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L'université algérienne entre naufrage et survie
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 10 - 11 - 2011

En ces temps d'incertitude, de révoltes et de soulèvements, les élites politiques de notre pays semblent recentrer le débat sur des questions marginales et de peu d'intérêt pour la collectivité nationale telles que le prix de l'huile, du sucre et des patates alors qu'en vérité quiconque sait que le nœud gordien de la crise multidimensionnelle dont souffre l'Algérie se trouve du côté de l'université. Celle-ci va de mal en pis et ne fait que renforcer davantage la remarque vieille de vingt ans déjà du feu président Mohammed Boudiaf «l'école algérienne sinistrée». L'université algérienne est la parfaite image du mal qui ronge tout le pays s'il l'on s'accorde à dire qu'elle est censée être l'anticorps de la société contre les microbes de la corruption, des passe-droits et de l'injustice. Ironie du sort, le peu de voix qui s'élèvent ça et là pour revendiquer le changement du régime politique en place et du système social qui lui sert de cadre général ignorent ou négligent le rôle de «la société de la connaissance» dans la mise en œuvre sinon la fécondation des graines d'une «conscience collective» critique et responsable. Entretemps, l'université a fait fausse couche et n'a en effet pu se prendre sérieusement en charge ni matériellement, ni pédagogiquement ni encore moins moralement. Les responsables politiques ont en ce sens, sous le fallacieux prétexte de démocratiser l'enseignement à tous les échelons, privilégié une massification outrancière des effectifs universitaires. Le Bac, autrefois brevet-sésame pour l'entrée au monde professionnel, s'est dévalorisé de lui-même pour n'être en fin de compte qu'une simple formalité de passage du palier secondaire au supérieur. Il semble qu'on est plus dans la logique de gestion des flux que dans une perspective d'édification d'une stratégie nationale, globale et cohérente de «recherche scientifique». Pour preuve, en dépit d'une masse estudiantine qui dépasse de loin un million et demi, l'Algérie peine encore à se relever de sa chute.
Dans cet esprit et pour être plus clair, il convient de savoir que la plupart des diplômes sur lesquels débouchent les formations universitaires ne donnent pas vraiment le bagage intellectuel, scientifique et philosophique de base de nature à assurer dans l'avenir à l'étudiant une véritable insertion dans la vie active. Les raisons de cette défaillance tiennent généralement au fait qu'au sein de nos facultés, en amont, l'administratif a tué le pédagogique, le statut tant convoité du recteur ou du président de l'université, administrativement et hiérarchiquement plus valorisé a empiétiné en aval sur celui du simple enseignant, pédagogiquement plus utile. En d'autres termes, les conseils scientifiques des universités ne pèsent rien ou presque devant le pouvoir administratif du rectorat. Cela pourrait créer à plus ou moins brève échéance, une quasi-dépendance de l'institution pédagogique (enseignants, maîtres de conférences, chercheurs et professeurs) de l'appareil administratif (chef de département, vice-recteurs et recteurs) et rend par conséquent l'université fragile et sujette tout autant aux injonctions politiques qu'aux pressions et marchandages partisans de tout ordre. Il est à noter que la multiplication des mouvements de protestations au sein de l'université algérienne est due la plupart des fois à cette faille monumentale et ce vide gigantesque entre celui qui gère, peu connaisseur de la pédagogie et celui qui dispense le savoir, peu connaisseur de la gestion, c'est-à-dire qu'on n'a pas pu jumeler en une seule fonction la gestion et la pédagogie, un enseignant-administrateur serait automatiquement plus compréhensif et plus sensible à la vie étudiante et ses problèmes qu'un administrateur tout court. Le deuxième point, important de par sa relation directe avec le quotidien de l'étudiant est le problème de la formation universitaire en elle-même, la grande majorité de nos étudiants (plus de 60%) sont orientés vers des filières auxquelles ils ne montrent aucun intérêt. Faute de places pédagogiques, les instituts et universités se voient empêtrés dans l'embarras de choix car d'une part, ils ne peuvent point satisfaire aux propositions de l'étudiant exprimées dans sa fiche de vœux. D'autre part, les filières d'excellence telles que: médecine, pharmacie et interprétariat sont refusées aux étudiants qui ne remplissent pas l'exigence de moyenne générale qui y donne accès alors que l'on sait par expérience que les notes obtenues à l'examen final du baccalauréat ne reflètent objectivement pas le niveau réel de l'étudiant.
