S'il y avait un endroit des plus surs, des plus sécurisés, c'était le QG de la police. L'idée d'être criblé de balles à l'intérieur de son bunker n'avait jamais effleuré nos esprits. Pas plus que celui de Ali Tounsi. Il n'avait jamais imaginé qu'il allait connaître sa fin de la main d'un ami. Et pourtant ! Mais qu'est-ce qui avait poussé un ami fidèle à agir en assassin et de se mettre au ban de la société ? Oultach, ce colonel qui jouissait de l'estime de son entourage, était si courtois, si gentil, mais, par cette brutalité inattendue, il avait franchi deux pas dans l'horreur en signant, lui aussi, sa propre fin. Les balles qu'il avait laissées échapper de son révolver, en direction de son chef, n'étaient pas destinées à lui faire peur, ni à le blesser. Mais à le tuer. Souvenons-nous à cette époque que le Dgsn avait décidé d'autonomiser les services du renseignement, non pas pour les mettre à l'abri contre d'éventuelles influences extérieures, mais, pour mieux régner. Ce faisant, il ignorait, que par cette fâcheuse décision, il allait provoquer, sans le savoir, une profonde scission au sein de la police qui avait failli causé un péril en la demeure et ce, par la faute de quelques éléments zélés qui allaient tout au long de cette période, briller par des coups bas, des règlements de compte et des pratique dignes de vrais bandits à l'encontre de leurs propres collègues. Les conséquences étaient désastreuses, parce que des policiers ,avaient été jetés injustement en prison pendant que d'autres étaient marginalisés ou révoqués arbitrairement au nom d'une justice quasi mafieuse. Cette malheureuse décision n'a pas été du goût de certains et allait constituer la pomme de discorde jusqu'à rompre des liens jusqu'au sommet de la haute hiérarchie administrative. Le torchon brûle entre les supers flics en puissance à telle enseigne qu'on s'évitait d'échanger de civilités et de se serrer la main. C'était, par la suite, à chacun de bomber son torse pour prouver son ascendance et montrer qu'il était le vrai capo. Le pourrissement était arrivé à telle enseigne qu'il était devenu pour l'un, une histoire de fierté et d'honneur et pour nl'autre, une question purement existentielle. C'était le début d'une guerre de tranchée sous l'œil médusé des policiers et celui des journalistes avertis qui en tiraient profit de ce combat ridicule de deux coqs échaudés. Et nous voilà devant deux camps qui s'entredéchiraient en se triant, sans discontinuer, à coups de rapports et de déclarations, souvent truffés de mensonges. Mais, rien ne fut et on continua pourtant à le faire, jusqu'au jour où on utilisa subtilement, une certaine presse servile à des fins criminelles qui fit sortir dans ses colonnes, un article assassin qui alla provoquer une tragédie d'ampleur nationale. C'était un brûlot, souvenons-nous, qui révélait le contenu d' une enquête confidentielle à propos d'une importante affaire de malversation dont l'artisan n'était autre que le colonel Oultach, un ami et proche collaborateur du patron de la police C'était cet article qui avait brusquement chauffé à blanc Oultach et l'entraîner à tuer, à coup de révolver, Ali Tounsi, pour lui faire payer le prix de l'injure et de la trahison. On ne pouvait penser autrement que de dire que c'était grâce à l'aide de cette presse complice qu'on avait réussi à manipuler ce colonel jusqu'en faire de lui une machine à tuer pour éliminer physiquement un adversaire aussi têtu qu'El Ghaouti. La suite, on nous l'avait fait relater : Après avoir maîtrisé l'auteur, on avait fait ensuite évacuer du bureau ce qui restait de la victime, mais, au lieu de préserver les lieux du crime, on l'avait investi comme pour détruire, volontairement ou par mégarde, de potentiels traces révélateurs. Mais, ce qu'on ne le savait pas, jusqu'à récemment, c'était cette main experte qui avait détourné du bureau, quelques précieux documents confidentiels pour une destination, pour le moins inconnue. Chacun y voit dans ce scénario une histoire rocambolesque qui résonne, beaucoup plus comme une manipulation calculée, plutôt qu'à un concours de circonstances dû au hasard. C'est un raisonnement simpliste, mais qui tient, à mon avis, quand même la route. On pense toujours que c'était un coup magistralement monté, un travail digne de celui des grands flics professionnels de vraiment talentueux. Mais, au fait, pourquoi ces vieux colonels ne s'étaient-ils pas suffit seulement à leur retraite de militaires pour laisser la place aux jeunes compétences? S'ils étaient sages et intelligents, on n'en serait jamais arrivé, ni à la manip, ni à cette misérable tragédie.