En seulement 72 heures, dans une salle fermée du Centre de conférence Abdellatif Rahal, au Club des Pins, la direction du RND est passée de Azzedine Mihoubi à Tayeb Zitouni et le secrétariat général du FLN du détenu de droit commun, Mohamed Djemaï à Abou El Fadhl Baadji. Malgré le confinement, l'interdiction des rassemblements et manifestations culturelles, politiques et même religieuses, le ministère de l'intérieur, faisant fi des décisions du Haut Conseil de sécurité et du ministère de la santé a autorisé la tenue des rencontres du RND et du FLN… Pourquoi tant de précipitation ? Quelle en est la signification ? Quelles sont les milieux qui ont imposé Zitouni et Baadji à la tête des deux partis ? Pour quelle mission ? Le RND revient avec ses habits de naissance… Le RND a tenu son congrès extraordinaire en quelques heures et le successeur de Azzedine Mihoubi a été désigné à mains levées. Cela s'est passé dans une salle qui porte le nom d'un ami de Bouteflika, dans un édifice luxueux que Bouteflika a voulu différent des autres salles du club des pins. Constructions sans grâce que les dirigeants des partis du pouvoir présentaient dans des accès de gloriole comme des réalisations majeures de l'Excellentissime "fakhamatahou". Tayeb Zitouni était président de la "Délégation Exécutive Communale" (DEC) d'Alger-centre lors de la création, le 21 février 1997, du RND par le général Mohamed Betchine et le président Liamine Zeroual. Cela signifie que le RND a retrouvé le week-end a repassé ses habits de naissance. Un tissu formé de civils qui ont été armés au nom de la lutte contre le terrorisme, des présidents des DEC, désignés à la tête des communes après la dissolution des assemblées élues en 92, sous le gouvernement de Sid-Ahmed Ghozali. Ce sont des noms choisis par le ministre délégué aux collectivités locales, Abdelmadjid Tebboune, qui était à l'époque ministre-délégué auprès du général Larbi Belkheir, le ministre de l'intérieur. Après la création du RND, Tayeb Zitouni est passé de président de la DEC d'Alger-Centre à président d'APC durant trois mandats successifs, de 1997 à 2012. Il a été membre actif et responsable de la campagne électorale de Bouteflika à Alger en 2009. Dans toutes ses interventions, il ne tarissait pas d'éloges sur la grandeur de Bouteflika et celle de ses réalisations. Jusqu'à ce que les conflits de personnes s'aggravent entre lui et les partisans d'Ahmed Ouyahia et à leur tête, un autre président de DEC, celle de Kouba, alors dirigée par Seddik Chibab. Le choix porté sur Zitouni est effectué par les mêmes appareils qui ont coopté les dirigeants de ce parti dont Abdelkader Bensalah, Tahar Benbaibeche, Ahmed Ouyahia… Tayeb Zitouni a été désigné président de la DEC de Oued Koriche, puis d'Alger-centre quand Abdelmadjid Tebboune était ministre délégué aux collectivités locales ; et voilà aujourd'hui désigné à la tête du RND alors que Tebboune est au palais d'El Mouradia. Le FLN…. Baadji de la "baltajia" contre les adversaires de Saâdani à la campagne Tebboune Abou El Fadhel Baadji a été imposé, samedi, à la tête du secrétariat général du parti FLN alors même que le lancement des travaux a été marqué par des ‘info-rumeurs' sur la contamination de son compétiteur, Djamel Benhamouda, par le coronavirus. Chose que le concerné a démenti en accusant ses adversaires d'avoir lancé l'info-rumeur pour l'empêcher de prendre la direction du parti. Une péripétie qui ne surprend pas venant d'une camarilla qui a accepté que le regretté Abdelhamid Mehri soit humilié en raison de son refus de soutenir le général Zeroual. Cet appareil a connu également la ‘baltajia', la pègre des gros bras sous l'ère de Belkhadem, Saadani et Ould Abbès après être devenu le… "parti du peuple retranché dans les hôtels". Le FLN, qui est officiellement toujours présidé par Abdelaziz Bouteflika depuis son dernier congrès en 2015, n'a jamais dérogé à la règle de l'obéissance, pas une seule fois dans son histoire, post-indépendance bien sûr. En imposant Baadji, sa direction a donc respecté sa tradition de soumission en appliquant à la lettre les directives de ceux qui détiennent le pouvoir La dernière responsabilité connue de Baadji est celle de président de la commission de campagne électorale de Abdelmadjid Tebboune à Msila. Il a été chef de cabinet du ministre de la justice, Tayeb Belaïz et a quitté cette fonction dans des conditions qui suscitent des interrogations ; certains évoquant un niveau discutable de compétence, d'autres évoquant des problèmes connus des seuls Belaïz et du concerné. Baadji a été également membre du Bureau Politique et un des plus fervents défenseurs de Amar Saadani en 2015. Il a pu répondre à la demande de mettre le FLN au musée, formulée par des anciens moudjahidine car ce sigle appartient au patrimoine commun, que "la légitimité révolutionnaire a pris fin en 1962". Baadji est imposé aujourd'hui avec l'aide de certains noms de la vieille garde comme Abdelkader Hadjar, Boumahdi, Bouguetaya et Alioui qui préside l'Union des paysans (UNPA) depuis 30 ans. Tous sont connus par leurs liens avec les appareils et pour exécuter les ordres sans états d'âme. Il apparait ainsi que la situation reflète la perpétuation des pratiques de gestion des appareils partisans, des usages en vigueur depuis 1962. Avec le passage de l'Algérie au multipartisme, le système de pouvoir a fabriqué de nombreuses façades politiques pour assurer sa pérennité et gouverner sous des argumentaires différents mais dans un seul but : contrer la souveraineté populaire et empêcher le peuple d'exercer effectivement ses droits politiques. L'empressement à changer la façade du FLN et du RND de cette manière, alors que le pays est sous confinement sanitaire, vise, les indices sont concordants, à maintenir le confinement politique imposé au peuple. Mais l'inconsistance des personnages qui ont été imposés est le signe que le pouvoir est dans l'impasse. Cette voie sans issue s'est davantage rétrécie le 12 décembre dernier, par la mise en place d'un président venu de l'administration et qui n'a pas de lien avec la politique. Dans les mêmes formes et modalités qui ont conduit à l'installation de Zitouni à la tête d'une commune et de Baadji, considéré comme un dirigeant de troisième zone, dans un cabinet ministériel. Sans même mentionner d'autres figures qui ont joué les choristes pour Bouteflika et ont instauré le culte de sa personnalité… Tout confirme donc qu'il s'agit de mouvements liés à la gestion de l'agenda de Tebboune, lui-même imposé à El Mouradia. Le dénominateur commun de tous ces éléments est l'hostilité à la souveraineté populaire et le refus d'accepter le droit des citoyens à exercer pleinement leurs libertés. Des droits que la société souhaite très clairement récupérer depuis le 22 février 2019. Ce qui ne fait guère de doutes est que le FLN et le RND, coquilles politiquement vidées dirigées par la bureaucratie et animées par des individus d'une telle médiocrité, n'ont pas d'avenir. Ces manœuvres ne feront qu'enfoncer davantage des appareils discrédités en enfonçant ceux qui misent sur eux pour faire passer un agenda rejeté par le peuple.