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MOHAMED MECHATI SE CONFIE AU SOIR D'ALGERIE :«Si le peuple était aussi prêt qu'en 1954…»
Publié dans Le Quotidien d'Algérie le 14 - 11 - 2009

A 90 ans ou presque, sa lucidité autant que son esprit de synthèse sont débordants. Du PPA à l'OS et du MTLD au CRUA, il conte, sans détour, des péripéties historiques que la censure officielle a très souvent dénaturées. Sa mésentente avec Boudiaf, qui était alors son chef, sa condamnation sans ambages d'un Ben Bella «avide de pouvoir», sa grande déception de ce qui est advenu de sa patrie sont autant de questions qu'il aborde avec spontanéité dans l'entretien qui suit. Mohamed Mechati, puisque c'est de lui qu'il s'agit, est membre des 21 historiques qui ont lancé le mot d'ordre de la guerre de Libération. Il se pencherait, actuellement, sur la finalisation d'un ouvrage historique intitulé Cela s'est passé comme cela mon fils . En attendant, il a rouvert sans la moindre hésitation son cœur aux lecteurs du Soir.
Entretien réalisé par Kamel Ghimouze
Le Soir d'Algérie : Vous avez été l'un des premiers à remettre en cause le nombre des historiques qui ont pris part à la réunion de Clos- Salembier. Alors c'est 21 ou 22 ?
Mohamed Mechati : L'essentiel n'est pas dans le nombre, mais il est dans la réunion en elle-même. Effectivement, la réunion de Clos Salembier a regroupé 21 personnes. Le chiffre de 22 provient d'une erreur d'Yves Courrière qui a été le premier à écrire sur cette page de l'histoire. Une histoire romancée d'un reporter qui avait la confiance de l'armée française. Il a cité, en effet, 22 personnes, dont Hadj Benalla qui nous a quitté, il y a quelques jours (Allah yarahmou), lequel n'avait pas assisté à ce conclave. Depuis, cette question de 21 et /ou 22 a charrié beaucoup d'interprétations, dont le fait que Hadj Benalla avait été empêché de venir en dernière minute ou, encore, que le propriétaire de la maison de Clos Salembier fut le 22e présent. Néanmoins, ce dernier faisait partie du réseau de logistique et avait, comme ses pairs, un rôle à jouer. Un rôle qui s'est résumé pour la circonstance à ce qu'il offre sa maison pour abriter la réunion. Bref, il était à un niveau subalterne sous les ordres de Zoubir Bouadjadj qui, lui aussi atteste que ce dernier n'a pas assisté à la réunion.
Des décades sont passées depuis, que devient Mohamed Mechati ?
Il est devant vous avec le poids des années en plus, et même à cet âge, j'essaye de faire de mon mieux pour servir mon pays au même titre qu'un tas de militants de ma génération ou, encore, les plus jeunes qui ont pris la relève et, à ce propos, la corporation des journalistes est parmi ceux-là. Un métier aussi difficile que passionnant mais que je ne peux exercer, hélas, à mon âge.
Il y a quelques jours, les Algériens commémoraient les évènements tragiques du 8 Mai 1945 dont vous êtes un témoin vivant. Quels impacts ont eu ces évènements sur la suite du combat que vous meniez à l'époque ?
