Date fondatrice de l'Etat algérien, le 1er novembre 1954 symbole à la gloire inaltérée, constitue néanmoins une source de légitimité à un régime militaire plus que jamais schizophrène. Un régime schizophrène qui ne reconnaît ni sa maladie ni ses limites politiques et intellectuelles, et dont les symptômes se manifestent avec plus de violence au fil des années. Les points d'ombre qui l'entourent ont depuis été attribués à la nécessité prétendument inévitable de garantir la stabilité d'un pays fraîchement indépendant encore menacé par les frères marocains, déchiré par la guerre et déséquilibré par la lutte des clans à Tripoli. Pourtant, ces épisodes ou plutôt pour dire vrai, ces complots tissés avec l'aide de la colonisation révèlent l'inavouable nature d'un régime qui semble de plus en plus incapable de comprendre les fondements d'une nation et la réalité politique d'un pays, de tenir ses promesses égalitaires. Tous les principes ancrés dans la démocratie et la citoyenneté, le régime les perçoit comme une menace, une persécution. On se croirait dans l'un des ouvrages d'Alexandre Zinoviev ! Certains symptômes de la schizophrénie ressemblent à ceux d'une crise d'adolescence tourmentée : repli sur soi, incapacité d'agir, difficulté à communiquer, sautes d'humeur. Mais aujourd'hui, cette maladie dont nombre de psychiatres et de psychanalystes dit qu'elle est d'ordre génétique (fatalité héréditaire, après tout l'ANP est la digne héritière de l'ALN !), a atteint des seuils alarmants. En effet, il y a des raisons de s'inquiéter, car tous les symptômes, c'est-à-dire le délire, le mensonge, les hallucinations, l'incapacité à communiquer et les troubles de langages, sont tous réunis et apparaissent au grand jour, lors de cette compagne électorale d'inspiration militaire et non politique. Dans cette compagne électorale, une phrase phare revient sur toutes les lèvres des candidats : « La jeunesse algérienne doit voter massivement pour assurer son avenir et maintenir la cohésion de la nation algérienne. » Comment cette jeunesse peut-elle donc assumer son destin lorsqu'on la force à élire un président, celui de l'armée, qui non seulement est cliniquement mort, mais appartient à une époque qui patauge dans la fange de l'histoire ? Et d'ajouter sur un ton menaçant : « Si vous ne votez pas le 17 avril, le pays va s'écrouler. » Ou encore : « La jeunesse algérienne regorge de talents, de compétences et d'aptitudes. » Pourquoi dans ce cas précis confier les destinées d'un pays à la croisée des chemins, à un homme inapte intellectuellement et politiquement à gouverner, à distinguer entre le mal et le bien, entre le mensonge et la vérité ? Il n'y a aucun doute, le régime est dans une phase d'hallucination très avancée. Outre qu'il perçoit des choses inexistantes qui lui semblent réelles, mais il ne reconnaît plus les réalités du moment, il ne reconnaît plus que les époques et les modes de gouvernance ont changé à travers tout l'univers. La république, la démocratie et les valeurs citoyennes lui reviennent comme des penses très lourdes a porter, comme des images et des voix d'où peuvent surgir des ennemis monstrueux. Face la demande citoyenne, nos généraux après avoir inventer la menace terroriste, ils hallucinent à présent la main de l'étranger avec laquelle ils viennent juste de parapher un accord de partenariat faisant de l'Algérie une zone de libre échange, en train de conspirer et de mettre sur pied des complots pour diviser le pays et piller ses richesses. Ambiguïté hautement schizophrène. La menace et le complot sont des thèmes récurrents chez le régime algérien ; des thèmes qui lui ont certes permis de gagner encore un peu de temps par le passé, mais qui ont fait haïr la politique au citoyen, clochardiser les institution et éparpiller (démobiliser) le peu d'élites que le pays compte.