Ce fut dans le cadre des activités du Café Littéraire de Cherchell géré et organisé par l'association Belombra de Cherchell, que les animateurs de cet événement, en l'occurrence le Dr R.Belahcène, M. Benmekhlouf et N. Melhani, ont convié l'historienne et universitaire, la Dr Yamna Behiri, spécialiste d'histoire moderne et contemporaine, professeur à l'Université de Bouzaréah, à l'effet d'animer une conférence portant sur la présentation de son récent ouvrage, relatif à la communauté de la ville de Cherchell au 19e siècle sur le plan social, économique et culturel. Cette historienne qui a participé à différents colloques et animé des dizaines de conférences au niveau national et international , notamment en Turquie, à l'occasion d'un colloque international «héritage de la civilisation ottomane dans la ville de Cherchell» et à Tlemcen, du colloque ayant pour thème «L'immigration des Andalous vers le Maghreb» , à Médéa lors du colloque sur «Lalla Fatma N'soumer», et sur «Mohamed Ben Aïssa el Berkani». Lors de son exposé, l'historienne précisera d'emblée que «le sujet de ce livre est dédié à la communauté de Cherchell, sachant qu'au cours de cette période du 19e siècle, cette ville constituait un modèle pour le reste des villes algériennes qui lui sont semblables, sachant aussi que leurs caractéristiques sont communes, au niveau naturel et historique, comme en témoigne la famille cherchelloise dans son environnement social et ses relations familiales ou entre les membres de sa société», révélera l'oratrice, à propos du milieu et de la communauté locale musulmane. Les travaux de recherche de cette auteure furent basés sur des archives locales et nationales. Cette conférencière dira à ce propos : «En plus de la liste bibliographique de diverses sources, des références et des études ont été évoquées pour accomplir cette recherche» en renchérissant que ses sources d'étude sont «basées sur le début de la présence française tel que figurant dans les documents de la région, en particulier les documents du tribunal islamique de Cherchell, ainsi que sur les actes d'écriture et de transcription de mariages, de naissances, de décès et de divorces». Et d'ajouter plus loin que «cette étude est une enquête horizontale des documents touchant tous les acteurs qui ont joué un rôle actif sur la scène des événements dans les communautés urbaine et rurale, en particulier les habitants de la ville de Cherchell de 1859 à 1873 ainsi qu'un tri opéré verticalement dans les états des tribus et des zones urbaines voisines de la même période, en raison des interactions communautaires de la ville avec d'autres résidents des zones voisines, imposées par les conditions de la zone occupée. Cette période a également été marquée par des changements significatifs dans l'ensemble de l'Algérie, représentée par l'émergence d'un régime militaire colonial, avec l'instauration d'une série de lois injustes visant à démanteler le tissu social et économique». La conférencière évoquera, tour à tour à ce titre, les divers «sénatus-consulte» édités par Napoléon relatifs à la dépossession des autochtones indigènes en Algérie, tout en citant aussi la Loi Warnier du 26 juillet 1873 «relative à l'établissement et à la conservation de la propriété en Algérie» dont l'objectif était d'établir les droits de propriété sur les terres algériennes et de mettre fin au collectivisme agraire indigène. Cette loi, dira l'historienne «cherche à atteindre la francisation de la terre musulmane et la délivrance conditionnelle aux indigènes après enquête de titres de propriété. On constate la propriété individuelle là où elle existe ; on la constitue dans les territoires de propriétés collectives par des procédures d'enquête générale s'appliquant à tout un douar ou à toute une tribu». La conférencière ajoutera à ce propos : «Compte tenu de la situation politique dont la ville de Cherchell est victime, cette dernière, sous occupation française, souffrait d'un important retard économique résultant d'une féroce répression et d'une dépossession du territoire algérien au profit des colons, affectant ainsi divers segments de la société algérienne voire les relations qui prévalaient entre les musulmans et les ruraux ou entre musulmans et les urbains.» La conférencière définira plus loin son thème de prédilection en affirmant «la nature de la recherche m'a incitée à essayer de détecter l'importance que joue la famille dans la région de Cherchell, et à différents niveaux et l'étendue de son aide dans la communauté en contribuant à la stabilité générale dans la région et à la préservation de la vie privée ainsi qu'à la cohésion, en comparaison avec les autres communautés proches ou