* Tweet * * * Tweet * * http://www.lefigaro.fr/international Publié le 17/01/2014 à 19:28 Malade, le président algérien, qui ne s'est toujours pas déclaré candidat, a verrouillé les scénarios du scrutin du 17 avril. «Bouteflika va bien!» Le premier ministre Abdelmalek Sellal était cette semaine en tournée en Kabylie, pour distribuer, comme à toutes les autres régions qu'il sillonne depuis des mois, des enveloppes extrabudgétaires de plusieurs milliards de dinars. Et mener campagne pour celui dont les gigantesques portraits sont brandis partout: Abdelaziz Bouteflika. Omniprésent, le chef de l'Etat à la santé précaire, a encore monopolisé l'actualité nationale ces derniers jours avec un séjour au Val-de-Grâce, où il se trouvait officiellement pour une «visite médicale routinière de contrôle». Un événement qui a contribué à raviver un vrai-faux suspense savamment entretenu: le président va-t-il ou non se présenter pour un quatrième mandat? Ses fidèles au palais d'el-Mouradia n'en ont jamais douté et les cercles politiques les mieux informés s'en sont presque fait une raison: «Il va y aller et il sera réélu.» Car personne ne peut gagner contre le candidat que se choisit le système, aussi divisé soit-il sur le scénario d'un quatrième mandat. Certains le savent et hésitent encore à se lancer pour ne pas «légitimer une élection truquée». À l'instar des partis islamistes, qui n'ont pas encore dégagé de candidat. «Nous demandons à ce que cette élection soit contrôlée par un organisme indépendant, explique Youcef Khababa, président du groupe parlementaire de l'Alliance de l'Algérie verte. Nous ne voulons pas d'une démocratie de façade.» D'anciens députés, Tariq Mira et Hamid Ouazar, et d'anciens membres du Conseil national de transition, Si Mohamed Baghdadi et Ramdane Moula, appellent d'ores et déjà au boycott des élections et au «rassemblement des forces démocratiques pour disqualifier la prochaine échéance électorale». À en croire l'inflation de personnalités qui se sont déclarées candidates sans avoir la certitude de réunir l'ensemble des signatures de soutiens obligatoires, nombreux sont ceux qui croient, ou font semblant de croire, à une alternance possible. Parmi eux: le célèbre écrivain Yasmina Khadra, un trader franco-algérien, un ancien ministre du Budget exilé en Suisse, ou encore une ribambelle de chefs de parti sans réelle base électorale, ni vraiment de programme. Le plus sérieux d'entre eux est incontestablement Ali Benflis, 69 ans, attendu par une partie de l'élite comme un messie, et qui, après une défaite contre Abdelaziz Bouteflika en 2004 et un silence de plus de dix ans, annoncera officiellement sa candidature dimanche. Enfin, un petit groupe, animé par un courant de l'armée viscéralement hostile au président Bouteflika, pense encore possible un coup d'Etat «soft» débouchant sur des élections anticipées et une transition assurée par l'ancien président Liamine Zéroual, ex-général. «Aujourd'hui, et plus que jamais, l'armée et les services de sécurité ont leur rôle à assumer dans un contexte où l'Algérie est à même de connaître une grave crise déstabilisatrice qui nécessite une période transitoire de redressement salvateur pour la République», déclare ainsi en guise de message subliminal leur porte-parole, le colonel Chaabane Boudemagh. À 67 ans, l'ex-gradé des services secrets a été appelé à se porter candidat par des comités de soutien d'«authentiques patriotes algériens» en faveur d'«une solution à la russe, voire à la "Poutine", cet ancien colonel du KGB qui a réussi à sauver la Russie.» Imperturbable, le président Bouteflika, 76 ans, a procédé hier à la convocation du corps électoral, étape juridique fixant l'élection au 17 avril et le début de la campagne électorale au 23 mars. Il s'apprête aussi à recevoir le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, samedi. Quel que soit le scénario, sa victoire est assurée. «Soit il annonce qu'il ne se représente pas, mais dans ce cas, et même s'il décède, il aura pesé jusqu'à la dernière minute pour imposer un successeur qui protégera son entourage, explique un officier du DRS (services secrets), soit le consensus le désigne candidat et il gagne, avec l'approbation du système et de tous les pays qui cautionnent sa candidature au nom de la stabilité.» Un ancien ministre relève: «Cette absence de consensus à trois mois de la présidentielle est une première. Bouteflika, en neutralisant une partie de l'armée, en alliance avec Mediene (le patron des services secrets depuis 1992), a transformé la fabrique du consensus en une machine générant de luttes intestines.» En clair, le maintien ou non de «l'homme du consensus» dépend du maintien des équilibres que Bouteflika a lui-même imposé depuis 1999 entre les clans qui se partagent le pouvoir et ses dividendes. Mélanie Matarese Nombre de lectures: 2136 Views