Bien plus, peu d'instituts ou de facultés préparent des concours d'entrée et si ceux-ci sont organisés, l'embûche de la moyenne demeure toujours un sérieux handicap, combien d'étudiants qui ont du génie se sont vus en fin de parcours scolaire recalés du système universitaire en raison de l'incompatibilité de leur choix avec ce qu'ils étudient, la motivation et l'amour de ce que l'on fait sont des conditions sine qua non pour persévérer et aller loin dans les études. Le troisième point est inéluctablement lié aux performances universitaires et à l'épanouissement personnel de cet être fragile «l'étudiant» sans qui toute l'institution universitaire n'aurait aucune raison d'être, à ce titre, force est de constater qu'il est et demeure pour reprendre la phraséologie largement en usage ces derniers temps dans la rue algérienne «un mendiant». Dépourvu de moyens matériels et financiers et harcelé par les problèmes du logement, celui-ci n'a qu'une seule idée en tête, réussir ses études avec beaucoup moins d'efforts possible. Ainsi «la culture de la bouffe», celle de la survie et de «el-harba» se sont-elles mariées avec «la bureaucratie administrative» afin de saper ce qui reste d'espoir dans les consciences. La fuite et l'exil des compétences nationales vers des cieux plus cléments a vidé l'Algérie de son sang et de sa sève nourricière, «la matière grise» pouvant la désengorger du bourbier dans lequel elle est noyé ne croit plus au changement. En ce point, il est digne de rappeler que pas moins de 20 000 étudiants sont déjà partis poursuivre leur cursus en France et dont le retour reste fort compromis. Pire, le rapport de l'étudiant algérien au savoir est ambigu, maladif et conflictuel en raison de ce manque plus que flagrant de la «culture livresque». En ce point, il est digne de dire que l'université algérienne est devenue «une kermesse à diplômes», une sorte d'usine de titres et non plus ce «think tank» ou sanctuaire du savoir capable d'éclairer la voie à la société. Pour s'en convaincre, il ne suffit qu'à jeter un coup d'œil dans les bibliothèques universitaires où l'étudiant ne voit le livre qu'entre les mains du bibliothécaire, il n'y a plus cette culture transmissive, fraternelle, amicale et charnelle entre les deux mondes (lecteur/ étudiant) d'un côté et (livre/savoir) de l'autre. C'est pourquoi, on sombre dans une certaine «culturophobie» hallucinante, le matérialisme «ce fléau pervers» ayant envahi les mentalités conjugué aux effets de la paupérisation de la masse estudiantine n'a laissé en effet aucun espace de respiration pour la lecture, le rêve et les nouvelles perspectives. Ce genre de lecture qui stimule l'esprit de synthèse, agrandit les facultés créatrices et incite à l'imagination est mis à la marge et remplacé par le pessimisme et la «tchache» sans intérêt dans les forums d'internet et cybercafés. L'étudiant de bon gré ou sous la contrainte, fuit le savoir et construit cet espace qui n'est propre rien qu'à lui: «la survie végétative», même la presse ne l'intéresse pas car il est, comble de malheur, incapable même d'acheter un journal de 10 dinars. Plus besoin de dissertations philosophiques ni de schémas techniques ni de chiffres pour situer le malheur de l'université algérienne qui, au lieu de construire des univers de prospection sociale, s'est à son corps défendant, cloîtrée à la marge de la vie politique dans un réduit à la fois «asocial» et «extra-social». A cet effet, des termes comme «hchicha talba maîcha», «lkeria bekri» ou le terrible mot «à quoi servent les études ?» remplissent le lexique de misère, du reste bien formateur de l'architecture mentale du simple étudiant. Mais est-ce un résultat de la logique du «formatage des esprits» induite par les programmes universitaires ou c'est vraiment la conséquence du «réetalonnage» de l'échelle des valeurs sociales ces dernières décennies? Autrement dit, l'institution universitaire est-elle atteinte par la maladie contagieuse du «désordre social» au point de devenir inerte, impotente et de consacrer la «retardo-cratie» comme valeur sacro-sainte? Le tableau est on ne peut plus sombre et ne pourrait qu'être plus catastrophique dans les années à venir si l'institution universitaire poursuit sa marche à ce «rythme de tortue», surtout lorsque l'on entend ce fameux slogan de «démocratisation du savoir» qui revient comme une litanie à chaque fois que l'on essaie d'en établir un bilan réel.