voisine», en renchérissant à ce propos «la recherche dans la situation sociale de la communauté économique de la ville pendant la phase sensible de l'histoire de l'Algérie soulève de nombreuses questions historiques, cela est dû à la spécificité qui se caractérise par cette étape critique de l'occupation française, ainsi que le rôle joué par cet envahisseur dans l'histoire de cette communauté , comme il est le plus important facteur affectant la communauté afin de briser la cohésion d'une région tribale par l'occupation de son territoire et de le diviser, en provoquant la fragmentation des structures urbaines de la société et les plus pauvres» . Cette historienne confirmera plus loin son choix de l'étude en précisant «Nonobstant cette situation, dira cette historienne, ces documents fournissent également des informations sur la qualité de la propriété immobilière et les procédures de son transfert dans une même famille et leur mode de distribution au sein de la famille. Les différentes strates sociales de la région, permettent d'identifier la densité des quartiers résidentiels et commerciaux, et permettent aussi d'identifier la topographie de la région et d'ajuster les caractéristiques des installations, qui ont été déformées lors de la période coloniale». révélera la conférencière en expliquant à ce propos que «L'accès aux informations sur la famille et sur la société dans la région Cherchell à travers des documents constitue une source fertile non encore exploitée pleinement à travers des recherches. Ces documents contiennent du matériel abondant, y compris les actes de mariage, de divorce et d'entretien ainsi que des actes de vente et d'achat, des testaments et des actes de donation. Ces mêmes documents ont permis de mettre à jour des interactions entre la communauté urbaine et tribale», en révélant plus loin que «ces documents qui ont revêtu le statut de documents administratifs et qui ont été utilisés dans le but de maintenir les intérêts publics et privés à l'époque, ne sont pas des documents relatant des événements et des faits historiques autant qu'était la codification des conditions de changement personnel dans les étapes de la vie sociale et économique comme le mariage et le divorce, la vente, l'achat, la donation, ou la préservation de legs, quoique ces actes n'ont pas révélé, ni précisé dans les détails la nature des conflits opposant les parties, en vertu d'un jugement et de l'étendue de l'obéissance ou à contester toute disposition juridique lors de la remise de peine ou de pardonner ; en temps opportun, ces dossiers sont utilisés par les membres de la communauté et de l'institution du pouvoir judiciaire pour rendre un arbitrage et de règler des conflits et des différends en indiquant la propriété de chacun avec des preuves et des arguments. Ce type de documents permet aussi de répondre à nos questions et de satisfaire notre curiosité au sujet des situations et des relations sociales qui régnaient lors de cette période», conclura la conférencière. Ainsi, selon l'oratrice, «grâce à une étude exhaustive de tous les contrats de cette étude, soit neuf cent quatorze contrats, une liste préliminaire de situations pour les familles qui ont déjà existé à Cherchell au cours de la période de cette étude, a été fournie et où il a été identifié formellement 526 familles cherchelloises, ainsi que les caractéristiques du mariage de cette époque, notamment : la dot de mariage, composée d'une somme d'argent, d'un caftan, d'une ceinture, d'un «hayek» (voile pour la mariée), ainsi que des fournitures dédiées au domicile conjugal, dont d'autres font partie du dispositif de la mariée, sachant qu'il a été observé que ces pratiques sont communes à la communauté d'Alger.» Ainsi, à travers cet exposé , il apparaît que ces évenements du mariage à Cherchell exigeaient plusieurs facteurs, notamment l'appartenance sociale, la position sociale, le montant exorbitant de la dot pour la femme, en plus des composants en bijoux qui reflètent les habitudes culturelles inhérentes aux traditions influencées par la présence andalouse et ottomane dans la région. Ce qui pousse certaines familles à adopter la coutume du mariage, de Orf de Sidi Maâmar avec une dot de mariage différente. A travers cette conférence, il ressort que le taux de divorce était considérable, quelques-unes des causes sont les conditions de vie, la pauvreté, circonstances qui mènent la femme à demander le divorce, de même, il apparaît que les Européens et la diversité de leurs origines ont été incapables d'imposer leur culture et les habitudes des éléments locaux, car ils traitent avec les familles de la région dans le cadre de l'activité commerciale. Houari Larbi