Actualités : COMMEMORATION DU CINQUANTENAIRE DE L'EMG Le pouvoir, les troupes et la légalité révolutionnaire Le Soir d'Algérie 21 janvier 2010 L'état-major général (EMG) a voté contre les accords d'Evian. C'est loin, certes, d'être une révélation mais il importe toujours que des acteurs de la Révolution en fassent le rappel. Parmi ceux-là, le commandant Azzedine qui reste l'un des rares à tordre le cou aux usurpations historiques. Sofiane Aït-Iflis – Alger (Le Soir) – On ne reparle pas de la création de l'état-major général comme d'une épopée au-dessus des critiques. Cela se vérifie à chaque fois que la mémoire est sollicitée pour témoigner de cet épisode de la guerre de Libération nationale. Cela a été précisément le cas, hier, au forum d' El Moudjahid qui a abrité une commémoration du cinquantenaire de la création de l'EMG et où le commandant Azzedine a relaté la vérité historique telle que vécue. Non seulement cela mais aussi la vérité historique dans ses prolongements futurs, ses implications post-indépendance. Il en ressort, en définitive, que l'état-major général, dirigé à l'époque par Houari Boumediene, s'est inscrit, dès sa mise sur pied, dans la logique de la prise de pouvoir. Aussi ce dernier s'était-il attelé à gripper la machine du Gouvernement provisoire de la république algérienne (GPRA) et à sectionner les cordons de cohésion du Conseil national de la révolution algérienne (CNRA). En fait, plus prosaïquement, l'état-major général, dès sa création, activait à couper l'herbe sous le pied des structures intérieures de la Révolution, c'est-à-dire les wilayas de l'intérieur, et ce, dans la perspective de mettre main basse sur le pouvoir une fois l'indépendance acquise. Et cette logique du pouvoir a indiqué à l'EMG de se mettre en porte-à-faux avec le GPRA qui, lui, était favorable à la négociation — des accords d'Evian — pour l'indépendance nationale. Il vota contre ces accords, témoigne le commandant Azzedine. Cependant, il fera contre mauvaise fortune bon cœur, en ce sens qu'il ne tenta point de saborder le processus. Le commandant Azzedine dut démissionner, en 1960, de l'EMG en pleine réunion du CNRA. Lui, légaliste, s'opposait au congrès de Tripoli. Un congrès qui n'avait pas lieu d'être, encore moins de se tenir à l'étranger, d'autant que les textes du CNRA, de la Révolution, donc, attestaient qu'après le congrès de la Soummam en 1956, le prochain congrès devait se tenir, après l'indépendance sur le sol de l'Algérie libérée. «J'ai retiré mes billes du jeu, car j'étais légaliste», a témoigné le commandant Azzedine qui, au passage, a expliqué que la crise entre l'EMG et le GPRA est véritablement née à Tunis pour éclater avec fracas à Tripoli. C'est à Tripoli que l'EMG et ses partisans détruisirent le CNRA et égorgèrent le GPRA. L'EMG, fort de l'armée des frontières qu'il a structurée et des appuis internationaux qu'il s'est assuré, a organisé et réussi la prise de pouvoir. Même la réunion des Wilayas II, III, IV, la Zone autonome d'Alger et les Fédérations de Tunisie, Maroc et France du 25 juin 1962 à Zemmoura n'y a rien pu contre l'EMG. L'initiative fut inopérante devant le forcing de l'EMG. Le journaliste Mohamed Abbas qui pioche de ce côté-ci de l'histoire, a attesté lui que «l'Algérie n'est toujours pas sortie de l'ère EMG», ceci même s'il encense quelque peu feu Houari Boumediene à qui il reconnaît l'intelligence d'avoir assis son action politique sur des programmes. Mohamed Abbas a considéré aussi que les années 1980 ont accouché de l'anti-EMG, en ce sens, dit-il, qu'il y eut remise en cause des projections de l'EMG, version Boumediene. Mais visiblement, ce n'était qu'un interlude, puisque Abbas soutient que le pays est toujours sous l'ère de l'EMG. Plus clairement, il s'est opéré une réappropriation du pouvoir par les l'EMG, dans sa conception originelle, sinon par sa déclinaison présente, en l'occurrence l'armée.