Mais pourquoi l'on est souvent obligé d'aller puiser aux vastes déserts du désespoir pour qualifier l'université algérienne? Nos facultés cachent-t-elle souvent leur destin au revers de la médaille? Pourquoi nos universitaires ne produisent-ils pas? Est-ce un problème d'encadrement et de moyens ou de mollesse et de fainéantise? Il n'y a pratiquement pas de revues spécialisées, ni de publications scientifiques dignes de ce nom. On s'étonnerait pas donc si nos facultés sont classées bas de gamme au niveau continental et arabe. La modernité n'est-elle pas avant et après tout la culture du savoir? Le progrès n'est-il pas la belle vue, la clarté des perspectives, la netteté des intentions et aussi et surtout la volonté de mettre un terme à l'arriérisme au sens polysémique du terme (religieux, politique, démocratique et même sexuel)? Or, à l'intérieur de nos universités, rien ne marche en faveur du progrès des idées et de la hauteur de la vue. Le «bradage du savoir» a malheureusement poussé «le sens de la raison» dans ses derniers retranchements. Le fanatisme et l'intégrisme ont pu facilement y élire domicile. L'ignorance et le dogmatisme viennent principalement de cette absence de débat contradictoire et de vision d'avenir, facteurs primordiaux pour l'avancée de la pensée et comme l'a si bien rappelé l'enfant terrible de la littérature maghrébine «Rachid Boudjedra» dans ses douloureuses «lettres algériennes» «la réaction politique ou la régression religieuses sont antinomiques avec l'esthétique». En effet, le manque de perspectives originales a laissé les responsables gérer administrativement au jour le jour ce qui s'apparente au savoir en raison des budgets insuffisants octroyés à l'enseignement supérieur. En plus, il existe peu de coopération inter-universitaire que ce soit dans le système de parrainage des thèses ou tout simplement d'échanges. Cela est dû notamment à cette fameuse préoccupation gouvernementale d'«algérianiser» l'enseignement initiée depuis les années 80, plus de chercheurs-coopérants ni de délégations scientifiques ni encore moins de stages à l'étranger pour les étudiants-doctorants. En toile de fond, l'on remarque un manque d'investissement scientifique et de travail de proximité pour insérer le flux de diplômés dans le circuit économique, l'étudiant n'a en fin de parcours qu'un seul statut qui l'attend «diplômé-chômeur», un nouveau phénomène dramatique qui détruit l'Algérie de l'intérieur et qui, rappelons-le bien, est l'origine de tout le printemps arabe. C'est effectivement dans cette carence qu'il faille chercher les tenants et les aboutissants de ce «désordre des choses» dont l'université est la seule victime. Prenons à titre d'exemple le système (L.M.D) (licence/ master/ doctorat) que les étudiants surnomment par une sorte d'ironie instructive et révélatrice «le système malédiction», toute la communauté universitaire estime qu'il relève de l'hybridité dans la mesure où il est conçu à l'origine pour des sociétés libérales où la culture du travail constitue «le centre de gravité» de la machine économique. Bien plus, ce système nécessite une très grande spécialisation scientifique des encadreurs. Les unités d'enseignement, contrairement aux modules du système classique s'appuient sur un contrôle continu des connaissances qui, soit dit en passant, ne convient plus, du moins dans le moment actuel, à des facultés où les deux tiers du cursus universitaire sont passés dans les différents débrayages et «bricolages» et dont la culture des grèves en est devenue la règle d'or. Pire, celle-ci s'est transformée en une jumelle active du système éducatif en général et universitaire en particulier. Entré en vigueur suite à l'accord de l'union européenne avec l'Algérie sur la création d'une zone de libre-échange, n'est appliqué que depuis la rentrée universitaire 2004/2005. Ce système, après bientôt sept ans d'existence n'est en réalité que l'ombre de lui-même car il est un «copié-coller» du modèle anglo-saxon sur un système universitaire qui jusque-là n'a même pas pu absorber le système classique d'enseignement (licence/magistère/doctorat) dont les failles ont justement sacrifié l'avenir de toute une génération considérée par les spécialistes comme «analphabète bilingue». Une génération qui, de surcroît baigne aujourd'hui encore dans ce bilinguisme hybride car ni totalement arabisante ni vraiment francisante, elle vit une sorte de «schizophrénie linguistique» terrible entre les deux sphères arabophone et francophone. En