Le 8 mai 1945… On peut dire qu'il a précipité le déclenchement de la guerre de Libération. Le peuple algérien n'a jamais accepté l'occupation, et cela se traduisait par des soulèvements périodiques, tous les 5 ou 6 ans, partout dans le pays. Finalement, le 8 Mai 1945 a été quelque chose de plus grand. Le mouvement des Amis du manifeste et de la liberté (AML) avait pris, à travers toute l'Algérie, des proportions qui faisaient peur au pouvoir colonial, lequel attendait l'occasion propice pour sévir et il s'est saisi de cette «opportunité» pour réprimer ce mouvement comme il ne l'avait jamais fait auparavant. Pour les nationalistes de l'Etoile nord-africaine et du PPA, la situation était devenue intolérable, il fallait donc passer à l'action. Nous nous sommes dits finalement, cet ennemi qui est rentré par la force doit sortir par la force car il n'obéit en fin de compte qu'à cette logique. Raison pour laquelle, d'ailleurs, nous avons décidé de constituer une force pour faire face à cet ennemi. Nous savions que nous n'avions ni canons ni avions à opposer à la puissance militaire coloniale et il nous fallait donc faire renverser ce rapport en comptant sur la force intarissable du peuple. Un peuple que nous devions seulement organiser car plus rien ne pourra l'arrêter s'il est mature, décidé et organisé. Le 8 Mai 1945 a été donc le déclic pour les chefs et les militants de l'époque qui ont compris qu'il fallait en finir avec cet ennemi et c'est ce qui a poussé notre parti à constituer cette organisation spéciale qu'on appelle l'OS. Une organisation paramilitaire composée de militants inconnus de l'administration coloniale, car les politiques du MTLD, un parti du reste légal, étaient identifiés par l'armée française et ont, pour la plupart, fait de la prison. L'OS a fonctionné pendant plus de deux années avant qu'elle ne soit dévoilée en 1950 dans ce qu'on appelle l'affaire de Tébessa. Le parti l'a alors dissoute, mais avec l'intention de la refaire en mieux et passer de nouveau à l'action tant l'activité politique qui a trop duré a presque atteint ses limites avec en sus, une situation difficile pour le parti. La mésentente de Messali El hadj avec ses compagnons allait finir par faire imploser le parti qui s'était déjà scindé en messalistes, centristes et autres neutralistes. Devant cette situation catastrophique, le comité central, Lahoual Hocine en particulier, a fait appel à Mohamed Boudiaf qui était en France pour lui faire part de ce qui est advenu du parti par la faute de Messali El Hadj. A partir de là, on a convenu de reprendre le mouvement et l'organisation paramilitaire en main et on a décidé de la création du CRUA (Comité révolutionnaire pour l'unité et l'action).
Des élites qui demandaient d'un peuple démuni et désarmé de rejoindre leur cause. Etiez-vous sûrs de son adhésion devant cette situation de désunion ?
Nous étions convaincus que le peuple était prêt, a contrario des chefs et dirigeants, restés, eux, divisés pour des futilités et des considérations personnelles. Un parti politique doit œuvrer pour faire adhérer le peuple à sa démarche, or, à l'époque, le peuple en avait marre et n'attendait que la Révolution. Les gens fuyaient les militants car il y avait une répression terrible. Dans une situation d'attente, ils ne voulaient plus courir le risque de devenir suspects et subir les pires représailles. Ils se contentaient de nous dire, quand arrivera la Révolution, nous serons prêts ou encore, donnez-nous des armes et nous la mènerons cette révolution. C'est pour cela que je dois dire que si les Algériens d'aujourd'hui étaient aussi prêts que le peuple à l'époque, nous ferons une autre révolution. Tout s'y prête. C'est ce peuple qui est historique, quant à nous, nous ne sommes que des militants dont le plus jeune avait 22 ans et le plus vieux 33. Ben- M'hidi n'avait pas balancé par hasard sa célèbre phrase : «Jetez la révolution dans la rue et elle sera prise en charge par le peuple.»
Ne faudrait-il pas d'abord que la génération post-indépendance s'imprègne de son histoire authentique ?
L'écriture de l'histoire a été occultée d'abord par le pouvoir colonial puis par les nôtres, dès l'indépendance. Elle a été occultée par le pouvoir illégitime de Ben Bella qui nous a trahi, en s'alliant avec l'armée des frontières et ensuite par Boumediene qui n'a pas un passé de militant politique. Ils l'ont fait pour la simple raison qu'ils n'aient pas derrière eux une histoire, un passé ou même quelques années de militantisme. C'est de la sorte que notre histoire a été écrite, d'abord par nos ennemis, car on se rend compte qu'il y a des historiens, des gens de conviction qui ont raconté notre résistance. Et à ce propos, s'il y a un peuple qui a résisté le plus face à un empire colonial, c'est bien le peuple algérien. En témoignent, au risque de me répéter, les soulèvements populaires périodiques à travers tout le territoire. Aujourd'hui, les gens ignorent dans quelles conditions vivaient les Algériens sous le colonialisme. Ils étaient interdits de séjour dans leur propre pays, en résidence surveillée chez eux, dans leurs propres ghettos. Dès qu'ils quittaient les quartiers arabes, ils devenaient des suspects. A Alger par exemple, les autochtones n'avaient droit de cité qu'à l'intérieur de La Casbah. Nous ne pouvions pas voyager à travers le pays, et c'était d'autant plus difficile pour les militants appelés souvent à se déplacer pour les besoins de la cause. Il fallait se déguiser ou du moins s'habiller comme les Européens.
