langue de bois que vous maniez comme un ébéniste expérimenté, comme le montre votre réponse parue dans Le Soir d'Algérie. Vous faites partie de cette élite civile cooptée depuis 50 ans par l'armée et dont le bilan est négatif de A à Z. Pour faire diversion, vous jouez au nationaliste pur et dur, m'accusant d'être contre l'institution militaire et me refusant le droit d'aspirer en tant que citoyen à une armée professionnelle, moderne et surtout respectueuse de la Constitution. Vous considérez qu'une telle armée serait «aveugle, sourde, aphone, et probablement paraplégique», ajoutant même que dans les pays les plus démocratiques, l'armée est «un rempart solide… une force forcément politique…». Vous êtes dans la position du flatteur qui vit aux dépens de celui qui l'écoute. Vous flattez l'armée pour assouvir votre intérêt personnel et, ce faisant, le discours que vous tenez la met dans une impasse politique dont on ne voit pas l'issue. Les officiers et les jeunes du Service national n'osent plus se montrer en tenue de sortie les jours de fête dans les villes et villages comme il y a quelques années. Pourquoi ? Selon vous, l'armée «fait face aux dangers … dont celui de l'éclatement de l'unité intérieure…», ou plus grave «celui qui a failli emporter l'Etat, pulvériser le ciment social, plonger la nation dans un système d'un autre âge», comme si celui que nous vivons aujourd'hui était post-moderne ! C'est exactement cela la «culture Boussouf» : sans le contrôle de l'armée sur l'Etat et sans sa substitution au suffrage populaire au détriment de l'électorat composé de civils au nationalisme tiède, l'Algérie disparaîtrait ! Votre montre, M. Ould Kablia, s'est arrêtée en 1962 et votre culture politique n'a pas changé d'un iota. Vous croyez même à la régularité du «suffrage populaire tel qu'il se pratique dans notre pays», affirmant sans rire que les Algériens ont choisi leurs dirigeants. Ou bien vous êtes naïf, ou bien vous êtes cynique. Vous demandez ensuite à ce «qu'on laisse l'institution militaire achever sa mission contre les ennemis de la nation en tous genres». Je voudrais vous poser la double question suivante : qui sont ces ennemis de la nation et quand cette mission de l'armée prendra-t-elle fin ? Considérez-vous que ces ennemis sont des Algériens qui veulent détruire leur propre nation ? Je suspecte que tout ce discours irréaliste ne serve qu'à cacher un intérêt personnel : celui d'être désigné et non élu à des fonctions officielles. La preuve ? Vous étiez déjà préfet à Oran quand j'étais lycéen ; je vais bientôt partir à la retraite et vous êtes encore ministre ! En sociologie politique, la privatisation de l'autorité publique s'appelle néo-patrimonialisme. L'Etat y est considéré comme un patrimoine d'une élite civile qui demande à l'armée d'être la seule source de légitimité et unique organe de cooptation de responsables politiques qui y trouvent une rente à vie juteuse. Et tant pis pour l'Algérie et ses intérêts supérieurs, et tant pis pour l'avenir des générations futures. Après moi, le déluge. J'arrête là cette lettre ouverte, mais je voudrais vous renvoyer à mes livres et articles relatifs à la
«régression féconde» que vous citez en ironisant. Vous n'y avez pas réfléchi parce que pour vous, l'alternance électorale — que l'armée aurait pu garantir — est la fin d'un monde, celui de la cooptation qui permet de ne rendre des comptes ni à l'électorat ni à la justice en cas de mauvaise gestion des ressources publiques. L'armée est généreuse, et il suffit de la flatter. Mais un jour, ses officiers se rendront compte que le jeu ne vaut pas la chandelle et accepteront des réformes comme celles mises en œuvre en Amérique latine, où un pays comme le Brésil est en train de devenir un géant mondial. Je vous transmets, malgré tout, mes salutations patriotiques de l'étranger, où même si «on n'emporte pas la patrie à la semelle de ses pieds», elle reste, qu'on le veuille ou non, dans le cœur.
*Lahouari Addi Professeur des universités
Caricature de Dario Castillejos /Mexico


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.