Ce mercredi 11 août 2021, restera une triste journée gravée à jamais dans nos mémoires. Ce jour où l'Algérie a perdu l'un de ses enfants les plus dignes et les plus valeureux, ce jour où Djamel Bensmail a été victime d'un crime odieux, sauvage.Rien ne peut justifier ou excuser ce crime abominable, ni le contexte extrêmement difficile et tragique des incendies criminels, ni aucun autre contexte. LE MEURTRE SAUVAGE DE DJAMEL : UNE EPREUVE DECHIRANTE ! Ce mercredi 11 août 2021, Djamel Bensmail un artiste engagé aux multiples talents, un citoyen exemplaire, un militant hirakiste, un amoureux de la nature et un humaniste au grand cœur a été lâchement et odieusement assassiné. Il est parti pour entrer éternellement dans le cœur de millions d'Algériens.Depuis, les images violentes repassent en boucle dans ma tête, ne me laissant que peu de répit, alors que je refuse de voir les vidéos qui circulent, me contentant de lire textes et commentaires.Oui, c'est une épreuve déchirante pour chacun d'entre nous, une blessure profonde provoquée par ce meurtre sauvage et insupportable.Une épreuve dramatique qui laisse les esprits sidérés et en proie à un torrent d'émotions difficilement soutenables : tristesse profonde, embarras, perplexité, évitement, sidération, anxiété. C'est une perte cruelle et injuste. Trop injuste ! UN MEURTRE ET DES ZONES D'OMBRE Si rien ne pourra jamais justifier un tel crime, nous devons nous interroger sur les circonstances dans lesquelles il a été commis.Qui a désigné à tort Djamel Ben Smail comme un suspect à l'origine des incendies criminels ? Quand, comment, où et pourquoi il a été monté dans le fourgon cellulaire de la police ? Car, dès lors, ne devenait-il pas une cible toute désignée ?Pourquoi l'opinion a-t'elle eu droit à deux versions officielles totalement différentes concernant l'arrivée de Djamel entre les mains de la police ? Qui croire : le procureur qui nous informe « qu'un groupe de citoyens a interpellé, ce mardi 11 août à 16h30, trois personnes soupçonnées d'être impliquées dans le déclenchement des feux de forêt survenus dans la région » ou le directeur de la police judiciaire qui nous dit que Djamel s'est rendu à la police lorsqu'il « s'est rendu compte qu'il était suspecté par certains citoyens » ?Une telle contradiction ne participe guère à clarifier la situation et à convaincre une opinion toujours sceptique face aux promesses de vérité jamais tenues par le pouvoir. Qui a lancé la rumeur selon laquelle un « suspect » aurait été arrêté et conduit au commissariat ? Cette rumeur s'est propagée comme une trainée de poudre et a rameuté une foule innombrable et chauffée à blanc. S'il est présent dans le fourgon de la police, pense alors une partie de la population, c'est qu'il doit y avoir des raisons sérieuses de croire qu'il s'agit d'un pyromane impliqué dans les incendies qui ont coûté la vie à des dizaines d'innocents et de blessés graves, sans compter les dégâts matériels et environnementaux. Pourquoi la police n'a-t'elle pas usé de tirs de sommation pour disperser la foule et protéger Djamel ?A toutes ces questions et à bien d'autres, l'opinion n'a pas eu d'autres réponses que des allégations douteuses ou des mensonges par omission. À QUI PROFITE LE CRIME ? Déclencher des incendies au même moment dans une cinquantaine de lieux de la wilaya de Tizi Ouzou, souvent inaccessibles et très éloignés les uns des autres, un jour de vent et de canicule ne peut être qu'un crime planifié et organisé et en aucune façon l'œuvre de quelques pyromanes égarés. C'est une « opération » qui nécessite la mobilisation d'une ingénierie sophistiquée et diabolique, elle a coûté la vie à des dizaines de vies humaines et ravagé maisons, champs, arbres centenaires, forêts et animaux.C'est dans ce contexte que survient l'assassinat effroyable de Djamel Bensmail très vite exploité par