Les adversaires supposés de l'islam politique en Algérie sont d'un poids considérable et d'une influence pas des moindres au sein de l'élite francophone, et des quelques figures de proue de l'art et de la culture en langue arabe. Pourtant, une minorité parmi eux se « trouve » le courage et l'honnêteté intellectuels d'oser des choses sensibles et positives que j'appellerais avec satisfaction les « aspects démocratiques » de l'Islam. A leur crédit, contrairement aux éradicateurs et suppôts du pouvoir qui développent outrageusement la phobie de l'islam, ils semblent reconnaitre implicitement que leur religion ne s'oppose pas nécessairement à une forme de gouvernance moderne, représentative et responsable, donc démocratique. Mon but dans cet écrit n'étant pas de diminuer leur perception, que je ne partage certainement pas ; et, j'ai de ce fait, entamé ma démarche par des propos de gratitude, reflétant la vérité pour situer ma critique de leur évolution dans le contexte présent et passé de l'Algérie. Dans cette même trajectoire, j'espère contribuer à conjuguer la compréhension de notre réalité culturelle et politique avec la démocratie importée, voire imposée. En exprimant avec force la tendance idéologique que j'estime être le choix de la majorité, certains lecteurs pourraient mettre en doute, a raison d'ailleurs, mes convictions démocratiques. Mais en écrivant ce billet, je soutiens et défends le respect des libertés individuelles et collectives pour une société algérienne harmonieuse, où il n'y aura plus de place à la distinction entre algériens. Les modernistes algériens qui assurent par leur opposition à l'opposition, la pharaonité du régime, décrivent la démocratie occidentale d'une manière concise comme un système universellement accepté. Le problème est que les occidentaux eux-mêmes ont tendance à rejeter cette définition de leur modèle, reconnu partiellement incompatible avec nos valeurs islamiques, et complètement rejeté par d'autres cultures. Sans être un visionnaire, je me risque à dire que la moitié de la population mondiale rejette cette démocratie occidentale. Serait il anti-démocratique de suggérer qu'avancer obstinément dans cette direction, et contre la volonté du peuple, est une source supplémentaire d'aggravation de la problématique algérienne qui fait le jeu du pouvoir ? Si on scrute le paysage politique des grands pays européens, on relèvera généralement deux antagonistes qui s'engagent dans une lutte politique respectueuse des règles démocratiques, considérées par la majorité comme un ensemble de valeurs universelles. La scène politique algérienne est elle aussi animée par deux courants politiques naturellement inconciliables. Les islamistes faibles et en rangs dispersés, les uns accusés de faire de la religion un fond de commerce, représentent une force politique idéologiquement homogène, et toujours en attente de l'émergence de leaders charismatiques. Dans sa forme nouvelle pragmatique et tolérante, l'islamisme n'a jamais été aussi bien placé pour dominer la scène politique. Il n'est pas nécessaire d'avoir fréquenté les grandes écoles pour assimiler cette nouvelle forme de disputer le pouvoir, qui attire par sa simplicité et sa compréhension de larges foules de jeunes et de moins jeunes. Les autres, organisés en mouvements islamiques ou légalisés comme partis politiques, solidement structurés et émargeant a la rente, sont soumis au pouvoir. Leurs différences, sans vouloir aborder la complexité et l'incompréhension, disons qu'elles sont d'ordre matériel et se situent au niveau méthodologie et d' approche d'abord et de leadership ensuite. Contrairement a l'islam politique, dans cette démocratie élitiste a géométrie variable, ceux qui mènent une vie différente du système moderniste que ses adeptes veulent imposer auront à subir l'agression et l'exclusion. Ils oublient volontairement que l'émancipation et l'état de droit requièrent, non pas l'intervention des militaires, mais grâce a la volonté et a la détermination du peuple. Les modernistes brièvement aussi, que la donne actuelle du pays a conduit à se couper davantage de la base populaire, sont des groupes hétérogènes, composés de la frange séparatiste kabyle nostalgique de la France, des défenseurs sincères de la cause (culture) berbère et des renégats de ce mouvement, a un degré moindre, sans aucune incidence politique, les partisans de la laïcité composés d'intellectuels « hétéroclites »et d'arrivistes nouveaux riches qui, au même titre que l'injection de l'argent dans les campagnes électorales en démocratie, a coups de Chekara ils étouffent toute tentative d'ouverture politique ou de liberté d'expression. Sans oublier quelques éléments communistes en voie d'extinction, la brigade Trotskiste emmenée par un épouvantail féminin ainsi que les deux partis a pensée unique, FLN-RND principaux pourvoyeurs de mercenaires, ailes politiques du pouvoir réel. J'exclurai de cette énumération les authentiques nationalistes toujours attachés aux principes de l'Algérie indépendante. Sur le plan politique nos élites imbues des valeurs modernistes et des libertés qu'elles sous-tendent demeurent sourdes aux histoires toutes différentes que racontent les actes démocratiques de l'Amérique, de la Grande Bretagne et de la France sur le respect des principes fondamentaux qui régissent le bien-être dont jouissent leurs peuples. Regardez les positions respectives de ces puissances devant la tragédie qui a frappé l'Algérie en 1992 et le drame que vit le peuple d'Egypte aujourd'hui. Sur le plan social, certaines questions morales remises en cause par les courants conservateurs en Europe, sont de plus en plus contestées par la classe intellectuelle tous bords confondus. La course effrénée d'un phénomène incontrôlable qui détruit le premier représentant de l'institution sociale qu'est la famille. Je ne vois aucune chance à nos modernistes pour l'importation de telles pratiques sociales, sous aucune circonstance, en terre d'islam irriguée du sang de 1,5 millions d'algériens. Ainsi, la démocratie occidentale est entrée dans une phase de transformation rétrograde, loin de s'arrêter, elle va vraisemblablement entrainer sa négation. L'occident s'interroge déjà sur la nécessité d'une reforme ou d'un renouvellement. Quelle période de l'histoire serait une base viable pour sa reconstruction dans un habit moderne ? La Grèce antique ou les républiques marchandes du Moyen-âge ? Le libéralisme anglais du 17eme siècle ou l'âge français des Lumières ? Persuadés de notre unicité raciale, et convaincus de notre diversité ethnique et pluralisme politico-culturel, si nous n'arrivons pas à découvrir dans le cadre de cette richesse un système, qui réinvente notre espoir de voir nos droits de citoyens respectés un jour sur cette terre bénie, nos« Masters » d'outre mer, eux, ils planchent sur la question en ce début du 21eme siècle, car l'islam politique, une alternative aux pratiques détestables de la démocratie, a enjambé les frontières de l'occident. Nos démocrates suivront- ils toujours le regard de la France ? Aomar Rami