vérité, le système L.M.D n'est qu'une greffe inadéquate sur un système classique maladif et contaminé. Ce dernier a déjà déstructuré le quotient linguistique et intellectuel de l'étudiant algérien et l'a complètement déculturé surtout en matière de capacité langagière et communicationnelle «on ne peut jamais arriver à une réelle justice sans une langue juste» dirait le sage chinois Confucius (559-479a.j) il y plusieurs siècles. En suivant le fil conducteur de cette analyse, l'on découvre facilement que tout le malaise dont souffre notre pays est lié «aux enjeux linguistiques», c'est d'ailleurs la conclusion à laquelle est arrivé le linguiste «Mohamed Benrabah» dans son ouvrage «langues et pouvoir en Algérie: histoire d'un traumatisme linguistique». Le dilemme étant fort voyant: démocratiser et abrutir ou sélectionner et priver des masses d'étudiants du savoir alors que l'on a longtemps oublié la troisième variable: l'encouragement de la recherche scientifique mais comment dirait-on? Les pôles de recherches régionaux, le renflouement des caisses des universités avec un contrôle drastique de leurs dépenses. Conditions pouvant créer dans les premiers temps un climat qui motive et initie l'étudiant à la découverte. L'université devrait être un lieu de rencontres et d'échanges culturels et non pas un espace clos et étanche où l'expression libre et sereine serait la grande absente. Par ailleurs, l'étudiant d'aujourd'hui n'arrive plus à s'exprimer correctement, à intervenir en public et à modérer un débat d'idées. La dégringolade des performances universitaires est telle que les préoccupations estudiantines ne dépassent pas le cadre de l'évaluation trimestrielle ou semestrielle des unités ou modules d'enseignement proposés, l'évaluation sommative a pris le pas sur l'évaluation formative, «la psychose des notes» habite les cervelles, la rigidité du système d'enseignement (méthodes mécanico-répétitives d'enseignement) a «robotisé» les réflexes de l'étudiant qui devient à force du temps tout volontiers accro à la rumination de ce qui a été dit qu'à la réflexion et à la pensée, ce que l'on appelle «le par-coeurisme» est devenu un sacerdoce, le sens critique est malheureusement banalisé et les étudiants finissent par «sécher» les cours magistraux au demeurant plus bénéfiques car la stratégie des «poly-copies» est là pour les aider à surmonter le défi d'apprentissage pratique aux amphithéâtres. Pire la compétence en ses trois dimensions (savoir, savoir-faire et savoir-vivre) n'est plus cultivée comme vertu cardinale, «la méritocratie» si elle existe, est devenue en quelque sorte un critère subjectif, il ne suffit qu'à voir le trouble et tous les marchandages qui entourent les concours pour l'accès à la «post-graduation». Ce qui serait d'autant plus inquiétant quand on pense au problème crucial du renouvellement des élites. En Algérie, l'alternance au pouvoir et l'alternance au savoir sont deux variantes étroitement imbriquées l'une à l'autre. On a, s'il l'on ose dire, «desélitisé» les élites et «élitisé» les cadres, on ne veut plus de ces «honnêtes hommes» éclaireurs comme on dit ni de ces cultivés ni encore moins de gens sensibles à la vie sociale mais seulement de cadres influençables, d'une pseudo-élite malléable et de têtes qui ne pensent qu'à remplir le ventre. En seulement quelques décennies, la figure de l'intellectuel a complètement déserté l'environnement immédiat de l'université, l'esprit végétatif, matérialiste et néolibéral a écrasé les bourgeons de l'engagement social dans les racines. C'est triste de voir tant de nouvelles infrastructures construites à l'européenne et conformes aux normes universelles avec tant de milliards de dinars dépensés mais dont les structures ne dispensent malheureusement pas un savoir cohérent ni ne garantissent des compétences certaines pour l'avenir, le monde de l'après 11 septembre 2001 et de la mondialisation-sauvage nécessite une véritable «recapitalisation» de la recherche scientifique et des compétences nationales afin de pouvoir gérer le pays et éviter le chaos. Cela ne sert absolument à rien d'esthétiser les universités à l'extérieur sans «substantialiser» à l'intérieur en quantité et en qualité le savoir, les technologies de l'information et de la communication (accès gratuit à l'internet), les ouvrages de vulgarisation scientifique et les revues littéraires…etc. La culture comme dirait le philosophe français «Michel Onfray» devrait être jetée à la rue sans être abandonnée sur le trottoir.
