Le Rassemblement national démocratique du Premier ministre Ahmed Ouyahia tranche, officiellement, sur la question de l'élection présidentielle de 2019. Sans surprise et sans la moindre hésitation, Ouyahia et son parti annoncent leur candidat : Abdelaziz Bouteflika. C'était lors de la 5e session ordinaire du conseil national du RND, tenue jeudi et vendredi derniers, à la Mutuelle des matériaux de construction de Zeralda à Alger. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Dès son allocution d'ouverture, Ahmed Ouyahia annonce la couleur : «Je suis heureux de constater que notre conseil national entend appeler le moudjahid Abdelaziz Bouteflika à poursuivre sa mission et son sacrifice au service de l'Algérie et que le Rassemblement national démocratique l'assure de son soutien pour l'accomplissement d'un nouveau mandat à la présidence de la République.» C'était jeudi, dans la matinée. Le vendredi, c'est le conseil national qui adopte une résolution spéciale dans ce sens. Intitulée «Appel au moudjahid Abdelaziz Bouteflika à se présenter à l'élection présidentielle de 2019», cette résolution, tout comme la déclaration de Ouyahia d'ailleurs, a le mérite de la clarté. On y lit, notamment, que «le conseil national souligne que le Président Abdelaziz Bouteflika demeure incontestablement un pivot de rassemblement et de mobilisation de la grande majorité du peuple algérien dont il a acquis la confiance et le soutien du fait de son brillant passé de moudjahid et des résultats atteints par le pays sous sa direction». Cela étant, «le conseil national demande instamment au moudjahid Abdelaziz Bouteflika de répondre aux appels nombreux qui s'élèvent de la société, pour qu'il continue sa mission à la direction du pays en se portant candidat à l'élection présidentielle du printemps 2019». A dix mois du rendez-vous présidentiel d'avril 2019, cette sortie de Ouyahia met définitivement fin au moindre petit soupçon de suspense quant aux intentions de Abdelaziz Bouteflika. Le RND est ainsi le deuxième parti à appeler pour un cinquième mandat pour l'actuel patron d'El-Mouradia, après le FLN qui, pour rappel, a comme président, Abdelaziz Bouteflika ! C'est dire que les deux plus grands partis du pays, que président les deux chefs de l'exécutif qui prépare et qui va organiser l'élection présidentielle ont d'ores et déjà exprimé leur choix, celui du pouvoir donc quant au «bon candidat» . Jeudi dernier, le Premier ministre avait également écarté, de manière officielle, tout scénario «fantaisiste» comme ceux ayant précédé l'élection de 2014. A savoir, un éventuel report de la présidentielle, une période de transition, etc. «Ce qui n'est pas naturel aussi, disait en effet Ouyahia, ce sont les appels répétés pour une période de transition comme si le peuple souverain n'a pas droit à la parole». Il rejoint, en cela, une précédente déclaration de Abdelaziz Bouteflika qui affirmait, il y a quelques mois, que l'élection présidentielle de 2019 aura lieu dans les délais. Contrairement aux présidentielles précédentes, le pouvoir a, cette fois, anticipé sur les événements en annonçant publiquement son candidat à une année avant le rendez-vous électoral. D'ailleurs, la campagne électorale pour le candidat Bouteflika bat son plein depuis des mois à travers les médias. Des opérations spectaculaires, comme celle des «50 000 logements», ou encore des sorties électoralistes du ministre de l'Intérieur, Nouredine Bédoui, ne sont, du reste, que la partie visible de l'iceberg. Au plan partisan, cette nouvelle stratégie du pouvoir est de nature à épargner des crises à des formations comme le RND ou le FLN. Ouyahia le sait mieux que quiconque lui qui, entre septembre 2012 et janvier 2013, avait successivement perdu son poste de Premier ministre et de secrétaire général du RND sur décision de Bouteflika qui préparait, à l'époque, son quatrième mandat. Il est, en tout cas, certain que l'annonce de ce week-end fera diminuer la pression sur un Ahmed Ouyahia que le cercle présidentiel soupçonnait de nourrir des ambitions présidentielles. D'où certains «coups» reçus, comme la fameuse tripartite bis organisée par le FLN, ou encore cette affaire des taxes annulées par Bouteflika en Conseil des ministres, histoire de marquer l'opinion tout en discréditant son Premier ministre. En exprimant son soutien à un cinquième mandat, Ahmed Ouyahia reprendra-t-il son ascendant au sein d'un gouvernement où le ministre de l'Intérieur est, volontairement, hissé au rang de Premier ministre bis par Abdelaziz Bouteflika ? Le même scénario vécu par l'ancien Premier ministre, Abdelmalek Sellal, avec son ministre de l'Habitat d'alors, Abdelmadjid Tebboune, en fait. K. A.