L'Algérie a tout intérêt à rattraper son retard et à investir dans les énergies solaires, estime Mouloud Bakli, responsable monde du développement solaire au sein du groupe Air Liquide. L'investissement dans les énergies solaires permettra non seulement de réaliser des économies importantes, mais de générer des rentrées en devises considérables. Samira Azzegag - Alger (Le Soir) - «Il créera également 500 000 nouveaux postes d'emploi. L'énergie solaire, déployée en 2017, a précisé l'invité de la Chaîne 3, a généré 10 millions de postes d'emploi dans le monde et a épargné 1,8 giga tonnes de CO2 ; c'est l'équivalent de toute la pollution produite par tout le transport des Etats-Unis». Donc, le solaire n'a plus rien à prouver en termes de compétitivité et déploiement, ajoute le même intervenant, qui rappelle que le gouvernement algérien est en train de lancer des programmes d'envergure dans le secteur depuis 2009, même si l'impact n'est pas encore visible jusqu'à ce jour. Le spécialiste en énergies renouvelables a estimé que ce retard a un coût exorbitant et occasionne d'énormes pertes à l'économie nationale, notamment dans les subventions de l'électricité. «Nous subventionnons l'électricité à un montant exorbitant, puisque le coût de production revient à 10,4 DA le kW et on le paye seulement à 4 DA le kW ; c'est une perte sèche, alors qu'on a une alternative, qui permettrait à l'Etat de faire de très grosses économies.» Il trouve, donc, aberrant de continuer à utiliser le gaz pour avoir de la lumière, alors qu'il est plus rentable de «substituer le gaz, qui peut être exporté, en énergie renouvelable». «Cela générera des recettes en devises supplémentaires», conclut l'intervenant. Cependant, le spécialiste pense que l'investissement dans le domaine évoluera mieux dans un environnement favorable. «L'énergie solaire est une technologie simple, non polluante, mais on a tout un écosystème à mettre en place, à commencer par un travail de sensibilisation». Il salue le travail du ministère de l'Intérieur engagé depuis début 2018, en direction des collectivités locales. Il y a eu un vrai travail de sensibilisation et d'explication, vu les réalisations importantes. «Vous allez voir l'impact, tous les P/APC vont passer au solaire», optimise le spécialiste, qui appelle à «la révision du code d'importation», «enlever les taxes aberrantes imposées aux fabricants locaux des panneaux solaires et instaurer une taxe sur les panneaux chinois», pour qu'il y ait une concurrence équitable. Je reste optimiste, dit-il, «notre pays recèle un potentiel énorme, qu'il faut utiliser intelligemment. Nous pouvons rattraper le retard accusé, puisque nos voisins tunisiens l'ont fait en un temps record. Actuellement, ils ont lancé quatre projets qui sont d'un niveau international». Il rappelle dans le même cadre que l'Algérie a une position stratégique, en étant au centre de l'Afrique du Nord, « si nous déployons de manière stratégique nos capacités et richesses, nous pourrons effectivement alimenter en électricité l'Afrique subsaharienne, souffrant d'un problème de réseau, à un tarif réduit. Cela sera une aubaine pour notre pays». Selon lui, le coût de production de l'énergie solaire, contrairement aux idées répandues, est négligeable, soit 4 fois moins cher comparativement aux énergies traditionnelles. Plus précis, M. Bakli indique que le prix des équipements a baissé de près de 80% durant ces 10 dernières années. «Les installations pourraient, aujourd'hui, s'autofinancer. On parlait d'un coût installé au watt de 3 à 4 dollars en 2008, aujourd'hui on l'estime à 0,6 dollar le watt», avance le spécialiste. En ce qui concerne la réalisation du programme national de développement des énergies renouvelables, M. Bakli appelle les autorités à appuyer cette démarche par une batterie de mesures. Il s'agit, entre autres, de la subvention d'installation des panneaux solaires à la place de la subvention de l'électricité et une imposition aux entreprises énergivores de combler au moins 20% de leur consommation par la production de l'énergie solaire, en suivant l'initiative prise, récemment, par le ministère de l'Intérieur. S. A.