Par ailleurs, le dossier le plus chaud de l'université algérienne reste incontestablement celui relatif au travail syndical, «la culture de la rente» a exterminé l'esprit patriotique de l'Algérie au point où les associations et comités estudiantins sont beaucoup plus une excroissance du régime et de la société politique qu'une courroie de transmission des doléances des étudiants auprès des responsables universitaires. La gangrène ne cesse de se répandre et de contaminer le corps social en son ensemble. Aussi s'interroge-t-on sur sur le rôle de cet étrange organe administratif que l'on appelle à juste titre «office national des œuvres universitaires» «O.N.O.U» qui, centralisation oblige, n'arrive plus à gérer toutes les œuvres universitaires à travers tout le territoire national, les scandales à répétitions dont il a fait l'objet prouve, si besoin est, l'inefficacité de son existence. On ne sait plus si la récente apparition des sociétés de gardiennage est un pas vers le sauvetage de l'université comme on le prétend ou une stratégie perfide visant essentiellement sa privatisation et l'installation en son cœur du virus du néolibéralisme. Il est certain par ailleurs et ce n'est un secret pour personne que le concept de «Corporate University», n'est pratiquement pas applicable en Algérie tant que la rentre pétrolière reste le moteur de l'économie nationale et la compétitivité des entreprises et du tissu économique de simples «rêves d'enfants». Si l'on importe la culture pragmatique typiquement américaine, on devrait par conséquent bannir du vocabulaire universitaire ces retards intempestifs liés notamment aux interminables fêtes, aux stratégies de «ponts» et de jours fériés. La malédiction du pétrole qui touche les pays arabes n'a pas épargné la pauvre Algérie. Pour que notre pays réussisse son décollage économique à l'image des pays émergents du (B.R.I.C.S ), la politique du «pétrole contre culture» qu'a suggérée l'écrivain algérien «Yasmina Khadra» devrait être strictement envisageable, la recherche scientifique est la clé de voûte pour une réelle dynamique nationale et la sortie de crise serait immanquablement l'œuvre d'intellectuels et d'universitaires conscients en corrélation avec la classe politique. A ce niveau, on ne pourrait qu'affirmer que l'échec du mouvement citoyen et de la société civile algérienne est à mettre sur l'actif de cette démission morale et de cette défaillance de la pensée chez notre élite. On est plus dans ce genre de «misère de l'intellectualisme» dont a parlé le sociologue «Lhouari Addi» que dans cette «culture intellectualiste» généreuse, solidaire et engagée qui dénonce et combat la misère, les inégalités sociales et la corruption car même «le sens critique» n'a plus voix au chapitre dans le microcosme de notre université et chez notre intelligentsia. En vérité l'université algérienne est devenu «crisogène» pour reprendre le terme du chercheur «Farid Cherbal». C'est dans cette optique que l'on peut parler de sa «la dépersonnalisation». En dernier ressort, l'espoir reste permis lorsque l'on voit que le pays table sur une réserve de change de plus de 174 milliards de dollars qui n'attendent qu'à être exploités à bon escient.


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