Bien que vous soyez un membre des 21 historiques, responsable au niveau du département de Constantine à l'époque, il est dit que le groupe de Constantine n'a pas été au rendez-vous du 1er Novembre 1954. Qu'en est-il au juste ?
Il y a eu entre nous, principalement Abderahmane Gherras et moi-même d'une part, et Boudiaf de l'autre, un accrochage car ce dernier préférait agir en solo. A l'époque, l'OS était structurée dans les trois départements, à savoir Constantine, Alger, et Oran. Boudiaf, qui était responsable du département de Constantine, avait sous ses ordres Ben M'hidi, Didouche Mourad et Abderrahmane Gherras. Ce dernier n'était pas quelqu'un qui mâchait ses mots. Il avait toujours des questions à poser ou à éclaircir. Avec lui, je me suis opposé à Boudiaf qui était d'ailleurs mon chef et m'avait même pris sous sa coupe lorsqu'il a été appelé à Alger pour faire partie de l'état-major national. Il avait sa façon de voir les choses alors que nous exigions que les choses doivent être discutées entre des gens responsables à l'échelle nationale, entre chefs des états-majors des trois départements et non pas avec des personnes qu'il avait choisies tout seul. Il y a eu donc à cette réunion, 16 personnes du département de Constantine, 4 d'Alger et une seule d'Oran. Des éléments subordonnés qui ne connaissaient pas les véritables problèmes et qu'il avait choisis justement, parce qu'il était responsable du département de Constantine. Notre mécontentement après cette fameuse réunion, qui est à mon sens une tromperie et une mascarade, nous a valu de ne pas être avertis de la date du déclenchement de la guerre de Libération sur décision de Boudiaf. D'ailleurs, après la réunion d'Alger, lorsque nous avons senti la manipulation, nous nous sommes réunis à Constantine et nous avons demandé à Boudiaf de se réunir de nouveau, mais avec les gens concernés cette fois-ci. Il n'a rien voulu savoir. Ce n'est pas seulement le groupe de Constantine qui a fait l'exception mais il n'a pas averti au niveau national. C'est pourquoi, au lendemain du 1er Novembre 1954, des personnes qui ont déjà fait la prison ont été arrêtées, torturées et condamnées de nouveau. EIles n'ont, cependant, pas hésité un seul instant pour rejoindre les maquis dès leur sortie de prison. J'estime que c'est une calomnie de la part de Boudiaf, une faute qui a été à l'origine des sévices subis par des militants juste parce qu'ils n'étaient pas informés.
Vous disiez que Ben Bella vous avait trahi ?
Malheureusement ! Nous étions en prison ensemble et, à l'indépendance, il a changé. Il voulait être chef alors que même ses compagnons de route n'étaient pas du même avis que lui. Il s'est allié alors avec l'armée des frontières, et personne ne pouvait plus rien contre lui au point que certains ont été emprisonnés alors que d'autres ont carrément fui le pays. C'est de là que le mal que nous vivons aujourd'hui tire son origine.
Des fellagas aux harraga ?
J'en souffre énormément au même titre que ceux de ma génération qui ont combattu le colonialisme. Nous souffrons un peu plus que les autres parce que tout simplement nous savons comment nous sommes arrivés à cette situation. C'est par la faute d'un pouvoir illégitime depuis Ben Bella à ce jour. Et ce dernier est malheureusement l'origine première de ce mal, lui qui s'est permis des grossièretés intolérables à l'endroit de Ben Khedda en plein congrès de Tripoli et bien plus, c'est lui qui nous a ramené l'exalté qui nous gouverne aujourd'hui.
K. G.


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