En 1988, j'étais installé dans mon pays, mon beau pays. J'avais une situation plus qu'envieuse. A 29 ans, j'avais terminé de construite « de mes mains » la belle maison pour mes enfants que j'étais obligé de brader quelques années plus tard pour survivre dans cet étranger que je savais qu'il n'était pas l'eldorado qu'on nous promettait pour y avoir été plongé lors de ma post graduation. J'étais chargé de cours à l'université de Batna, président du conseil scientifique de l'institut agronomique et j'avais réussi à créer une fermette de 2000 M2 qui me rapportait des cent et des mille !... Je m'appelais « le Petit prince ». J'avais la considération de mes étudiants, de mon milieu social à tel point que le maire du village où j'avais installé ma tribu me suppliait pour que je prenne sa succession. C'est dire que je n'avais aucune raison de quitter mon pays, mon beau pays. Et puis vint le 5 octobre 1988 et la succession des événements qui l'ont suivi. Chadli qui claironne à la télévision pour confirmer que c'était lui qui avait ordonné aux militaires de tirer sur la foule. Vint ensuite l'installation du « multi partisme » et ses 52 tendances. J'étais pétrifié en constatant cela. Je me suis dit qu'il ne doit pas y avoir 52 raisons de séparer les algériens. Puis vint la légalisation du F.I.S où j'apprends que l'islam de mes grands-parents « n'était pas conforme !… » et qu'il fallait s'adapter aux nouvelles normes. Jusqu'à la victoire des législatives où le lendemain j'apprends que je devrais à l'avenir changer jusqu'à ma façon de m'habiller !... Ma fille n'avait que 4 ans à l'époque et je l'imaginais déjà avec son hijab, son niqab prête à s'avilir devant un islamisme d'un nouveau genre qui a ravagé la planète par la suite. Je constatais aussi l'hydre de la corruption qui s'installait insidieusement dans la société algérienne. J'avais été élu président des aviculteurs de la wilaya de Batna et en constatant des malversations impliquant toutes sortes de véreux (directeur de coopérative, directeur de la BADR, directeur des services agricoles, jusqu'au wali), j'ai failli, en tentant de m'y opposer de me retrouver derrière les barreaux. C'est grâce à un procureur de la république et surtout à un colonel du secteur militaire de Batna que j'ai évité de me retrouver en prison. Et l'idée de quitter le navire a commencé à s'immiscer petit à petit dans mon esprit. C'est le premier attentat de Guemar qui en a été le précurseur. De par ma position délicate, ma smala était installée dans une ferme isolée à la campagne, j'avais anticipé les événements de la triste décennie noire. Rajoutez à cela que j'avais un conjoint français, touillez bien tout cela et vous comprendrez pourquoi l'exil était devenu inévitable. Alors, ceux qui nous traite de harkis, j'ai envie de succomber à une digression en leur disant : JE VOUS EMMERDE, à pied, à cheval, en voiture, en Tgv, en concorde, en fusée et je vous gifle avec ce Saint Coran que j'ai fini par en apprendre par cœur les 114 Sourates où Allah, dans la Sourate Houd précise bien qu'il faut suivre le bon chemin et qu'IL précise qu'il s'adresse à des gens doués de bon sens et non de petites crapules qui osent couper des têtes à des innocents au nom de cette religion qu'ils ont mis au ban de la société et qui risque de disparaître à terme. L'article précise aussi les difficultés à un expatrié de faire sa place à l'étranger. Je ne peux y répondre qu'avec au moins un ou 2 livres tellement que le chemin est semé d'embûches. Enfin, j'ai longtemps pensé que j'étais vraiment un harki d'avoir ainsi abandonné le pays à des lascars qui ont fini par importer même EL BASSLA d'Espagne. Lorsque j'ai constaté que depuis 2009, plus d'un million d'algériens ont quitté le pays, ma conscience s'est quelque peu apaisée et à 63 ans, en lisant l'article auquel je réponds humblement, je me rends compte que j'ai été juste lucide.