les semeurs de haine et de division connus de tous et protégés depuis toujours par le pouvoir. Des campagnes de dénigrement et de calomnie visant la Kabylie sont activées et mises en branle immédiatement après le meurtre de Djamel. Elles sont menées par des cercles et relais protégés par la police politique qui œuvrent impunément depuis des mois à la stigmatisation et l'isolement de cette région. Ces campagnes indiquent clairement la volonté d'instrumentaliser le choc émotionnel vécu par les Algériens devant l'horreur comme « effet d'aubaine » pour diviser le peuple et faire basculer le pays dans une guerre fratricide. Diviser pour continuer de régner quel qu'en soit le prix ! LE PERE DE DJAMEL BENSMAIL : UN HOMME D'HONNEUR ET UN HEROS NATIONAL Au lendemain du meurtre de son fils, le père de Djamel Bensmail adresse un message plein de sagesse et de lucidité à tous les Algériens. Malgré son immense douleur, il a appelé à l'apaisement et à l'union :« Les Kabyles sont nos frères, ne cherchons pas la fitna. Mes amis sont Kabyles, mes neveux aussi. Que Dieu nous donne la patience, Djamel était votre frère et il est mort en martyr. Je dis aux habitants de Miliana qu'ils doivent être fiers car c'est un héros, après Ali La Pointe, vous avez Djamel Bensmaïl».Lors de son déplacement à l'hôpital de Tizi Ouzou, il a déclaré aux jeunes venus l'accueillir :«J'ai perdu un fils, mais j'ai gagné des enfants. Vous êtes tous mes enfants». Des propos et une attitude qui sont la marque de la grandeur d'âme d'un homme devenu un symbole et un exemple extraordinaire de dignité à suivre. Nous parlons d'un homme qui a su faire épargner à tout un pays les affres d'une guerre fratricide. Nous lui sommes éternellement reconnaissants, il vivra dans notre mémoire collective comme une incarnation d'un patriotisme sincère. Cet homme représente de ce qu'il y'a de mieux en chacun de nous.Merci à lui, au frère de Djamel et à toute leur honorable famille.. POUR UNE COMMISSION D'ENQUÊTE INDEPENDANTE Dans cette triste tragédie, beaucoup trop d'omissions, de dissimulations et de zones d'ombre sont sciemment entretenues. Est-ce pour protéger les vrais instigateurs de ce meurtre barbare ?Ces questions pour lesquelles seule une commission d'enquête ad hoc et indépendante peut faire toute la lumière et déterminer les circonstances de cet acte odieux et inhumain. Comme une grande majorité de mes concitoyens, je n'ai aucune confiance dans les enquêtes diligentées par ce pouvoir assassin. Tout en se posant ces questions, je condamne avec la plus grande fermeté ce crime inhumain ainsi que toutes les personnes qui ont participé à son accomplissement. L'indignation doit s'exprimer le plus fortement possible, mais elle ne suffit pas. Il est de la plus haute importance, et j'en appelle à la conscience éclairée de mes concitoyens, de ne jamais laisser se perpétrer à nouveau un tel crime. Jamais, dans aucune circonstance, cela ne doit se reproduire. Je m'incline devant la mémoire de Djamel Bensmail et présente à sa famille mes condoléances les plus sincères. Je m'incline devant la mémoire des dizaines de victimes des incendies qui ont ravagé le pays, civils et militaires et présente à leurs familles mes condoléances les plus attristées. Notre douleur et notre tristesse sont immenses, mais elles ne sont rien comparées à celles de leurs familles et de leurs proches. Mes pensées fraternelles pour les dizaines de personnes sévèrement brûlés qui luttent encore pour leur survie. Je salue le formidable élan de solidarité citoyenne avec la Kabylie et toutes les régions du pays soumises à l'enfer des incendies. Non aux comploteurs criminels et semeurs de haine et de fitna. Non aux racistes de tous bords. Que toute la lumière soit faite sur le meurtre abominable de Djamel. L'Algérie unie renaitra de ses cendres. QUE TOUTES LES VICTIMES REPOSENT EN PAIX.