Le pouvoir algérien est sur la défensive depuis le début des soulèvements populaires en Tunisie et en Egypte (rappelons-nous des émeutes du 5 janvier 2011 à Alger). Il sait qu'il n'a eu qu'un sursis momentané et que tout le monde l'attend au tournant. Nous ne savons pas ce qui se trame au sommet et quelle est la nature exacte des tractations et luttes de clans qui y ont lieu. Il est clair, cependant, que l'attaque contre In Aménas a mis à nu les contradictions qui minent le pouvoir mafieux et ses équilibres internes. La lettre ouverte de Monsieur Malti au chef du DRS, qui a été publiée par El Watan, ainsi que les affaires de corruption à Sonatrach, qui reviennent sur le devant de la scène, de même que la recomposition qui a eu lieu au sein du groupe de courtisans chargés de chapeauter l'opposition-Potemkine, tous ces éléments ne peuvent être interprétés que d'une seule façon : la caste au pouvoir commence à s'inquiéter sérieusement pour son avenir et cherche désespérément à éviter une explosion populaire qui risque de la balayer à tout moment – l'image de Moubârak derrière les barreaux sur un brancard doit hanter les nuits de pas mal de barons du régime mafieux pourri. Une chose est sûre : cette caste mafieuse, qui a eu tout le loisir de tisser sa toile et de renforcer son pouvoir durant le long « règne » de Tab Djnânou (14 ans), règne qui a vu les généraux putschistes passer un pacte avec les représentants civils de la nouvelle bourgeoisie issue du socialisme de la mamelle des année 60-70 afin de se partager le gâteau et jouir en paix des richesses de l'Algérie, cette caste mafieuse donc est incapable de faire autre chose que piller et s'enrichir sans rien donner en contre partie au pays. Elle est incapable de produire une seule grande personnalité digne de ce nom et ce dans n'importe quel domaine. Tout ce qu'elle peut produire ce sont des Rafiq Abdelmoumen Khalifa (né en 1966, donc pur produit de l'Algérie « indépendante »), des gosses de riches qui croient qu'on peut acheter et berner tout le monde tout le temps rien qu'en agitant des liasses d'euros. Nous avons devant nous aujourd'hui le résultat d'une faillite morale et intellectuelle générale programmée. La caste qui dirige le pays depuis 1962 a épuisé tous ses stratagèmes. Ceux qui la composent ressemblent aujourd'hui à ces vieilles prostituées qui sont les seules à ne pas voir qu'elles ne peuvent plus séduire personne et que ce qu'elles ont de mieux à faire est de se cacher pour se faire oublier et essayer de se faire pardonner leurs erreurs de jeunesse. Le pays sombre et la société se décompose lentement mais sûrement. Chaque jour que Dieu fait nous apporte son lot de scandales et de crimes horribles commis sur des enfants innocents et sans défense. Ce sont là des signes qui ne trompent pas. Le peuple algérien est tétanisé et comme anesthésié. Les terribles années de sang durant lesquelles nous avons vu se commettre les crimes de masse les plus monstrueux, crimes qui demeurent à ce jour impunis, ont très certainement joué un grand rôle dans cette perte totale de sens moral que nous constatons aujourd'hui. Le peuple algérien se rend bien compte, cependant, que ceux qui sont supposés gouverner le pays ne sont que des incapables, des voleurs, des escrocs et des bandits, couverts et protégés par des voyous et des assassins qui ont à leur service des moyens de répression énormes et un appareil judiciaire totalement asservi et télécommandé à partir des bunkers hautement sécurisés baignant dans le luxe et le confort où résident les vrais et seuls maîtres du pays. Le peuple sait très bien à qui il a affaire. Et quand je dis le peuple, j'entends par là tous ceux et toutes celles qui n'ont que leur maigre salaire lorsqu'il existe, que l'inflation galopante ronge chaque jour un peu plus, salaire gagné souvent difficilement et au prix de maintes humiliations. Ces Algériens et ces Algériennes-là savent qu'il n'y a plus rien à attendre des vieux canassons sur le retour qui sont aux commandes et de leurs rejetons pervertis à qui ils comptent laisser le pouvoir en héritage. Ceux et celles qui sont nés en 1990 ont aujourd'hui 23 ans. Ce sont des jeunes hommes et des jeunes femmes qui n'ont connu ni l'ère de Ben Bella-Boumédiène, ni celle de Chadli. Ils ont certainement des attentes, des rêves et des espoirs. Après de longues études, la plupart d'entre eux se retrouveront devant un mur, car la caste mafieuse au pouvoir a été incapable de leur préparer – depuis 1962! – un avenir acceptable, c'est-à-dire un travail, un logement et un minimum de conditions pour mener une vie décente. Cette caste mafieuse a détruit tout ce qui pouvait contribuer à faire de l'Algérie un pays où il fait bon vivre. Ben Bella avait dès le départ donné le signal en traitant un représentant de la bourgeoisie nationale productive de suppôt du capitalisme international. 50 ans après, nous n'avons pas de bourgeoisie nationale productive, mais le pouvoir des charlatans a mis à la place une bourgeoisie prédatrice, créée de toutes pièces grâce à l'argent du pétrole, qui ne maîtrise qu'une seule activité : l'import-import. Nous n'avons donc pas de PME-PMI, pas de petits entrepreneurs, ni d'artisans qualifiés en nombre suffisant. Nous n'avons plus de paysans, ni d'agriculture, malgré une révolution agraire qui était supposée moderniser cette dernière. Notre système éducatif, bien qu'ayant connu un développement exponentiel sur le plan quantitatif, ne produit aujourd'hui que des cohortes de plus en plus nombreuses de diplômés de l'université qui ne trouvent pas de travail. C'est cette masse de jeunes hommes et de jeunes femmes instruits qui se retrouvent devant un mur qui fera bouger les choses, car elle n'a pas d'autre choix si elle veut vivre sa vie. La caste mafieuse, trop occupée à piller le pays et à amasser des fortunes factices qui ne correspondent à aucune activité créatrice d'emplois, de services ou de savoir-faire national susceptible de remplacer la manne pétrolière qui tarira un jour ou l'autre, ne peut rien pour eux. Elle est incapable de penser leur avenir et d'élaborer la moindre stratégie pour redresser la situation. Ses jours sont comptés.