Article publié le 30/09/2008 Dernière mise à jour le 30/09/2008 à 19:03 TU Africom, le commandement militaire américain pour l'Afrique, est « opérationnel » à partir de ce 1er octobre, avec un personnel de 1 300 agents, militaires et civils, et un budget d'environ 50 millions de dollars. Africom est en chantier depuis plus de deux ans ; mais il n'a pas été possible, contrairement à ce que souhaitaient ses promoteurs, de l'installer sur le continent. A ce jour, l'ensemble du continent africain passe donc officiellement sous le contrôle d'un commandement américain unifié, alors qu'il dépendait jusqu'ici des états-majors Europe, Moyen-Orient et Pacifique. Jusqu'ici, sur un plan proprement militaire, le continent africain n'avait pas d'existence réelle pour le Pentagone, sinon en appendice d'autres institutions, sans cohérence, ou dédiés à un objectif de sécurité américain, comme la présence d'une base « antiterroriste » à Djibouti, pour assurer un contrôle de la zone stratégique du Golfe d'Aden et de la Corne de l'Afrique, en liaison avec les guerres menées en Irak et en Afghanistan. Les programmes de coopération et d'assistance militaire – comme la gestion de l'unique implantation militaire US sur le continent, à Djibouti ; la lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord et au Sahel ; ou la formation de garde-côtes « antipiraterie » dans le Golfe de Guinée – sont désormais coordonnés par l'Africom depuis une base de l'armée américaine à Stuttgart, en Allemagne. Ce sera le cas également pour un programme comme l'African Partnership Station, une frégate de l'US Navy qui – de novembre 2007 à mai 2008, avec la collaboration d' experts militaires de plusieurs pays européens embarqués – a écumé les ports du Golfe de Guinée et formé dans chaque pays des professionnels chargés de la sécurité maritime, de la lutte contre les trafics ou le terrorisme. Plusieurs capitales africaines – dont Alger ou Lagos – avaient refusé d'accueillir le quartier général d'Africom : signe de la méfiance suscitée par un commandement, qui ferait de tout ou partie du continent une cible militaire, ou servirait finalement surtout à sécuriser les approvisionnements pétroliers américains (un quart des besoins des Etats-Unis en 2015). Objectif minimal aujourd'hui du patron d'Africom, le général William « Kip » Ward, l'officier le plus gradé de l'armée américaine issu de la communauté noire : être pleinement opérationnel, même à distance … et tout en n'écartant pas, à terme, une éventuelle « relocalisation en Afrique de certaines portions du commandement » – soit des départements entiers, soit des représentations. Dans l'immédiat, Ward doit faire face à des accusations venues de l'intérieur : Africom, conçu comme une agence de coopération, avec des volets civils, pour tenir compte des réalités africaines, reviendrait selon certains de ses contradicteurs à Washington, à « militariser la politique étrangère américaine », avec le danger annexe de « détourner » les crédits des diplomates du Département d'Etat au profit des militaires du Pentagone ! Le concept imaginé pour l'Africom, qui ne ressemble nullement aux autres commandements militaires américains, semble pourtant aux antipodes de la vision classique du Pentagone, façon guerre en Irak ou même « War on terror » : pas de troupes (sauf la base de Djibouti, en place depuis 2002), pas de super-quartier général écrasant, mais des structures légères, opérationnelles, en réseau avec les institutions civiles opérant sur le continent. Et un objectif plus proche du développement que de la guerre, dont il faudra voir à l'usage s'il peut être mené à bien. Photo : Le général William « Kip » Ward, l'officiel le plus gradé de l'armée américaine issu de la communauté noire, est à la tête de l'Africom. (Photo : Africom)