Foncièrement, les deux maux principaux à l'origine de la confiscation, de la dérive et de la perversion de l'Indépendance depuis le congrès de Tripoli à l'instant de la rédaction de cet article sont le parti du front de libération nationale(PFLN) et la militarisation du pouvoir et de la société. Ni le PFLN, parti unique d'une foudroyante médiocrité idéologique et humaine, ni les forces armées dites des frontières, étrangères dans leur quasi-totalité au rêve révolutionnaire et aux ambitions du peuple, n'étaient en mesure de fonder un quelconque Etat ou d'éduquer une quelconque société à la modernité et aux défis qu'impose toute indépendance nationale. Si la libido dominandi et l'usurpation du pouvoir étaient et continuent à être l'essence et la mission des forces armées, le PFLN, quant à lui, s'est chargé fondamentalement de légitimer l'illégalité et le non-droit et de détruire mentalement l'être algérien. Ce dernier, c'est-à-dire le parti du front de libération nationale, grand cercle de faussaires aux multiples satellites de rentiers et de courtisans, fut une malheureuse copie frauduleuse d'une œuvre originale mythique. D'un front pluriel pendant la guerre de libération à un parti unique à l'indépendance, le PFLN réussit sa contre-révolution et mit fin à un long et riche processus de pluralité et d'apprentissage démocratique à savoir celui du grand mouvement national. En essayant une adaptation hypocrite et manipulatrice à la nouvelle situation imposée, bon gré mal gré, par le mouvement émeutier d'Octobre 1988, ce même parti continua à dynamiter la scène politique, à étouffer dans l'œuf toute émergence d'une nouvelle élite intellectuelle et politique et à bloquer, par conséquent, toute transition démocratique et tout transfert de souveraineté au peuple. Parti-Etat ou simple appareil, le PFLN, au nom de la légitimité révolutionnaire, a été la nébuleuse contre-révolutionnaire la plus dangereuse dans toute l'histoire de l'Algérie indépendante. Tel un virus mutant, le PFLN a gangréné le corps-Algérie et corrompu l'âme des Algériens. Relisons la nature et les origines de ses apparatchiks, à des exceptions près, et nous comprendrons les stratagèmes, missions et rôles de ceux qui ont imposé à l'Algérie leur diktat et celui de l'ancienne (et actuelle) puissance coloniale. C'est dans le lit du PFLN que les enfants illégitimes du despotisme et de la recolonisation par d'autres moyens ont vu le jour, évolué et pris la tête de la décision dans les secteurs les plus stratégiques. Quant aux forces armées, nous nous posons aujourd'hui la question en quoi sont-elles héritières de l'ALN ? C'est-à-dire d'une armée de libération issue du peuple et luttant pour lui avec lui à l'intérieur d'une terre conquise ?? Ou bien sont-elles héritières de la dite armée des frontières dont l'histoire, la composante et le rôle restent occultes voire douteux ?? Au moment où l'armée de l'intérieur c'est-à-dire des wilayates survivait à la politique de la terre brûlée de la France coloniale des IVème et Vème Républiques ainsi qu'à la famine et au manque d'armes, celle des frontières vivait ses joies et plaisirs, complotait, fermait les vannes des armes et préparait son « assaut » contre ses propres compatriotes à la seule fin de prendre le pouvoir et le mettre entre les mains du couple Benbella-Boumediène, grands serviteurs de façons directes ou indirectes, conscientes ou inconscientes de l'alliance franco-égyptienne dont les origines remontent à la fin des années 20 et au début des années 30 du XIXè siècle entre Charles X puis Louis-Philippes Ier et Méhémet Ali Pacha. Ce dernier n'avait-il offert ses services à la France de la seconde Restauration (1815-1830) pour conquérir les trois régences de Tripoli, de Tunis et d'Alger ? Si l'ALN était un acteur principal dans la lutte de libération nationale et de l'Indépendance, l'ANP a été synonyme de putschs, de dictature et de militarisation des esprits et de la vie publique. Entre le PFLN et l'ANP, le concubinage était légal jusqu'au semblant divorce de mars 1989 où les militaires représentant le 1/5ème (800 officiers) des 4000 membres du comité central avaient soit disant démissionné. Malheureusement, non pour rejoindre les casernes et la noble mission qui était la leur mais pour infiltrer et pervertir la classe politique embryonnaire et la presse écrite naissante. Aux quelques chefs décideurs dont l'histoire était honteuse et douteuse, il fallait une légitimité, cette fois-ci, non révolutionnaire mais « républicaine ». Ce qui a accompagné la création, la manipulation et la gestion du FIS jusqu'à l'arrêt du processus électoral de 1991, la dissolution de l'APN et le coup de force contre feu Chadli Bendjedid. Du parti-Etat au pouvoir militaire et/ou des militaires à la façade civile, l'Algérie de demain, celle de la deuxième République, doit rompre définitivement aussi bien avec le PFLN qu'avec l'Etat policier. Car si le couple ALN-FLN incarnait un rêve collectif, celui du PFLN-ANP-DRS a transformé la vie des Algériens en cauchemars. Seule cette rupture pourra offrir aux Algériennes et Algériens la chance d'une seconde libération. Et tout discours manipulateur nous faisant croire l'existence d'un quelconque conflit idéologique ou d'intérêts entre les membres de la même famille au pouvoir (Présidence-PFLN-Armée-DRS) n'est qu'un leurre. L'homogénéité du système relève de sa survie et de sa perpétuation et non des escarmouches fratricides de ses membres ou réseaux. Pour sauver le temple, tout système en déliquescence se doit de faire son renouvellement, aussi conjoncturel fut-il, par le sacrifice et l'épuration d'individu(s), d'aile(s) ou même l'amputation d'organe considéré jusque-là comme principal ou vital. Si notre lutte contre la militarisation de la société et l'injonction du DRS dans la vie politique, économique et médiatique doit être sans relâche, aucune transition démocratique pacifique, par contre, n'est possible en Algérie tant que le PFLN continue à détruire symboliquement et matériellement, par le haut comme par le bas, le mental et le psyché des Algériens. L'ANP aux casernes dans le cadre d'une doctrine militaire nouvelle et dans les limites de ses missions constitutionnelles ! Le FLN historique au musée de la Révolution et de l'Indépendance !! Le parti usurpateur du front de libération nationale(PFLN) à dissoudre et à interdire comme tous les partis totalitaires, corrompus et corrupteurs contre lesquels les peuples se sont révoltés dans l'histoire. Si l'Algérie guérit de ces deux maux, elle respirera un air sûrement meilleur et commencera à s'occuper sérieusement de son avenir. Fodil BOUMALA